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International Civil Liberties

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The International Civil Liberties Alliance is a project of the Center for Vigilant Freedom Inc.  We are an international network of groups and individuals from diverse backgrounds, nationalities and cultures who strive to defend civil liberties, freedom of expression and constitutional democracy.

We aim to promote the secular rule of law, which we believe to be the basis of harmony and mutual respect between individuals and groups in the increasingly globalised world, and to draw attention to efforts to subvert it.  We believe in equality before the law, equality between men and women, and the rights of the individual and are open to participation by all people who respect these principles.

We believe that freedom of speech is the essential prerequisite for free and just societies, secular law, and the rights of the individual.

We are committed to building and participating in coalitions in all parts of the world to effect significant progress in protecting rights of the individual which are sadly being eroded in many countries including those in the West.


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The Center for Vigilant Freedom

10 septembre 2010 5 10 /09 /septembre /2010 02:37

http://img72.imageshack.us/img72/6564/59916133465376699937100.jpg

NEVER FORGET, NEVER SURRENDER -
NOUS N' OUBLIERONS JAMAIS, NOUS NE NOUS SOUMETTRONS JAMAIS!!


LA LIBERTE ?
Nous la connaissons tous !

Nous la connaissons intimement, car elle est inscrite dans nos gènes.
Elle est inhérente à la nature humaine et à notre civilisation judéo chrétienne.
Nous sommes tous issus de sociétés antiques. Dans leur évolution, deux religions nous ont fait passer de ces sociétés antiques aux sociétés modernes.

Cette évolution a permis, depuis le Décalogue, de valoriser les individus et l’exercice de leur libre arbitre, par la détermination des lois naturelles qui font qu’une vie est humaine et la découverte, par la raison, de ne pas attenter à sa propre vie, qui nous vient de Dieu, ce qui a donné une valeur à la vie humaine.

De ces fondements ont découlé les libertés individuelles, les droits de l’homme, le droit de propriété, tous ces éléments qui sont la base des idées libérales, qui sont constitutifs des sociétés modernes, des Etats de Droit et qui ont été repris dans les constitutions des Etats modernes occidentaux

De tous temps, certains ont voulu nous convaincre que c était faux. Que nous n’étions pas capables de nous gérer nous-mêmes, d’être responsables de notre vie, de notre avenir, qu’ils sauraient mieux le faire que nous, qu’ils nous devaient de nous assister !
Ils se sont mis en tète de gérer, avec notre argent, nos biens, notre vie de travail, nos repos et nos retraites, nos entreprises, nos déplacements, notre éducation, notre santé, nos informations. Ils nous ont convaincus que « C’ETAIT BON POUR NOUS ». Quand cette formule s’est trouvée éculée, elle est devenue « C EST BON POUR LA PLANETE ».

Pour gérer leur entreprise de spoliation, il leur fallait de l’argent « DES MOYENS» et ce fut toujours plus, ils nous ont ruiné et ont continué en empruntant en notre nom, ruinant ainsi les générations futures et trouvant toujours de nouveaux boucs émissaires qui étaient censés les dédouaner de leur responsabilité.
Ils ont utilisé tous les moyens pour y arriver, la force, la séduction. Il nous a fallut des efforts et des souffrances sans pareils, héroïques, pour recouvrer, quelquefois seulement, des bribes de cette liberté volée.

Ces idées libérales sont intolérables à certaines idéologies qui y trouvent des obstacles à leur emprise sur les individus et de ce fait n’ont eu de cesse que d’abattre les religions qui, prétendaient-ils, étaient un obstacle au développement des libertés Mais c’était toujours pour mieux nous en priver et nous conduire sur les voies de la servitude.

Or, depuis peu, dans les atteintes à cette liberté que nous nous acharnons à défendre, s’ajoute un autre intervenant qui lui, en est resté au stade des sociétés antiques violentes et prétend nous entrainer, avec cette même violence, dans une régression sans précédent, afin de nous soumettre totalement à des servitudes desquelles nous nous sommes arrachés péniblement pendant des siècles de luttes. Il est aidé en cela, sans vergogne, par ces idéologies socialo-marxistes, dont tout les séparent, y compris la liberté des femmes, mais à qui aucune compromission ne fait peur, complices d’un jour dans cette entreprise d’asservissement.

Les moyens exceptionnels que nous offrent les nouvelles technologies nous permettent à présent de nous regrouper et notre nombre sera notre force pour peser sur les décisions des politiques qui ont toujours été prêts à gagner des votes en limitant notre liberté et qui devraient se trouver à présent obligés de retrouver le chemin de la raison car :
Nous ne sommes pas un parti politique,
mais nous soutiendrons tous les hommes ou partis qui se dresseront pour défendre nos valeurs fondamentales

Nous ne sommes ni violents, ni racistes, nous avons simplement décidé de ne plus nous taire

NOUS SOMMES LA MAJORITÉ SILENCIEUSE

NOUS SOMMES LE PEUPLE
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9 septembre 2010 4 09 /09 /septembre /2010 23:00


nazi islam

La collaboration du grand mufti de Jérusalem, héros du monde islamique, avec les nazis est à l’honneur de la chaîne de télévision ARTE. Un rendez-vous à ne pas manquer, que nous conseillons également vivement à nos nombreux lecteurs musulmans.

La croix gammée et le turban

Durée : 50 minutes

Stéréo

En 16:9

Le sujet

Retour sur Amin al-Hussein, figure controversée, ancien grand mufti de Jérusalem, qui collabora avec les nazis et fut l'un des défenseurs de la cause panarabe.

Défenseur de la cause panarabe dès les années 20, Amin al-Hussein lutte contre l'émigration des juifs organisée par les Britanniques dans son pays, la Palestine. Affichant une sympathie évidente pour les thèses nazies dès 1937, il s'installe à Berlin, fréquente les dignitaires du IIIe Reich et s'intéresse à la «solution finale». Il est également à l'origine de la création d'un corps d'élite musulman destiné à combattre les Alliés, incorporé à la Waffen SS et composé de 12 000 hommes recrutés en Bosnie et en Croatie. A partir de biographies récentes, ce document revient sur la collaboration du grand mufti avec les nazis, mais aussi, plus largement, sur son rôle historique et politique, expliquant pourquoi il reste encore aujourd'hui un héros et un grand leader nationaliste dans la plupart des pays du Proche-Orient.

 


Croissant fertile et croix gammée 

Deux historiens allemands (1) se sont penchés sur l’histoire des relations entre le IIIe Reich et le monde arabo-musulman. Ces liens se nouent dès 1933 avec l’arrivée au pouvoir du chancelier Hitler, ils se concrétisent avec l’envoi d’agents secrets et d’armes aux insurgés arabes de Palestine, puis au cours de la Deuxième Guerre mondiale, avec la création d’unités de combattants musulmans au sein de la Wehrmacht.

Le ciment de cette alliance était l’antisémitisme et l’objectif commun l’extermination des Juifs. Son principal artisan a été Hadj Amin Al-Husseini, grand mufti de Jérusalem.

Pourtant, cette alliance entre l’Islam et le régime nazi, n’allait pas de soi, et cela pour plusieurs raisons :

- « Mein Kampf » contient une diatribe contre l’Islam, mais les Musulmans ont fermé les yeux sur ce passage hostile ou l’ont ignoré : les éditeurs avaient pris soin de l’expurger de l’œuvre d’Adolf Hitler dans sa traduction en arabe,

- les mesures antisémites prises par Hitler en 1933 favorisaient l’immigration juive en Palestine,

- jusqu’à 1938, les nazis cherchaient à ménager la Grande-Bretagne alors que les nationalistes arabes de Palestine étaient en guerre ouverte avec la puissance mandataire. Cet obstacle sera levé après l’invasion de la Tchécoslovaquie par le Reich en 1938, prélude à la Deuxième Guerre mondiale.

Hadj Amin Al-Husseini et Al-Gailani, deux notables arabes exilés à Berlin

•En 1941, Hadj Amin Al-Husseini, mufti de Jérusalem a déjà un lourd passé d’agitateur en Palestine. Responsable d’émeutes et d’attentats antijuifs, il est recherché par la police britannique.
•Al-Gailani, ex-premier ministre du gouvernement irakien, est l’auteur d’une tentative de putsch en Irak et avec Al-Husseini, l’un des responsables de l’insurrection antibritannique dans ce pays.
Après l’échec de cette insurrection malgré le soutien des forces allemandes*, les deux hommes ont pu clandestinement quitter le Proche-Orient et gagner Berlin, où ils ont offert leurs services aux autorités allemandes. Les complices d’hier, devenus rivaux, se disputent âprement la place de leader du monde arabe. Le mufti triomphera de cette compétition. Le gouvernement allemand met à sa disposition des fonds, des locaux, du personnel, ce qui lui permet de créer un service de renseignement très performant. Il devient l’interlocuteur incontournable de nazis sur toutes les questions concernant le monde arabo-musulman.

Le mufti a l’honneur de s’entretenir avec le chancelier Hitler en novembre 1941. Ses activités le conduisent aussi à rencontrer Mussolini. Il joue un rôle déterminant dans l’engagement de Musulmans dans l’armée allemande.

Une opinion publique arabo-musulmane favorable à l’axe

Les auteurs estiment que l’opinion publique des pays arabo-musulmans, était, à une écrasante majorité, favorable à l’axe et « la rue arabe » exprimait ouvertement son admiration pour Hitler que certains considéraient comme un sauveur, le douzième imam envoyé sur terre selon des prédictions anciennes.

Les motivations variaient d’un pays à l’autre :

•pour les habitants de l’Irak, de l’Iran et de l’Egypte, les Allemands apparaissaient comme les futurs libérateurs du « joug britannique »
•pour les Arabes de Palestine, les nazis étaient leurs alliés contre l’ennemi sioniste.
Le dénominateur commun de l’alliance avec le Reich était l’antisémitisme, attisé chez les Musulmans par les radios allemandes avec les discours enflammés du mufti contre les Américains, les Britanniques, les Bolcheviks, présentés comme les valets de « la juiverie internationale ». Cette propagande haineuse en arabe se déversait sur le Proche-Orient, le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord.

Les sympathies envers l’Allemagne nazie se manifestaient par des graffitis sur les murs des villes, par le salut « Heil Hitler » au lieu de « Salam », par des attentats et des sabotages à l’arrière des lignes anglaises en Palestine et même, en Irak, par de véritables affrontements avec les troupes britanniques.

Parmi les dirigeants ou les futurs dirigeants arabes favorables à Hitler figuraient le roi d’Arabie Séoudite, Ibn Séoud, Gamal Abdel Nasser, lecteur des Protocoles des Sages de Sion et Anouar al Sadate.

Al-Husseini et la Shoah

Le zèle antisémite du mufti, parfaitement informé de l’extermination des Juifs d’Europe par ses amis Himmler, Goebbels et Eichmann, l’a amené à envoyer un délégué visiter un camp de concentration et à effectuer des démarches pour s’opposer à un accord (négocié avec le Joint par l’intermédiaire de la Croix Rouge) prévoyant le sauvetage d’enfants de Pologne, de Hongrie et de Slovaquie : cela renforcerait le judaïsme en Palestine pour le mufti ! A la suite de son intervention, le projet fut annulé.

Après la guerre, alors que les crimes monstrueux de l’Allemagne nazie et de ses alliés ont éclaté au grand jour lors du procès de Nuremberg, des « historiens » ont tenté de présenter les prises de position du mufti comme liées à un opportunisme politique, à une alliance de circonstances (« les ennemis de mes ennemis sont mes amis »), et non pas comme une adhésion au nazisme. M. Cüppers et K. M. Mallmann démontrent qu’une telle interprétation ne résiste pas à l’analyse des faits. Les pressons exercées par le mufti en faveur de la déportation d’enfants juifs en sont un exemple, parmi d’autres.

L’Afrikakorps en juillet 1942 : un péril mortel pour le Yichouv

En juillet 1942, après avoir vaincu les Britanniques, l’Afrikakorps, sous les ordres du Feld-maréchal Rommel est aux portes de l’Egypte qu’il s’apprête à envahir. C’est l’ultime étape avant le Sinaï et la Palestine. Le commandement allemand prévoit l’envoi, de spécialistes des assassinats de masse, forts de leur expérience sur les populations juives de l’est européen, tueries réalisées avec le concours de supplétifs locaux**.

Et l’on imagine ce qui serait advenu du Yichouv, sans la victorieuse contre-offensive de la huitième armée britannique dirigée par le maréchal Montgomery. Les supplétifs locaux n’auraient pas manqué pour l’accomplissement de l’extermination des Juifs de Palestine, pas plus que n’avaient manqué les « bonnes volontés » en Lituanie pour participer à l’assassinat de plus de 130.000 Juifs en 1941.

Les volontaires musulmans dans les armées d’Hitler

A partir de 1941, des milliers de Musulmans, d’origine turque, croate, bosniaque,…se sont engagés dans la Wehrmacht, et tout à été fait pour les y accueillir en frères : fez spécialement conçu pour eux au lieu du képi, alimentation sans porc ni alcool, unités majoritairement musulmanes avec un encadrement germanique, imams assurant le respect de la religion de Mahomet, et même conférences sur la parenté (?) entre les idéologies de l’Islam et du national-socialisme. Le couronnement de cette fraternité d’armes a été la constitution d’une division musulmane de Waffen-SS.

On sait peu de choses sur les exploits de ces guerriers, affectés en Yougoslavie à la lutte contre les partisans de Tito, sinon qu’ils ont commis des crimes de guerre contre les populations civiles.

Mais ces tentatives de création de divisions islamiques ont abouti à un fiasco : des désertions massives ont conduit à leur dissolution avant la fin de la guerre.

Après la défaite allemande : une collusion souterraine

Les criminels de guerre allemands ont été nombreux à échapper à la justice. Certains ont fui vers l’Amérique latine, d’autres vers les pays arabes :

•en Egypte, ils ont pu accéder à des postes de responsabilité comme conseillers militaires du Raïs.
•Aloïs Brunner, chef du camp de Drancy a trouvé refuge en Syrie ;
•enfin d’anciens SS sont devenus instructeurs dans les camps palestiniens du Liban.
Hitler est demeuré populaire dans le monde arabe. Le mufti, membre du « haut-comité arabe » a poursuivi sa lutte contre Israël et contribué à l’union sacrée, le Djihad, contre « l’entité sioniste » en 1947 et 1948.

Conclusion

Cette étude très fouillée des relations entre l’Islam et le IIIe Reich est le fruit de travaux de recherche considérables, dont témoigne une imposante bibliographie comportant une longue liste d’archives allemandes.

Ces relations s’inscrivent dans le contexte de la Deuxième Guerre mondiale au cours de laquelle les nazis ont trouvé des alliés, des recrues et des collaborateurs dans les pays occupés, y compris parmi d’anciennes nations ennemies***

Il faut remercier les éditions Verdier d’avoir fait traduire cet essai. Un petit bémol cependant, quelques maladresses dans l’écriture ou la traduction. Mais ce sont là des défauts mineurs : ce livre, qui fourmille de détails inédits ou peu connus, passionnera tous ceux qui s’intéressent à l’histoire.

Notes

*Les forces allemandes ont pu disposer librement des aéroports de Syrie et de stocks d’arsenaux de l’armée française, grâce à l’obligeance du régime de Vichy

** Leur chef est l’Obersturmbannführer Walther Rauff, inventeur des camions de la mort, dont les gaz d’échappement provoquaient l’asphyxie des détenus.

*** C’est ainsi que les forces de Vichy se sont opposées au débarquement américain en Afrique du Nord, du 8 novembre 1942, tandis qu’elles ont ouvert les portes de la Tunisie au corps expéditionnaire allemand.

Référence

1-Martin Cüppers et Klaus-Michael Mallmann : « Croissant fertile et croix gammée »
Ed. Verdier histoire 345 pages. Traduit de l’allemand par Barbara Fontaine 2009

Illustrations

Fig 1 Page de couverture : Adolf Hitler et le mufti de Jérusalem le 28 novembre 1941 à Berlin
Fig 2 Le général Montgomery
Fig 3 Insigne de la 13e division de montagne de la Waffen-SS 

Lisez le DOSSIER  sur LE NAZISME

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9 septembre 2010 4 09 /09 /septembre /2010 18:07
Pierre-André Taguieff prend position dans le débat qui oppose depuis quelques années, en Allemagne et en France notamment, les partisans d'une édition critique de Mein Kampf à ceux qui, pour des raisons diverses, y sont hostiles. Considérant qu'il serait irresponsable de parier sur l'ignorance, et que le « laisser-faire » en matière éditoriale relèverait ici de l'aveuglement volontaire, Pierre-André Taguieff plaide en faveur d'une édition historique et critique de Mein Kampf.

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À Georges Goriely (1921-1998),
In memoriam

Nota : Le présent article, volontairement privé de son appareil critique volumineux afin de pouvoir être mis en ligne, est extrait d'une étude inédite, à paraître en 2010. L'auteur remercie Anne Quinchon pour sa relecture d'une première version de cet article.


Parmi les historiens professionnels, les spécialistes reconnus du nazisme qui ont étudié de près Hitler en tant qu'idéologue, donc en tant qu'auteur de Mein Kampf et d'un grand nombre de discours, de déclarations et de conversations à teneur doctrinale, ne sont pas très nombreux. Ils représentent une minorité dans la masse de leurs pairs : Hugh Trevor-Roper, Joachim Fest, Werner Maser, Karl Dietrich Bracher, Klaus Hildebrand, Lucy Dawidowicz, Eberhard Jäckel, George L. Mosse, Gerald Fleming, Saul Friedländer, David Bankier, William Carr, Richard Breitman, Robert A. Pois, Peter Longerich ou Ian Kershaw. Ils se sont tous appliqués à mettre en évidence le rôle joué par Hitler, en tant que sujet doté de convictions idéologiques, dans le processus de décision qui a conduit au génocide des Juifs d'Europe. Ils ont donc pris au sérieux Hitler en tant qu'idéologue, ou comme producteur d'une « vision du monde » (Weltanschauung) - terme récurrent dans Mein Kampf. Ils ont en même temps soutenu la thèse selon laquelle Hitler fut le meneur d'hommes sans qui jamais l'extermination des Juifs d'Europe n'aurait eu lieu. Au milieu des années 1960, le grand historien Walter Laqueur, à l'instar de George L. Mosse - auteur d'un ouvrage consacré aux « origines intellectuelles du Troisième Reich » (The Crisis of German Ideology, 1964), suivi d'une anthologie de textes introduits et situés, Nazi Culture (1966) -, avait déjà souligné l'importance de la dimension idéologique du mouvement nazi : « La doctrine du mouvement hitlérien ne fut pas un simple  stratagème de propagande, ni l'épanchement d'un petit groupe d'esprits déséquilibrés. Au contraire, le nazisme est fondé sur un corps de doctrine qui date d'au moins un siècle. » Or, la doctrine nazie se confond pour l'essentiel avec la doctrine hitlérienne. Voilà une raison qui pourrait paraître suffisante d'étudier de près l'ouvrage où Hitler a exposé systématiquement sa doctrine - sa « vision du monde » - et son programme politique, Mein Kampf.

Cependant, même chez ces historiens spécialisés, à l'exception de Maser, de Mosse, de Dawidowicz, de Carr, de Pois, de Longerich et de Jäckel, les constructions doctrinales du Führer n'ont guère été prises au sérieux, ni en elles-mêmes, ni en tant que facteur causal de l'évolution du Troisième Reich. Quand elles n'ont pas été traitées comme des symptômes d'un sujet atteint de troubles mentaux - marqués par une forte dimension paranoïaque -, elles ont été globalement réduites à de la propagande : Hitler ne pouvait avoir été autre chose qu'un habile démagogue maîtrisant les techniques de la propagande politique, un praticien doué du discours propagandiste, bricolé à partir de recettes rhétoriques, de stéréotypes et de clichés. Le statut de ses écrits et de ses discours serait donc de l'ordre du slogan. Cette thèse n'est contestable qu'en ce qu'elle prend une allure réductionniste, car nul ne saurait nier la dimension sloganique du discours hitlérien. Mais cette vision s'est radicalisée sous l'impulsion d'un Alan Bullock, dont les premiers travaux sur Hitler, au début des années 1950, ont banalisé l'image d'un Hitler opportuniste, mû par le seul appétit du pouvoir, doublé d'un aventurier et d'un charlatan (Bullock corrigera plus tard cette vision sommaire du dictateur). Et l'on ne s'attend pas à trouver une pensée politique élaborée chez un imposteur, un escroc, un matamore ou un bateleur d'estrade. Comment prendre au sérieux un tel personnage de comédie ?

Nombreux sont les historiens qui s'en sont tenus à un jugement polémique et hypermoral banalisé dans la littérature antinazie et plus largement antifasciste : Hitler, chef inhumain d'un régime inhumain, ne pouvait avoir eu une pensée politique cohérente, il aurait été incapable de forger une doctrine suffisamment consistante pour qu'on prenne la peine de l'analyser sérieusement. D'autres historiens se sont fondés sur le postulat que la dimension idéologique du « combat » d'Hitler était négligeable au regard des aspects organisationnels, institutionnels et tactico-stratégiques du mouvement nazi, replacé dans les contextes sociaux, économiques et politiques variables qu'il a su exploiter à son profit, jusqu'à la catastrophe finale. Les approches fonctionnalistes du nazisme, qui se sont multipliées depuis les années 1980, pour en fin de compte dominer dans le champ universitaire, ont fortement contribué à détourner l'attention des chercheurs de la doctrine hitlérienne, niée ou minimisée dans ses effets, et à les dissuader d'étudier son rôle dans l'évolution du nazisme. À la minimisation de la fonction remplie par l'idéologie, notamment par l'antisémitisme, s'est ajoutée celle du rôle joué par Hitler dans le processus de décision dont l'extermination des Juifs d'Europe fut le résultat. Les plus radicaux des historiens fonctionnalistes, tel Hans Mommsen, ont cru pouvoir étudier le processus ayant conduit à la « solution finale de la question juive » sans tenir compte des intentions exterminatrices exprimées par Hitler, ni même des facteurs strictement idéologiques, en dépit des travaux montrant la haute intensité et la grande diffusion de l'antisémitisme en Allemagne (Oded Heilbronner, David Bankier, Christopher R. Browning). Dans la perspective fonctionnaliste, il ne restait plus aux historiens spécialisés que d'étudier dans tous ses détails un vaste « engrenage » sans visée ni sujet.

Les partisans les plus dogmatiques d'une approche fonctionnaliste  du Troisième Reich ont été logiquement conduits à présenter Hitler comme un « dictateur faible » (Hans Mommsen). Dès lors, à quoi bon s'intéresser aux textes et aux discours produits par un aussi piètre Führer, aux pouvoirs aussi limités ? Les approches relevant du sociologisme, fondées sur le primat de l'action des forces collectives, se sont expressément opposées aux approches « hitlérocentriques », privilégiant la personnalité d'Hitler, dans la perspective de l'historien biographe (tel Werner Maser) ou dans celle de l'historien des idées politiques (tel Eberhard Jäckel), parfois tentées en effet de souscrire à une version trop simple de l'approche « intentionnaliste » de la Shoah, en tant que réalisation progressive d'un projet génocidaire conçu par Hitler dès le début des années 1920.

D'une façon plus générale, Karl Dietrich Bracher, en 1976, avait pointé l'incapacité des adversaires du nazisme à prendre au sérieux l'idéologie national-socialiste. Les traces de cette incapacité militante sont reconnaissables dans les travaux historiographiques sur le nazisme qui se sont entre-temps multipliés. Ainsi, par exemple, en postulant que les nazis ne cessaient d'employer métaphoriquement les mots désignant leurs objectifs, on rend inaccessibles en principe leurs « intentions » (leurs mots étant censés les masquer ou les travestir), et l'on en arrive à abandonner l'analyse des discours idéologiques des leaders, à commencer par ceux de Hitler. Tel aura été l'effet indésirable de la généralisation abusive, à tout le langage nazi, des stratégies d'euphémisation utilisées par l'appareil du Troisième Reich pour désigner tout ce qui concernait la « Solution finale ». En 2005, Jeffrey Herf faisait justement remarquer à propos de certaines approches hypercritiques du langage nazi impliquant un décryptage infini de celui-ci, que « la signification de leurs mots [des nazis], pour ceux qui les prenaient au sérieux, était claire », et qu'il fallait s'en tenir à l'hypothèse suivante : « Les nazis disaient ce qu'ils voulaient dire et voulaient dire ce qu'ils disaient. » Les nazis, à commencer par Hitler lui-même, le « guide » suprême qui n'a cessé de donner le ton sous le Troisième Reich, où chaque haut dirigeant du régime était conduit à « travailler en direction du Führer » (Ian Kershaw), rivalisant avec tous les autres dans la mise en ½uvre de la « volonté du Führer ». Cette « volonté » normative, ils en trouvaient l'expression soit dans Mein Kampf, soit dans tel ou tel discours d'Hitler. L'emprise d'Hitler sur le régime nazi s'est notamment marquée par la pression permanente qu'il a exercée en direction du judéocide, quels qu'en aient été les modes de réalisation (des fusillades aux gazages). Dès lors, il n'est guère de pire aveuglement sur le phénomène nazi que celui qui frappe les historiens prétendant l'étudier en faisant abstraction du rôle déterminant joué dans son évolution par le dictateur-idéologue que fut Hitler et par ses productions doctrinales. Pour s'en convaincre, il faut faire un long et nécessaire détour par Mein Kampf, livre qui est devenu « la bible du mouvement nazi et l'un des textes majeurs de l'antisémitisme » (Robert Wistrich).

 

Mein Kampf : genèse, forme, contenu, modes d'emploi

 

Dans Mein Kampf, qui sera son unique livre publié, Hitler expose sa doctrine ou sa « conception du monde » (Weltanschauung), sous la forme d'un bilan incluant l'esquisse d'une autobiographie, le récit de la formation du « mouvement national-socialiste » et la définition de ses « buts ». Nombre d'historiens, tel Robert Wistrich, ont souligné le fait que, « en tant qu'autobiographie, Mein Kampf nous offre des aperçus essentiels sur le passé de Hitler et sur les influences qui ont contribué à former sa vision du monde ». Il importe également de prendre au sérieux le fait que Hitler donne son propre parcours comme exemplaire, celui de l'auto-construction d'un héros de l'Allemagne, conduit à l'éveil par la révélation progressive de l'unique principe du mal : la « juiverie internationale », aux multiples visages répulsifs (du financier apatride au bolchevik sanguinaire).

Lorsqu'il revient au début de Mein Kampf sur le moment de cette prise conscience, il la célèbre comme l'expérience d'une renaissance, d'un bouleversement intérieur absolument positif, quelque chose comme une « révolution » : « Ce fut l'époque où se fit en moi la révolution la plus profonde que j'aie jamais eu à mener à son terme. Le cosmopolite sans énergie que j'avais été jusqu'alors devint un antisémite fanatique. » On notera d'abord que le terme « cosmopolite », ordinairement opposé aux termes « patriote » ou « nationaliste », est ici placé en opposition avec l'expression « antisémite fanatique », ce qui constitue une manière rhétorique de suggérer une parfaite équivalence entre le nationalisme le plus authentique et l'antisémitisme radical ou intransigeant. Être nationaliste, c'est être antisémite, et réciproquement. Voilà qui présuppose que l'amour de la patrie et l'attachement passionné à la nation ne vont pas sans la désignation d'un ennemi haïssable, selon le principe, parfaitement assumé par Hitler : aimer les siens, c'est haïr les autres. Mais ce principe est lui-même spécifié : parmi toutes les catégories d'« autres » offertes à la haine, il en est une que le bon nationaliste allemand privilégie, « les Juifs ». On notera ensuite qu'un individu est célébré comme « fanatique » s'il manifeste dans ses engagements une louable « énergie », ce dont le « cosmopolite » serait par nature privé. Être fanatique, c'est être énergique. Il convient donc de se montrer fanatique, si l'on veut échapper à l'asthénie affectant tout défenseur du cosmopolitisme. Par cet éloge du « fanatisme », Hitler renverse explicitement le discours des Lumières, dont l'adversaire désigné était un mixte de « superstition » et de « fanatisme ».  

Le récit de cet itinéraire singulier prend dès lors une signification générale : il porte sur l'avènement d'un sauveur, d'un homme providentiel, dont la condition est la sortie de cet état d'abaissement dans lequel se complaît une humanité inférieure, incarnée par le « cosmopolite sans énergie ». C'est pourquoi cette partie autobiographique, au-delà du témoignage d'un militant nationaliste sur sa prise de conscience et ses engagements politiques, constitue l'équivalent d'un roman d'apprentissage, et possède vraisemblablement aux yeux d'Hitler une fonction initiatique : elle semble indiquer au lecteur la voie à suivre, la voie de l'imitation.

Dès 1924, Hitler prétend être à la fois un théoricien ou un idéologue, un « créateur de programme » fixant les « buts » de son mouvement politique, et un homme politique, c'est-à-dire un homme d'action visant à réaliser le plus efficacement possible les objectifs définis par le « théoricien ». La dimension idéologique ou doctrinale de Mein Kampf est analysable en quatre composantes : 1° une conception du monde (Weltanschauung) au sens restreint du terme (la « philosophie » d'Hitler), 2° un programme politique, 3° une stratégie, impliquant un modèle de l'organisation du parti national-socialiste, 4° une vision géopolitique. Le 4 août 1924, Rudolf Hess annonce à une amie : « H espère avoir terminé son livre au cours de la semaine à venir. Nous relisons le texte ensemble. » Terminé en octobre 1924, le manuscrit de Mein Kampf ne paraît pas publiable en l'état. Otto Strasser en témoigne : « Un véritable fouillis de banalités, de réminiscences scolaires, de jugements subjectifs et de haines personnelles. » Hitler avait pensé au titre suivant : « Quatre ans et demi de lutte contre les mensonges, la stupidité et la lâcheté ». Le manuscrit va être retravaillé et mis en forme par son admirateur Ernst « Putzi » Hanfstaengl, diplomé de Harvard, et quelques-uns de ses proches (Rudolf Hess et son épouse Ilse, son éditeur Max Amann et l'imprimeur du NSDAP, Adolf Müller), mais surtout par le poète et critique musical d'origine tchèque, Josef Stolzing-Czerny, ancien correcteur d'épreuves au Völkischer Beobachter, et le père Bernhardt Staempfle, moine hiéronymite devenu journaliste antisémite et membre du NSDAP. Stolzing-Czerny supprime ou modifie des phrases maladroites ou des mots impropres, taille dans les passages de style oratoire trop longs, répétitifs et mal construits. Staemple relit le manuscrit, fait les corrections syntaxiques qui s'imposent, améliore le style, supprime certains passages et élimine les inexactitudes les plus flagrantes. Le premier tome de Mein Kampf, largement autobiographique, est publié le 18 juillet 1925 par la maison d'édition du Parti nazi, Franz Eher Verlag. Entre-temps, Hitler avait bénéficié d'une libération anticipée, le 20 décembre 1924, et le Völkischer Beobachter, l'organe officiel du NSDAP, avait pu reparaître le 25 février 1925. Le 20 décembre 1924, dans le très influent quotidien américain qu'était (déjà) le New York Times, parut un entrefilet intitulé « La prison a calmé Hitler », avec pour sous-titre : « Libéré sous condition, il va probablement retourner en Autriche ». Ce bref article du correspondant à Berlin du New York Times illustre l'optimisme aveugle des contemporains de la montée du national-socialisme :

« Berlin, 20 décembre. Adolf Hitler, qui faisait naguère figure de demi-dieu aux yeux de l'extrême droite, a été libéré aujourd'hui sous condition de la forteresse de Landsberg, en Bavière, où il purgeait une peine de prison. Il a immédiatement gagné Munich en automobile. Il avait l'air beaucoup plus triste et raisonnable qu'au printemps dernier quand, inculpé avec Ludendorff et d'autres extrémistes du complot en vue de renverser le gouvernement, il comparaissait devant un tribunal de Munich. Son comportement pendant son emprisonnement a convaincu les autorités qu'il ne présentait plus aucun danger pour les institutions, pas plus que son organisation, connue sous de nom de Völkischer, c'est-à-dire de nationalistes racistes. On pense qu'il va abandonner toute vie publique et se retirer dans son pays d'origine, l'Autriche. »

Le second tome de l'ouvrage, auquel Hitler travaille en 1925 et en 1926, est dicté à Max Amann, et, avec l'aide des mêmes relecteurs, sort le 11 décembre 1926 - mais la date de publication indiquée est 1927. L'année suivante, Hitler dicte un nouveau livre, supposé constituer une suite aux deux tomes de Mein Kampf, mais qui restera à la fois inachevé et inédit de son vivant : connu sous le titre de « Second Livre », il sera publié en allemand en 1961, et traduit en français deux ans plus tard sous le titre L'Expansion du Troisième Reich. Son principal intérêt, pour l'historien des idées politiques, est qu'il permet de mieux comprendre les liens établis par Hitler, en 1928, entre quelques-uns des thèmes fondamentaux de sa doctrine : le combat pour « l'espace vital » (Lebensraum), la défense de la « pureté raciale », la lutte contre la « juiverie internationale » (définie par son « parasitisme » et sa puissance de « dénationalisation ») et l'antibolchevisme radical (impliquant un relatif effacement de la dimension anti-ploutocratique, réactivée après la crise de 1929, puis durant la période 1941-1945). Dans un passage significatif, dont l'importance a été soulignée par Jäckel et par Longerich, Hitler explique pourquoi « le Juif » est pour lui l'ennemi absolu : « Son but final [Endziel], c'est la dénationalisation [Entnationalisierung], l'abâtardissement des autres peuples par un mélange confus, l'abaissement du niveau racial des peuples les plus élevés, et la domination qu'il entend exercer enfin sur cette bouillie de races [Rassenbrei], par l'extirpation [Ausrottung] des intelligences propres à ces peuples et leur remplacement par des membres de son propre peuple. » Si, pour Hitler, le « péril juif » se confond avec le « péril rouge », c'est parce que, dans le cas où la « juiverie » réaliserait son « but final », les futures élites de substitution seraient recrutées parmi les membres dirigeants du « bolchevisme juif ». L'utopie répulsive par excellence, pour Hitler, est la vision d'une humanité « abâtardie » (dénationalisée, déracialisée) totalement dominée par la « juiverie internationale ».

En 1929, le premier tome de Mein Kampf avait été vendu à environ vingt-trois mille exemplaires, et le second seulement à treize mille. Les deux tomes seront réunis en un volume en 1930 (correspondant à la 5e édition), vendu à quatre-vingt mille en 1932, pour devenir rapidement, à compter de 1933, « le moins lu des best-sellers de la littérature universelle ». Environ douze millions d'exemplaires en langue allemande en ont été publiés jusqu'en 1945. Mein Kampf sera traduit intégralement en français en 1934 (sans l'autorisation du dictateur), puis en anglais en 1939, avec une introduction et des annotations. Il n'a jamais cessé d'être réédité dans un grand nombre de langues (au moins seize). Mein Kampf aura été, comme les Protocoles des Sages de Sion, un best-seller et un long-seller du XXe siècle, bien parti aujourd'hui pour continuer de l'être au XXIe siècle, hors des limites de l'Europe.

 

Idéologie et propagande

 

Dans la préface du premier tome, Hitler, pensant à son propre destin, affirme cependant que « c'est par la parole beaucoup plus que par des livres que l'on gagne les hommes : tous les grands mouvements que l'histoire a enregistrés ont dû beaucoup plus aux orateurs qu'aux écrivains ». Il y revient dans le second tome : « Aucune des grandes révolutions historiques n'a été causée par la parole écrite qui ne fit que les accompagner. » Ce primat de l'oral n'implique pas de négliger l'aspect doctrinal du combat politique, auquel seul un livre peut donner sa forme définitive, à laquelle enfin il pourra être fait référence : « Une doctrine ne peut sauvegarder son unité et son uniformité que si elle a été fixée par écrit, une fois pour toutes. » Mais il ne faut pas surestimer la place et le rôle des écrits, « avec leur effet limité » : ils « ne serviront, en général, qu'à conserver, raffermir et approfondir les conceptions et les opinions déjà existantes. » Après l'échec du coup de force, le tribun de brasserie devenu Führer s'efforce de théoriser les conditions de la prise du pouvoir, par « l'application perpétuellement uniforme de la violence ». Mais l'usage de la violence, pour être efficace, doit selon lui reposer sur « des conceptions philosophiques empreintes de fanatisme », le mot « fanatisme » ayant dans Mein Kampf, comme dans nombre de discours des années 1920, une connotation positive. Tels sont les fondements de la propagande, machine à inculquer aux masses des « convictions inébranlables ». Car, affirme Hitler, la propagande « doit toujours s'adresser uniquement à la masse ! ».

Le « révolutionnaire » Hitler, dont l'objectif principal, avant la prise du pouvoir et pour la rendre possible, est la « nationalisation des masses », ne cache pas qu'il attache à la propagande la plus grande importance : « C'est une arme terrible que la propagande dans la main de celui qui sait s'en servir. (...) Dans tous les temps, la force qui a mis en mouvement sur cette terre les révolutions les plus violentes a résidé bien moins dans la proclamation d'une idée scientifique qui s'emparait des foules que dans un fanatisme animateur et dans une véritable hystérie qui les emballait follement. » Otto Strasser notera plus tard : « Un seul chapitre, si j'en crois le père Staemple, qui revit l'½uvre entière à deux reprises, un seul chapitre se trouvait foncièrement original, celui où il est question de propagande. » Hitler consacre en réalité plusieurs chapitres ou parties de chapitres à la question de la propagande, où il combine les leçons tirées de son expérience personnelle et ses lectures des spécialistes de la psychologie des foules, en particulier Gustave Le Bon et William McDougall. De bons témoins comme Max Horkheimer et Theodor W. Adorno noteront que Mein Kampf et les discours d'Hitler visant à influencer les masses « se lisaient comme une copie à bon marché de Le Bon ».

Pour séduire les masses, Hitler, lecteur de la Psychologie des foules de Gustave Le Bon (paru en 1895, l'ouvrage avait été traduit en allemand en 1911 à Leipzig, chez Alfred Kröner, puis réédité en 1912 et en 1919), mise sur l'affirmation et la « répétition constante » de ses convictions idéologiques absolues, excluant les nuances, excluant tout souci d'objectivité, privilégiant les idées simples et jouant sur des oppositions manichéennes (Aryens/Juifs) qui stimulent la haine et le ressentiment. Ce qu'il faut éviter à tout prix, c'est la demi-mesure, qui entraîne le doute paralysant :

« La grande masse d'un peuple ne se compose ni de professeurs, ni de diplomates. Elle est peu accessible aux idées abstraites. Par contre, on l'empoignera plus facilement dans le domaine des sentiments et c'est là que se trouvent les ressorts secrets de ses réactions, soit positives, soit négatives. Elle ne réagit d'ailleurs bien qu'en faveur d'une manifestation de force orientée nettement dans une direction ou dans la direction opposée, mais jamais au profit d'une demi-mesure hésitante entre les deux.  »

La « première de toutes les conditions nécessaires pour n'importe quelle propagande en général » est « la position systématiquement unilatérale à l'égard de toute question traitée ». C'est là définir le « but de la propagande » : il ne consiste pas, par exemple, à « doser le bon droit des divers partis », il est de « souligner exclusivement celui du parti que l'on représente ». Il s'agit de provoquer un engagement total, d'alimenter le fanatisme : « Quiconque veut gagner la masse doit connaître la clef qui ouvre la porte de son c½ur. Ici l'objectivité est de la faiblesse, la volonté est de la force. » Dans plusieurs développements de Mein Kampf, Hitler s'applique à théoriser l'art de la propagande, qu'il fait reposer sur la règle de l'adaptation à la capacité de réception des esprits les plus « bornés » composant l'auditoire, et dont le but est la seule efficacité symbolique, qui mobilise la masse :

« Toute propagande doit être populaire et placer son niveau spirituel dans la limite des facultés d'assimilation du plus borné parmi ceux auxquels elle doit s'adresser. Dans ces conditions, son niveau spirituel doit être situé d'autant plus bas que la masse des hommes à atteindre est plus nombreuse. (...) La faculté d'assimilation de la grande masse n'est que très restreinte, son entendement petit, par contre, son manque de mémoire est grand. Donc toute propagande efficace doit se limiter à des points fort peu nombreux et les faire valoir à coups de formules stéréotypées aussi longtemps qu'il le faudra, pour que le dernier des auditeurs soit à même de saisir l'idée. (...) La propagande n'est point faite pour procurer constamment d'intéressants passe-temps à de petits messieurs blasés, mais pour convaincre, et c'est la masse qu'il s'agit de convaincre. (...) La propagande doit être maintenue tant pour le fond que pour la forme, au niveau de la masse, et l'on ne doit mesurer sa valeur qu'aux résultats obtenus. »

Lui-même démagogue particulièrement doué, Hitler sait que pour mobiliser les masses il faut leur offrir une vision grandiose ou « héroïque » de l'avenir, et que la force mise en spectacle est dotée d'une puissance d'entraînement irrésistible. Il est déjà convaincu qu'il possède les qualités d'un chef charismatique, investi d'une « mission » par la « Providence » : la régénération raciale du peuple allemand, pour faire de la grande Allemagne une puissance mondiale. C'est en pensant à son propre cas qu'Hitler affirme que, « dans le cours de l'existence humaine, il peut arriver une fois que l'homme politique s'unisse au créateur de programme ». Dans sa personne, d'une façon exceptionnelle, il y aurait fusion du type du Führer, du guide ou du conducteur de peuples et du type de l'idéologue, du « théoricien », du créateur de doctrine politique ou du « fabricant de programme ». Il revient sur la question avec insistance : « Les grands théoriciens sont très rarement aussi de grands organisateurs. (...) Mais c'est encore plus rare qu'un grand théoricien soit un grand Führer.  » Ainsi que l'ont noté nombre de témoins directs, Hitler se prenait pour un génie. Mais il se donnait publiquement pour l'homme providentiel.

Le 6 juillet 1933, le Chancelier Hitler prononce un discours à Berlin devant les gouverneurs (Statthalter) du Reich, où il remercie « la Providence » de l'avoir accompagné dans ses succès : « Depuis huit mois, nous menons une lutte héroïque contre la menace communiste qui pesait sur notre peuple, désorganisait notre culture, décomposait notre art et empoisonnait notre morale publique. Nous avons mis fin à la négation de Dieu, aux outrages à la religion. Nous remercions humblement la Providence de n'avoir pas laissé sans succès notre lutte contre la détresse du chômage et nos efforts pour sauver le paysan allemand.  » Dans le discours qu'il prononce en septembre 1935 au 7e congrès du NSDAP, Hitler réaffirme sa thèse de la consubstantialité du Führer et du Parti, avant de se présenter une nouvelle fois comme l'élu de « la Providence » pour que vive éternellement l'Allemagne : « Nous avons été marqués par le destin, pour guider le peuple et l'armée, pour écrire l'histoire dans le sens le plus élevé du mot. La Providence nous a donné ce qu'elle a refusé à des millions d'hommes. En voyant notre ½uvre, les siècles les plus éloignés évoqueront encore notre mémoire. » Près de quatre ans plus tard, Hitler commence et termine son discours au Reichstag du 28 avril 1939, où il répond longuement à un télégramme du Président Roosevelt, par une invocation de « la Providence » de facture messianique : « Mes sentiments les plus profonds, je ne puis mieux les exprimer que sous la forme d'une humble action de grâces envers la Providence qui m'a appelé et aidé, moi, jadis soldat inconnu de la guerre, à devenir le Führer de mon peuple si vivement aimé. (...) Mon monde à moi, Monsieur Roosevelt, est celui dans lequel la Providence m'a placé et pour lequel j'ai donc mission de travailler.  »

Dans ses discours d'après la prise du pouvoir, Hitler soulignera l'importance à ses yeux de la dimension « idéologique » ou « philosophique » de son « combat », ordonné à l'accomplissement d'une « révolution » totale. En 1933, dans le discours qu'il prononce au congrès du NSDAP à Nuremberg, il commence par une ferme mise au point centrée sur la véritable « mission » du « mouvement national-socialiste », par-delà la prise et l'exercice du pouvoir :

« Le 30 janvier 1933, le gouvernement politique du Reich fut confié au Parti national-socialiste. Fin mars, la révolution nationale-socialiste était extérieurement finie. Finie en ce qui concernait notre accession au pouvoir. Mais seul celui qui ne comprenait pas le caractère de cet immense combat pouvait croire close la lutte pour nos idées. Ce serait le cas si le mouvement national-socialiste n'avait pas d'autres desseins que ceux des anciens partis habituels. En effet, avec la prise du pouvoir, ceux-ci semblent avoir atteint le sommet de leurs désirs et, en même temps, l'idéal de leur existence. Mais pour des conceptions philosophiques, l'arrivée au pouvoir politique n'est que la condition préliminaire de l'accomplissement de leur véritable mission. Déjà le mot "e;Weltanschauung"e; (conception philosophique) exprime la volonté de baser toutes les actions sur une conception préconçue et ainsi ouvertement sur une tendance. Celle-ci peut être juste ou fausse : elle est en tout cas le point de départ d'une prise de position vis-à-vis de tous les phénomènes et événements de la vie et au surplus un ordre qui lie et engage pour toute action.  »

Après être devenu en Allemagne, entre 1925 et 1933, un best-seller inattendu, Mein Kampf fut après la prise du pouvoir diffusé d'une façon systématique et massive - il fut même systématiquement offert par les maires à tous les couples de jeunes mariés. Or, dans son essai polémique paru en 1938, La Révolution du nihilisme, Hermann Rauschning affirmait péremptoirement que personne n'avait pris Mein Kampf au sérieux comme ouvrage doctrinal, et, plus fondamentalement, que la « doctrine » ou « l'idéologie », dans le national-socialisme, n'avait aucune importance en tant que telle. Elle n'y intervenait qu'à titre d'instrument : « Le national-socialisme, c'est du mouvement pur et simple, du dynamisme à valeur absolue, de la révolution à dénominateur toujours variable. Une idéologie, une doctrine, voilà ce qu'il n'est certainement pas. Mais il a une idéologie. Le national-socialisme ne fait pas de politique en vertu d'une doctrine, mais il se sert d'une idéologie pour faire de la politique. Il utilise cette idéologie de même que toutes les valeurs, tous les éléments de l'existence humaine, pour en nourrir son dynamisme. » Pour illustrer sa thèse selon laquelle « la marche au pas » était le principal « procédé de la domination nationale-socialiste », Rauschning citait Rosenberg : « La nation allemande est précisément en train de trouver enfin son style de vie (...). C'est le style d'une colonne en marche, et peu importe vers quelle destination et pour quelle fin cette colonne est en marche. » Et Rauschning de conclure avec ironie : « Ainsi marche la nation, sans but, elle marche pour marcher. Ainsi se manifeste le manque de doctrine de cette révolution pour la révolution, de ce mouvement pour le mouvement. » De la propagande et une entreprise de fabrication de mythes efficaces, voilà donc à quoi se réduit pour Rauschning le mouvement nazi  : « Le manque de principes de cette révolution, voilà son grand paradoxe, voilà le secret de son efficacité. C'est là sa force, c'est là que réside son énergie révolutionnaire. » Le Programme en 25 points du Parti nazi n'est qu'une façade : « Les buts avoués, les points du programme sont des cartes que tantôt l'on abat, tantôt l'on garde en main. » Et cette façade n'est qu'un camouflage : « Il me paraît inutile d'insister sur le caractère artificiel de l'idéologie nationale-socialiste, sur sa fonction de camouflage et de moyen de propagande, et de souligner le cynisme de l'élite inaccessible à sa propre doctrine. » Selon Rauschning, l'élite nazie se sert des croyances idéologiques, sans y adhérer, comme d'un « instrument de domination, un instrument dont ne peut se passer la technique spirituelle de l'hypnose et de la suggestion ». Stimuler, mobiliser, canaliser, détourner, aveugler : telles sont les fonctions des motifs doctrinaux dans la perspective nazie, telle qu'elle est analysée par Rauschning, présupposant que, dans le monde de l'élite nazie, le recours aux techniques et aux stratégies manipulatrices ordonnées à la conquête ou à la conservation du pouvoir exclut les convictions idéologiques. Un tel postulat est pour le moins fort discutable : Hitler et Goebbels croyaient sans réserve au « complot juif international » (bolchevique et financier), Rosenberg et Himmler au « mythe du sang », Streicher au « crime rituel juif », etc., même s'ils instrumentalisaient ces thèmes idéologiques dans leur discours de propagande. Il n'y a là cependant pour Rauschning que démagogie, inscrite dans une vision grossièrement machiavélique du discours de propagande et de la mise en scène, dont les hautes élites manipulatrices ne sont nullement dupes :

« Au cours de ce qu'on a appelé la période de combat, chaque fois qu'il s'est agi de détourner la masse de certains problèmes ou de réveiller la combativité des adhérents, on a fait tourner le disque "e;Juifs et francs-maçons"e;. Tout cela est d'une psychologie aussi primitive et aussi indigente qu'efficace dans son application. On se tromperait en croyant qu'un homme aussi subtil que le ministre de la Propagande [Goebbels] ne sait pas que la campagne de violences contre les Juifs - y compris les Protocoles des Sages de Sion - est une élucubration idiote (...). Il serait naïf de supposer qu'un membre de l'élite croit vraiment et sincèrement aux axiomes de l'idéologie. Ces thèses ont été réunies consciemment, pour leur efficacité démagogique, en vue de fins politiques. »

Ainsi, selon Rauschning, « l'"e;habit d'Arlequin"e; qu'est la "e;doctrine"e; nationale-socialiste dissimule à merveille la pauvreté, la nudité intellectuelle du national-socialisme ». Dans un régime fondamentalement révolutionnaire, qui se réduisait à un « mouvement » destructeur, la doctrine ne pouvait être que propagande, instrument comme un autre au service de forces démoniaques, ou encore simple moyen dans la réalisation d'un « projet de mobilisation totale au service du Néant ». Le « nihilisme total » était la « doctrine secrète du national-socialisme ». À suivre donc Rauschning, pour Hitler et les hauts dirigeants nazis, l'antisémitisme, par exemple, n'était qu'un mode plus ou moins efficace de manipulation des masses. Il ne pouvait être l'objet d'une conviction forte. Le discours antijuif n'aurait été qu'un décor attractif, un habillage trompeur, une mise en scène séduisante, et l'idéologie antijuive un attrape-nigauds, une sorte d'autopublicité mensongère d'acteurs politiques mus par la seule passion de la domination. La déréalisation de l'idéologie implique ainsi un effacement de l'antisémitisme dans le tableau des facteurs explicatifs de l'évolution du Troisième Reich. La vérité du nazisme serait à trouver dans la puissance de destruction et d'autodestruction d'un système sans direction véritable et en perpétuelle désintégration, qui sera décrit par la suite, dans la perspective fonctionnaliste, comme une polyarchie conflictuelle.

Dans son livre paru en 1942, Behemoth, Franz Neumann, membre de l'École de Francfort, avait donné une version marxisante de cette approche niant jusqu'à l'absurdité la dimension idéologique du régime nazi, lequel n'était à ses yeux qu'un « non-État, un chaos, le règne du désordre et de l'anarchie ». Partant du principe qu'« une théorie politique ne peut pas être non rationnelle », il en déduisait naïvement que le nazisme, du fait de son irrationalisme, ne pouvait avoir une véritable théorie politique. Il s'efforçait en particulier de minimiser l'importance de l'antisémitisme en tant que facteur indépendant, sans reculer devant l'affirmation, involontairement provocatrice, que le peuple allemand était « le moins antisémite de tous les peuples ». Affirmation insoutenable qui sera inversée en 1996 par Daniel J. Goldhagen dans son best-seller titré Les Bourreaux volontaires de Hitler. Les Allemands ordinaires et l'Holocauste, où le jeune historien américain attribue au peuple allemand tout entier un « antisémitisme éliminationniste » qui, depuis le XIXe siècle, aurait imprégné en profondeur la culture germanique. En supposant l'existence d'un projet criminel antijuif dans l'Allemagne d'avant Hitler, Goldhagen postule la primauté de l'idéologie antisémite tout en minorant le rôle joué par Hitler et les propagandistes nazis dans sa diffusion et son inculcation. Il s'ensuit que le Führer, loin d'avoir été l'inspirateur ou l'instigateur de la « Solution finale », n'aurait été qu'un accoucheur ou un catalyseur de l'« antisémitisme éliminationniste » qui lui préexistait dans la culture germanique. C'est là une manière radicale, et à vrai dire indéfendable, de dissoudre les responsabilités d'Hitler dans celles du peuple allemand, traité comme un peuple de « démons ». Transfert de démonisation, du personnage singulier Hitler à la personne collective qu'est l'Allemagne.

 

Mein Kampf avant et après la Seconde Guerre mondiale : qu'en faire ?


Quelles qu'aient été les intentions d'Hitler lorsqu'il a pris la décision de dicter Mein Kampf en 1924 et 1925, son unique livre publié demeure une énigme au regard de l'histoire. Comme l'a noté Georges Goriely, « jamais on n'a vu un candidat dictateur livrer aussi crûment ses ambitions les plus sanguinaires et les plus paranoïaques ». Ce qui caractérisait Hitler, c'était « un mélange de franchise et de dissimulation ». C'est un fait que les lecteurs du premier volume, en 1925, pouvaient savoir qui était et ce que voulait Hitler, en dépit des reconstructions mensongères de son récit autobiographique. Car il ne fallait prendre à la lettre une affirmation telle que celle-ci, portant sur ses « années d'études et de souffrances » à Vienne : « C'est à cette époque que prirent forme en moi les vues et les théories générales qui devinrent la base inébranlable de mon action d'alors. Depuis j'ai eu peu de choses à y ajouter, rien à y changer. Au contraire. » On sait par exemple que le principe structurant de sa « vision du monde », l'antisémitisme apocalyptique, n'est pas apparu chez lui avant le début des années 1920, même si l'on peut supposer que le tournant antijuif s'opère chez le soldat Hitler vers le milieu de la Première Guerre mondiale, comme semble l'attester la lettre datée du 5 février 1915 où il écrit à son ami munichois Ernst Hepp : « Chacun de nous, ici, n'a qu'un seul souhait en tête : régler bientôt son compte à la bande [les étrangers-ennemis],une fois pour toutes. Pour que, même si certains d'entre nous  doivent y rester, les autres retrouvent la mère-patrie débarrassée des métèques [Fremdländerei]  qui l'encombrent. » Mais l'autoportrait qu'il brosse dans le premier tome de Mein Kampf est dans l'ensemble plutôt ressemblant, et surtout fort révélateur de son état d'esprit en 1924.  Or, rares furent ceux, parmi ses adversaires déclarés, qui en tinrent compte. Le philosophe catholique Lucien Laberthonnière (1860-1932), dans une étude sur Mein Kampf publiée seulement en 1945, écrivait significativement : « Si peu d'intérêt que présente par lui-même Mein Kampf, les suites de cet ouvrage sont telles qu'il est profondément regrettable qu'il n'ait pas été lu d'un bout à l'autre par un plus grand nombre de Français. » En outre, on ne peut qu'être surpris devant « ce besoin de se dévoiler, chez un homme poussant au plus haut degré l'art de la dissimulation et du mensonge ». En avouant « ses haines et ses fureurs, ses fantasmes liés à un érotisme infantile mal surmonté, ainsi que ses appétits de conquête et de destruction », le candidat dictateur se montrait plus vaniteusement provocateur que fin stratège politique.

Face à Mein Kampf, en tant que texte fondateur du mouvement national-socialiste et document révélateur sur la personnalité du Führer, les milieux antiracistes ont varié considérablement dans leurs positions, passant de la conviction que la lecture du livre devait suffire à « ouvrir les yeux » des citoyens à la crainte qu'elle ne les séduise et les entraîne irrémédiablement vers la mythologie nazie. Dans les années 1930, les antinazis et plus généralement les antiracistes appelaient en effet leurs contemporains à lire Mein Kampf - du moins dans sa version non expurgée - afin d'y découvrir les projets inquiétants du Führer, et ainsi s'opposer au nazisme en connaissance de cause. La traduction intégrale (et non autorisée) de l'ouvrage publiée en 1934 par Fernand Sorlot, maurrassien germanophobe, porte en épigraphe cette phrase de Lyautey : « Tout Français doit lire ce livre. » Quelques années plus tard, en 1939, dans ses Éclaircissements sur Mein Kampf, Jacques Benoist-Méchin, compagnon de route du nazisme, note que « Mein Kampf est devenu la Bible du IIIeReich, le Coran d'un empire de 80 millions d'habitants », et célèbre ce livre qui « a transformé la frontière de certains États et en a effacé d'autres de la carte d'Europe », ce livre « étrange et explosif, brûlant et frénétique » qui « a changé la face du monde ». Il ajoute que ce livre « peut provoquer encore des bouleversements inouïs » et que son « action profonde est loin d'être épuisée ». Dans sa conclusion, Benoist-Méchin croit devoir justifier la publication de ses Éclaircissements : « On ne peut (...) rien comprendre aux actes et aux intentions de Hitler sans une connaissance approfondie de Mein Kampf. Plus que jamais, aujourd'hui, cette connaissance est pour nous une question de vie ou de mort. »

En soutenant la thèse que le mouvement nazi, dénué de toute préoccupation idéologique, ne pouvait engendrer qu'une « révolution du nihilisme », l'intellectuel antinazi Rauschning a frayé la voie à un certain nombre d'historiens qui verront dans la guerre totale et autodestructrice la vérité de la révolution nazie. Dès lors, la question du choix des ennemis devient une question secondaire. Que, par exemple, la « juiverie internationale » ait été érigée par Hitler en ennemi absolu - du début des années 1920 au printemps 1945 -, voilà qui ne saurait constituer qu'un fait contingent dans le processus érostratique seul pris en compte. Il en va ainsi chez Jeremy Noakes, concluant que « le seul élément proprement "e;révolutionnaire"e; du nazisme résida dans la destruction et l'autodestruction, corollaires inévitables de l'irrationnalité de ses buts ». Noakes exposait ainsi en 1983 sa vision du nazisme : « On peut donc soutenir que la révolution nazie fut la guerre - non seulement parce que la guerre imprima aux changements politiques, économiques et sociaux un rythme beaucoup plus rapide qu'en temps de paix, mais aussi, à un niveau plus profond, parce que le nazisme baignait dans la guerre comme dans son élément. En ce sens, le nazisme fut vraiment "e;une révolution de la destruction"e; - de lui-même et des autres à une échelle sans précédent. »

Cette thèse, non fondée sur une enquête empirique, mais dotée d'un parfum de vraisemblance, est devenue rumeur, une rumeur « autorisée » indéfiniment répétée dans tous les milieux antinazis, et reprise en écho par de nombreux historiens et sociologues. On suppose en effet ordinairement, dans la perspective moralisante consistant à réduire le destin historique d'Hitler à la pratique du meurtre de masse, qu'un tel tueur ne pense pas, que ce monstre inhumain est totalement étranger au monde humain des idées, et, partant, que les idées ne peuvent avoir la moindre importance pour lui. Identifié comme démagogue cynique, psychopathe dangereux ou criminel avéré, Hitler a été pour ainsi dire expulsé de l'histoire. La vérité historique est en effet difficile à affronter, et plus difficile encore à digérer : en Hitler coexistaient le stratège politique habile, le démagogue talentueux, le lecteur passionné, le dirigeant politique soucieux d'idéologie, voire obsédé par un petit nombre de thèmes idéologiques (« doctrinaux », « philosophiques »), le paranoïaque mû par la haine, le criminel inaccessible à la culpabilité.

En outre, la lecture non critique des deux livres de Rauschning, La Révolution du nihilisme et Hitler m'a dit (recueil, paru en 1939, de conversations de l'auteur avec Hitler, reproduites de mémoire et avec des intentions militantes « antifascistes »), a conduit la première génération des historiens de la « Solution finale » à négliger l'étude de Mein Kampf. C'est ainsi que dans son ouvrage pionnier paru en 1951, Bréviaire de la haine, sous-titré « Le IIIeReich et les Juifs », Léon Poliakov, célébrant « l'exceptionnelle justesse » des « révélations et des analyses » de Rauschning dans le chapitre premier consacré aux « prodromes » (du génocide des Juifs), se contente de mentionner Mein Kampf pour noter simplement que, dans ce livre où « le mot "e;Juifs"e; revient presque à chaque page », on n'apprend rien sur « le sort qui leur sera dévolu dans l'État national-socialiste ». S'il cite Hitler, à plusieurs reprises, c'est seulement d'après Hitler m'a dit, donc d'après des conversations reconstruites plusieurs années après avoir eu lieu, et ce, dans la perspective de nourrir la propagande antinazie. Le corpus des textes hitlériens publiés du vivant du Führer représentait pourtant une masse considérable de matériaux documentaires. Il faudra attendre le milieu des années 1960 pour que certains historiens allemands, Werner Maser ou Eberhard Jäckel, étudient de près les textes et les discours du Führer.

Après 1945, les antiracistes, en Allemagne et en France particulièrement, se sont efforcés d'interdire la publication de Mein Kampf ou de dissuader leurs contemporains de le lire, comme s'ils craignaient une puissance de contamination ou de suggestion qui serait inhérente à l'ouvrage. Et ils ont été confortés dans leurs craintes par l'usage du livre comme drapeau ou emblème de la cause antijuive par des milieux très divers, allant des néo-nazis américains aux islamistes de tous les pays, du monde arabe et de l'Amérique latine à l'Inde, en passant par certaines mouvances de l'extrême droite russe ou du nationalisme en Turquie, où Mein Kampf est devenu un best-seller dans les années 2000. À la fin des années 1990, on pouvait par exemple observer la libre circulation, avec l'approbation expresse de l'Autorité palestinienne, d'une traduction arabe de Mein Kampf, diffusée par un distributeur de Ramallah. Cette traduction, réimpression d'une édition libanaise (1963, puis 1995), atteignit le sixième rang des meilleures ventes du Territoire palestinien en 1999. Dans son introduction, le traducteur de l'édition arabe, Louis al-Haj (nom adopté par l'ancien SS Louis Heiden, réfugié au Caire du temps de Nasser et converti à l'islam), n'hésite pas à faire l'éloge du « grand homme » : « Adolf Hitler n'appartient pas qu'au peuple allemand, c'est l'un des rares grands hommes qui ont pour ainsi dire arrêté le cours de l'histoire, infléchi sa course et changé la face du monde. Il appartient désormais à l'histoire. (...) Le national-socialisme n'est pas mort avec la disparition de son héraut. Au contraire sa semence se multiplie sous les étoiles. »

Après avoir servi du vivant d'Hitler en tant que document démystificateur dans les mains des milieux antiracistes et antifascistes, donc comme instrument de propagande antinazi, Mein Kampf est devenu en Europe, après 1945, un livre dénoncé comme scandaleux et dangereux, voué à être interdit par la censure. Un livre qui fait peur, parce qu'il est supposé capable d'empoisonner les esprits. En France, la réédition chez Sorlot, en 1979, de la traduction intégrale de Mein Kampf, parue initialement en 1934, comporte une mise en garde de facture antiraciste, qui rappelle les crimes contre l'humanité commis par les nazis et expose les dispositions légales en matière de lutte contre le racisme. C'est à la suite d'un arrêt de la Cour d'appel de Paris du 11 juillet 1979 que le livre a été autorisé à la vente en raison de son « intérêt historique et documentaire ». Mais la peur d'affronter dans le texte ce qui reste de « la Bête immonde » a perduré. Comme si Mein Kampf était perçu comme un texte contagieux, un texte-virus. Ce qui se comprend aisément dès lors qu'il est pris comme symbole du « mythe Hitler », étudié récemment dans tous ses aspects par Ian Kershaw. En 1947, Hugh Trevor-Roper avait bien identifié cette puissance de fascination exercée par le Führer, et qui lui a survécu : « La foi profonde qu'il avait en sa mission messianique fut peut-être l'élément le plus important de l'extraordinaire puissance de sa personnalité, qui se prolongea bien après que les raisons extérieures de la survivance eurent disparu, et l'acceptation de ce mythe, même par l'intelligent Speer, constitue la meilleure preuve de cette puissance. » Le lien substantiel établi entre la personnalité dangereusement fascinante du Führer et son livre unique explique en grande partie les inquiétudes et les réticences provoquées par la circulation de ce dernier. Préfaçant en 1952 la traduction française des Libres propos sur la guerre et la paix, « propos de table » d'Hitler recueillis sur l'ordre de Martin Bormann (5 juillet 1941-12 mars 1942), le germaniste antinazi Robert d'Harcourt rappelait la manière paranoïaque et démonisante par laquelle le Führer stigmatisait les « puissances démoniaques » (monische Mächte) dont son peuple avait été selon lui la victime. Tout se passe comme si les ennemis d'Hitler avaient retourné contre lui cette accusation, faisant du Führer, même après sa mort, une « puissance démoniaque ».Cette peur magique d'une contamination par la démonie hitlérienne a exercé ses effets jusque dans le champ des recherches universitaires, où les spécialistes du nazisme, à quelques exceptions près (Edmond Vermeil naguère, et, plus récemment, Édouard Husson), se sont dispensés d'étudier l'ouvrage, voire simplement de le lire intégralement. Comme si les morceaux choisis pouvaient permettre, tout à la fois, de conjurer le danger d'une séduction textuelle et de comprendre suffisamment la doctrine du Führer. Double illusion.

En Allemagne, où la réédition du livre est interdite depuis 1945, ceux qui contestent cette interdiction, dans la perspective d'une critique démystificatrice du nazisme, avancent l'argument de son caractère contre-productif. En 1982, l'historien et politologue Arno Plack avait soulevé la question, en déplorant le fait que la maturité politique du peuple allemand soit sous-estimée par les autorités au point de les conduire à juger dangereuse la lecture de Mein Kampf, près de quarante ans après le disparition du Troisième Reich. Plus récemment, un certain nombre d'historiens se sont prononcés en faveur d'une réédition de l'ouvrage comportant des notes et des commentaires, voire d'une véritable édition critique. Ils ont été appuyés par le Conseil central des Juifs d'Allemagne dont le secrétaire général, Stefan Kramer, a déclaré le 25 avril 2008 à la radio Deutschlandfunk : « Sur le principe, je suis en faveur d'une publication du livre, assorti de commentaires, et sur le fait de le rendre disponible sur Internet. »

Les droits d'auteur de Mein Kampf, actuellement détenus par le Land de Bavière qui a longtemps refusé la réédition du livre, tomberont dans le domaine public le 31 décembre 2015, ce qui permettra aux milieux néo-nazis de rééditer et de diffuser massivement l'ouvrage. Mais ce dernier est déjà proposé sur de nombreux sites Internet spécialisés dans la vente de livres (en 1999, Mein Kampf était la troisième meilleure vente d'Amazon en langues anglaise et allemande), et le texte intégral du livre interdit dans certains pays est depuis plusieurs années accessible en ligne sur des sites extrémistes. C'est dans ce contexte que les autorités politiques de Bavière ainsi que les dirigeants du Conseil central des Juifs d'Allemagne se sont ralliés au principe d'une réédition critique de l'ouvrage, à des fins historiographiques et éducatives. Une réédition pour ainsi dire préventive, constituant un moindre mal pour ceux qui craignent que la puissance de séduction du livre-manifeste continue de s'exercer sur les esprits non préparés. Dans un discours prononcé le 26 juin 2009, Wolfgang Heubisch, ministre des Sciences, de la Recherche et des Arts de Bavière, favorable à une réédition de Mein Kampf assortie de commentaires critiques d'historiens, a privilégié cet argument : « S'il faut que l'ouvrage d'Hitler soit édité, le danger existe que des charlatans et des néo-nazis se saisissent de ce livre détestable lorsque la Bavière n'aura plus les droits. Je suis donc de l'avis qu'une édition critique et bien documentée soit préparée. » Dans le même sens, partisan d'une « édition critique, scientifique, érudite » de l'ouvrage, Stefan Kramer a déclaré à la télévision ZDF le 12 août 2009 qu'il considérait comme « sensé et important de publier une édition de Mein Kampf d'Hitler avec des commentaires de chercheurs », afin de pouvoir disposer d'une « édition commentée qui pourra être utilisée, par exemple, comme texte à expliquer aux élèves et aux jeunes gens pendant les cours d'Histoire. » Et de réaffirmer son souci d'une action éditoriale préventive : « Nous avons besoin de préparer dès aujourd'hui une édition universitaire assortie de critiques historiques pour

éviter que les néo-nazis n'en tirent profit. »

En France, Richard Prasquier, président du Conseil représentatif des Institutions juives de France (Crif), plutôt défavorable à une édition critique du texte intégral, mais reprenant à son compte l'hypothèse du moindre mal, est intervenu dans ce débat le 11 août 2009 en présentant une position nuancée, fondée sur une distinction entre trois aspects du problème. Selon lui, Mein Kampf « représente trois choses » :

« - Un objet historique. Les historiens le connaissent, peuvent y accéder en bibliothèque ou par les archives (...) ; on n'a [donc] pas besoin de le republier. Quant au grand public, aux élèves, ils n'ont pas besoin de lire ce livre in extenso pour accéder à l'Histoire de la Seconde Guerre mondiale (...).

- Un pamphlet antisémite. À ce titre, bien qu'il soit daté (...),il peut encore distiller son poison. Il fait partie des textes antisémites contre lesquels il faut lutter. On sait qu'il est beaucoup diffusé et vendu dans le monde. Si toutes les éditions étaient des éditions critiques, ce serait un moindre mal. Par exemple, les Protocoles des Sages de Sion sont reparus en larges extraits dans une édition commentée par Taguieff et d'autres chercheurs, ce qui atténue peut-être la nocivité de ce texte.

- Surtout, c'est un symbole. Le symbole nazi par excellence, le symbole de l'horreur. Voir ce livre dans une librairie serait une agression visuelle. Ce serait certainement insupportable pour un  survivant, à qui cela ferait le même effet que de voir une croix gammée dans une librairie. Savoir que ce livre est disponible sur Internet, c'est une chose, le voir exposé au grand jour, cela revient à dire qu'on peut tout lire, que ce livre n'est pas plus choquant qu'un autre, et cela, c'est insupportable.  »

Pour ma part, tout en reconnaissant la réalité potentielle des effets indésirables identifiés par Richard Prasquier, je suis porté à considérer qu'une édition critique réalisée par une équipe pluridisciplinaire de spécialistes constitue, du moins dans les sociétés libérales/pluralistes garantissant la liberté d'expression et de discussion, le seul moyen d'éviter d'abandonner ce texte dangereux aux propagandistes extrémistes et aux éditeurs sans scrupule. Et la seule façon de priver Hitler d'une victoire posthume. (Lire la suite)

Pierre-André Taguieff

 

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8 septembre 2010 3 08 /09 /septembre /2010 20:41
La Question Mein Kampf, part. II
À partir de Mein Kampf : la conception hitlérienne du monde

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Dans Mein Kampf, où il ne craint pas d'exhiber ses hantises et ses phobies, Hitler expose un véritable programme de domination du monde, qu'il explicite et justifie jusque dans ses aspects les plus machiavéliques et conspirationnistes. Il prétend se situer, à l'instar des théoriciens pangermanistes, au niveau de la Weltpolitik. Son « combat » est avant tout un combat contre les Juifs, contre ceux qu'il perçoit comme une puissance occulte mondiale, la « juiverie internationale » (internationale Judentum). Son antisémitisme s'est radicalisé au cours de la rédaction de son livre, prenant une dimension apocalyptique. Le 29 juillet 1924, devant l'un de ses visiteurs à la prison de Landsberg, Hitler reconnaît à la fois la centralité et la radicalisation de son combat contre les Juifs : « J'ai changé ma façon de voir sur la manière de lutter contre la juiverie [Judentum]. J'ai reconnu que jusqu'ici j'avais été beaucoup trop doux ! En écrivant mon livre, j'en suis arrivé à reconnaître qu'à l'avenir il faudra employer les méthodes de lutte les plus dures pour nous imposer avec succès. Je suis convaincu que c'est une question de vie ou de mort non seulement pour notre peuple mais pour tous les peuples. Car Juda est la peste universelle [Weltpest]. » Mais ce programme d'action repose sur un socle idéologique, où l'on rencontre une certaine interprétation de l'histoire du monde et une vision géopolitique des forces en présence. La conception du monde qu'il expose dans Mein Kampf d'une façon systématique, et quasiment définitive, est organisée autour de quatre grands axes, qui montrent qu'à défaut d'idées personnelles, l'autodidacte éclectique et fanatique a une manière personnelle de combiner divers héritages intellectuels.

 

1. Le principe de la race : fondements d'une conception raciste de l'Histoire

 

En premier lieu, on rencontre dans Mein Kampf une vision naturaliste de l'histoire fondée sur le postulat du déterminisme racial, la position d'une hiérarchie des races où l'Aryen (la « race aryenne ») occupe le sommet (« L'Aryen est le Prométhée de l'humanité »), la conviction que la lutte des races constitue le moteur de l'Histoire et le seul facteur du « progrès » dans la mesure où la victoire revient aux races supérieures (« Le combat est toujours le moyen de développer la santé et la force de résistance de l'espèce et, par suite, la condition préalable de ses progrès »), l'expression d'une nostalgie de l'âge d'or de l'Europe incarné par la Grèce antique et l'Empire romain, et une intellectualisation de la hantise du métissage, le mélange des races étant accusé d'être la cause profonde de toute décadence, conformément à une interprétation grossièrement simplifiée de la thèse centrale de Gobineau - lequel voyait bien plutôt dans le métissage un processus ambivalent : moteur de l'Histoire et cause de toute décadence dans l'Histoire. Hitler élabore sa doctrine raciale en variant indéfiniment sur la métaphore du « sang », faisant l'éloge du « sang pur » et condamnant absolument le mélange des « sangs », c'est-à-dire des races : « C'est dans le sang, seul, que réside la force ou la faiblesse de l'homme. (...) Les peuples qui renoncent à maintenir la pureté de leur race renoncent, du même coup, à l'unité de leur âme dans toutes ses manifestations. (...) La question de race n'est pas seulement la clef de l'histoire du monde, c'est celle de la culture humaine. (...) L'histoire établit avec une effroyable évidence que, lorsque l'Aryen a mélangé son sang avec celui de peuples inférieurs, le résultat de ce métissage a été la ruine du peuple civilisateur. »

Cette vision naturaliste repose sur le postulat que la différence et l'inégalité des races humaines est non seulement un fait naturel, mais un fait providentiel, comme le Führer l'affirmera dans son discours prononcé en 1933 au congrès du NSDAP à Nuremberg : « Parce que les races humaines voulues différentes par la Providence n'ont point reçu la même charge culturelle, il sera décisif pour leur conduite et leur formation de vie de savoir, en les croisant, lesquelles des parties pourront établir comme valables dans les divers domaines de la lutte pour l'existence la conception qui leur est naturelle. » D'où un relativisme racial radical, impliquant une conception polylogiste de l'espèce humaine : « Toutes les philosophies rencontrées dans l'histoire ne sont compréhensibles que par rapport aux buts et aux conceptions de vie de certaines races. (...) Une idéologie qui pour un peuple est par naissance, son expression vitale la plus naturelle peut signifier pour un autre de caractère étranger une lourde menace et même sa fin. (...) Chaque race agit pour le maintien de son existence par les forces et les valeurs dont elle est naturellement douée. » Mais, contrairement à la vision pessimiste de l'auteur de l'Essai sur l'inégalité des races humaines (1853-1855), Hitler est convaincu qu'une politique raciale, interdisant strictement les mélanges entre « races » - plus exactement entre la « race aryenne » et les autres -, et favorisant la fécondité des meilleurs représentants de la race supérieure, peut stopper le processus de « dégénérescence ». C'est de Chamberlain qu'il tient l'idée que la « race pure », donc à ses yeux « supérieure », est à fabriquer par des méthodes sélectionnistes. L'eugénisme (baptisé « hygiène raciale » par Alfred Ploetz en 1895) doit permettre de corriger la dégradation génétique des peuples supérieurs. Mais Hitler n'en insiste pas moins sur la « conservation de l'existence raciale de l'homme », impliquant la préservation des races humaines : tel est le rôle qu'il attribue à l'État « völkisch ». Dans son discours du 29 avril 1937 à l'Ordensburg de Vogelsang, Hitler s'applique à définir le Führerstaat national-socialiste, en reprenant la vision de l'État exposée dans Mein Kampf : « Nous, nationaux-socialistes, (...) nous disons que l'État (...) n'a de sens qu'à partir du moment où son ultime mission est à nouveau de maintenir la nationalité [Volkstum] vivante. Il doit être là non seulement pour assurer la vie de la nation [Volk], mais surtout pour en conserver vivante l'essence, pour protéger le sang de la nation. »

Cet impératif de conservation raciale est pour ainsi dire corrigé par un autre impératif dérivant de l'inégalité entre les races : celui de la sélection, conformément au « principe aristocratique de la nature ». Mais l'impératif catégorique du racisme hitlérien, fondamentalement mixophobe, a pour contenu la défense de la « pureté de la race ». Mû par la hantise de la « souillure du sang » que produirait le métissage entre Juifs et Allemands, Hitler n'invente rien en la matière. Il ne fait que recueillir l'héritage des idéologues expressément racistes du nationalisme allemand völkisch, dont Theodor Fritschétait l'un des chefs de file. Parmi les « Dix commandements de l'autodéfense légale » énoncés par Fritsch en 1887 dans son Catéchisme des antisémites, on en trouvait deux qui appelaient à préserver la pureté raciale :

« Tu garderas ton sang pur. Considère comme un crime de souiller la noble lignée aryenne de ton peuple en la mêlant à celle des Juifs. Car tu dois savoir que le sang juif est éternel, impose son empreinte sur le corps et sur l'âme depuis les générations les plus reculées. Tu n'auras pas de relations sociales avec le Juif. Évite tout contact, tout rapprochement avec le Juif, tiens-le à distance de toi et de ta famille, particulièrement de tes filles, de crainte que leur corps et leur âme n'encourent quelque outrage. »

Ce programme d'interdits raciaux-sexuels sera repris par les législateurs nazis, pour aboutir aux lois de Nuremberg (1935).

Cet élitisme racialiste est jumelé chez Hitler avec une conception élitiste de l'Histoire, qui attribue aux personnalités exceptionnelles et providentielles un rôle déterminant. Parmi les « grands hommes » de l'Histoire, Hitler mentionne Luther, Frédéric le Grand et Wagner, trois grandes figures germaniques. Traitant des élites dirigeantes, Houston Stewart Chamberlain citait Luther : « Dieu régit le monde par l'intermédiaire de héros et de personnes excellentes en petit nombre. » Hitler écrit en écho, en sécularisant cette vision providentialiste : « L'histoire du monde est faite par les minorités, chaque fois que les minorités de nombre incarnent la majorité de la volonté et de la décision. » Cette conception élitiste, en politique, implique le rejet de la démocratie fondée sur le pouvoir de la masse : au principe de majorité, Hitler veut substituer le « principe de la personnalité ». Loin de miser sur le nombre pour accomplir la « révolution », Hitler attend tout des « minorités historiques » qui font « tourner la roue de l'Histoire ». Cette conception de la génialité n'est nullement exclusive de la vision raciste du monde. Pour Hitler comme pour Chamberlain, le génie émane du fond de la race : « Le génie (...) sommeille en des centaines et des milliers de consciences - et il y rêve, et il y agit - avant que l'être d'élection s'atteste élu entre tous les autres. (...) L'art du génie présuppose une abondante diffusion de génialité artistique ; Richard Wagner l'a remarqué : dans les ½uvres créatrices de l'art se manifeste "e;une force collective, répartie en des individualités multiples et diverses"e;. »

Dans son discours du 29 avril 1937, Hitler réaffirme le primat de la « personnalité », et attribue tout « progrès » à des individus de génie : « La pensée ne vit pas dans les masses. (...) Si tout progrès humain représente une réalisation supérieure à la précédente, préexistante, on comprend bien qu'il faut que quelqu'un l'ait initié. Or ce quelqu'un qui l'a initié est le porteur de la pensée et non pas la grande masse qui le suit. Il est le pionnier et non pas ce qui a suivi. (...) Le Führerstaat n'a aucune raison de redouter le génie, c'est toute la différence avec la démocratie. »

 

2. La doctrine expansionniste de l'« espace vital » : la « lutte pour l'existence »

 

En second lieu, Hitler présente dans Mein Kampf un plan de politique étrangère de type impérialiste et d'inspiration pangermaniste visant l'expansion territoriale de l'Allemagne, centré sur l'acquisition d'un « espace vital » (Lebensraum) à l'Est et fondé sur les principes d'un darwinisme social sommaire, où la « lutte pour l'existence » explique et justifie tout. Dans cette vision géopolitique, on reconnaît l'influence des pionniers de la géopolitique allemande, Friedrich Ratzel (1844-1904) et Karl Haushofer (1869-1946), qui s'ajoute à celle des idéologues pangermanistes Ernst Hasse (1846-1908), le premier président de l'Alldeutscher Verband (Ligue pangermaniste) - créée à son initiative en 1894 -, et Heinrich Class (1868-1953), son deuxième président (à partir de 1908), sans oublier le général Erich Ludendorff (1865-1937), s'inspirant tous des thèses du darwinisme social impérialiste. Dans ses premiers discours comme dans Mein Kampf, Hitler paraît parfois plagier certains textes des idéologues völkisch du pangermanisme, qu'il s'agisse de Hasse ou de Class. En 1906, dans Deutsche Grenzpolitik (« Politique d'extension des frontières allemandes »), Hasse écrit :

« Nous nous en tiendrons à une affirmation de principe. Ce principe est très simple. Il consiste dans la nécessité, commune à tous les êtres vivants, de se procurer le plus d'espace possible pour leur activité. (...) Mais si notre domaine de colonisation ne peut coïncider avec nos frontières politiques, l'égoïsme sain de la race nous commande de planter nos poteaux-frontières dans le territoire étranger (...), plutôt que de rester sans nécessité en deçà des limites du domaine colonisé par nous. (...) Les frontières présentes de l'Empire allemand sont, comme toutes les choses humaines, sujettes à changement. Si nous sommes un peuple qui croit à son avenir et qui veut subsister, en concurrence avec les autres grands peuples civilisés du globe, nous ne devons pas souffrir qu'on restreigne en aucune façon l'espace nécessaire à notre développement, tant comme race que comme État. Toute modification apportée à nos frontières doit donc se chiffrer par un agrandissement. »

De la même manière, lorsque Hitler affirme : « L'Allemagne sera une puissance mondiale, ou bien elle ne sera pas », il ne fait que reprendre à son compte l'objectif assigné en 1845 par Friedrich List (1789-1846) aux Allemands, à savoir le gouvernement du monde, en raison de leurs qualités raciales supérieures : « La race germanique, cela ne fait aucun doute, a été désignée par la Providence, à cause de sa nature et de son caractère même, pour résoudre ce grand problème : diriger les affaires du monde entier, civiliser les pays sauvages et barbares et peupler ceux qui sont encore inhabités. » En 1854, dans Pro populo Germanico, un autre prophète du nationalisme germanique, Ernst-Moritt Arndt (1769-1860), traitant de la supériorité du peuple allemand, affirmait : « L'Allemand belliqueux, entreprenant et résolu a été créé pour coopérer à la domination mondiale et avant tout pour établir chez lui une forte unité nationale. »

Comme l'a justement fait remarquer Louis Dumont, ce qui est pour Hitler la « vérité ultime de la vie humaine », c'est la lutte de tous contre tous, qui se traduit par la lutte pour la vie, pour le pouvoir ou la domination, pour l'intérêt. La grande loi de la nature, la « loi éternelle » à laquelle n'échappent pas les hommes, c'est la loi du plus fort. Hitler fait donc sienne la thèse centrale du darwinisme social, qu'il expose d'une façon saisissante dans un discours prononcé le 5 février 1928 à Kulmbach :

« L'idée du combat est aussi vieille que la vie elle-même, car la vie se perpétue grâce à la mort en combat d'autres êtres vivants (...). Dans ce combat, les plus forts et les plus adroits l'emportent sur les plus faibles et les moins adroits. Le combat est le père de toutes choses. Ce n'est pas grâce aux principes d'humanité que l'homme peut vivre ou se maintenir au-dessus du monde animal, mais uniquement par la lutte la plus brutale. Si vous ne luttez pas pour la vie, la vie ne sera jamais gagnée. »

Deux mois plus tard, dans un discours prononcé le 2 avril 1928 à Chemnitz, Hitler reformule ainsi ce postulat : « Tous les buts que l'homme a atteints, il les a atteints grâce à son originalité d'abord, à sa brutalité ensuite. » Le principe de la lutte à mort s'oppose aux « principes d'humanité » comme la réalité à la fiction. Hitler fonde sur les principes de la lutte pour la vie et de la survie des « plus forts » (assimilés aux « meilleurs »), par la sélection naturelle continuant selon lui de fonctionner dans l'ordre social, la sélection des élites ainsi que la conservation de la « pureté » de la substance raciale d'un peuple. Cette conservation implique le rejet absolu du métissage, rejet qui lui-même dérive d'une loi de la nature, Hitler assimilant le respect des frontières entre espèces animales au respect des frontières entre races humaines. Ce « naturalisme absolu » revient à nier l'histoire, remplacée à la fois par le mythe (la lutte des races) et le culte de la violence. D'où cette redéfinition du « droit de vivre » : « Que celui qui veut vivre combatte donc ! Celui qui se refuse à lutter dans ce monde où la loi est une lutte incessante ne mérite pas de vivre. » Dans le discours « sur la doctrine national-socialiste » qu'il prononce lors du Congrès de son parti à Nuremberg, en septembre 1935, Hitler résume ainsi la conception sociale-darwiniste de la politique qu'il s'était forgée à l'époque de Mein Kampf :

« Le but originel et naturel de tout idéal, de toute institution d'un peuple ne peut (...) être que de conserver saine et pure la substance corporelle et morale qu'il a reçue de Dieu. De ce principe reconnu découle le critère de tous les phénomènes de la vie d'un peuple, pour décider de leur légitimité, c'est-à-dire pour juger s'ils servent à la conservation du peuple ou s'ils menacent de lui nuire ou même de l'anéantir. La lutte pour la vie étant ainsi établie, notre seul devoir est de découvrir et d'assurer les conditions propres à réaliser cette conservation. Si le Parti national-socialiste veut justifier sa fin, il faut d'abord qu'il assure à la direction politique de la nation cette élite qui, dans presque tous les domaines de la vie, résulte spontanément de la sélection naturelle et joue le rôle dirigeant. »

Cette vision de la politique comme géopolitique et biopolitique implique de réduire l'État à un instrument de la conservation et de la croissance d'un peuple-race. En relativisant l'importance de l'État, contre la tradition philosophico-juridique fondée par Hegel, Hitler reprend à son compte l'héritage d'un idéologue du pangermanisme comme Ernst Hasse, qui résumait ainsi sa perspective : « Le peuple est la seule chose qui conserve une consistance dans le développement d'une évolution millénaire. Tout le reste n'est que situation transitoire. Comme réceptacles des peuples, les États vont et viennent. Quant aux constitutions des États et à l'organisation de la société, elles sont encore plus passagères. L'unique chose durable qui traverse toutes les transformations, c'est le peuple. »

Récusant explicitement et avec virulence l'individualisme libéral ou « bourgeois », Hitler pense néanmoins les « races » comme des individus collectifs en concurrence les uns avec les autres. Il demeure ainsi sous l'emprise des schèmes de la pensée individualiste moderne. En dénonçant comme des abstractions corrélatives l'« individu » de la société bourgeoise et l'« humanité » de l'idéologie communiste, Hitler peut ériger la Volksgemeinschaft en fondement absolu de l'ordre politique. Dans un discours prononcé en 1937 au Reichstag,  il se montre fort clair sur la question : « La poutre maîtresse du programme national-socialiste est d'abolir le concept libéral de l'individu comme le concept marxiste de l'humanité, et de leur substituer celui de la communauté du Volk, enracinée dans son sol et unie par les chaînes d'un même sang. » C'est dans cette perspective que le mot « socialisme » prend un nouveau sens, celui que lui donne la « biologie raciale » des théoriciens de l'« hygiène raciale » et la politique de la race qui en constitue l'application. Le généticien eugéniste Fritz Lenz, dans un article appelant à un « renouveau de l'éthique », paru en 1917, opposait le « socialisme », en tant que régime politique propre à cimenter l'unité « organique » du « peuple allemand », et s'accordant ainsi aux objectifs de l'« hygiène raciale », à la démocratie libérale, privilégiant les droits de l'individu : « La pensée sociale doit être développée, mais plutôt dans le sens organique-social qu'individuel-social. Le socialisme ne doit pas avoir pour objectif suprême les individus, mais la race. La vocation de l'État n'est pas de se préoccuper des droits des individus mais d'être au service de la vie de la race [dass er dem Leben der Rasse diene]. Tous les droits doivent contribuer à cet objectif, et s'y soumettre. »

C'est dans la version brutale du darwinisme social définie dans Mein Kampf qu'Hitler puisera les arguments justifiant les exterminations de masse des populations civiles « ennemies » qu'il ordonnera personnellement dès l'été 1939. Dans son discours prononcé le 22 août 1939 devant ses généraux réunis à l'Obersalzberg, peu avant l'invasion de la Pologne, Hitler justifie par le besoin de Lebensraum l'extrême violence dont l'armée allemande doit faire preuve vis-à-vis de la population polonaise, et, n'hésitant pas à se donner pour modèle Gengis Khan, engage ses généraux à ordonner de massacrer en masse les civils polonais :

« Notre force tient à notre rapidité et notre brutalité. Gengis Khan a condamné à mort des millions de femmes et d'enfants, en toute conscience et d'un c½ur léger. L'histoire ne se souvient que du grand fondateur d'État. Je me moque de ce que dit la faible civilisation ouest-européenne à mon propos. J'ai donné un ordre - et je fusillerai quiconque formulera une seule critique : l'objectif de la guerre ne sera pas d'atteindre une ligne donnée mais d'anéantir physiquement l'adversaire. C'est pourquoi j'ai disposé - pour l'instant seulement à l'Est - mes unités à tête de mort ; elles ont reçu l'ordre de mettre à mort sans merci et sans pitié beaucoup d'hommes, de femmes et d'enfants d'ascendance et de langue polonaises. C'est la seule manière pour nous de conquérir l'espace vital dont nous aurons besoin. Qui parle encore, aujourd'hui, de l'anéantissement des Arméniens ? »

La Pologne fut bien pour les nazis, selon la volonté du Führer, le laboratoire de la « solution finale ».  


3. La lutte à mort contre la « juiverie internationale »

 

En troisième lieu, on trouve dans Mein Kampf le programme d'une lutte finale contre la « juiverie internationale » (internationale Judentum, syntagme mal traduit par « judaïsme international »), définie comme l'ennemi absolu aux multiples visages, de la « finance cosmopolite » au « bolchevisme juif », ou « judéo-bolchevisme », incarnation d'une puissance occulte mondiale. Le mythe du complot juif mondial entre en syncrétisme avec la vision raciste-aryaniste du monde, pour donner son contenu au dualisme manichéen qui structure la vision hitlérienne du monde. Les Juifs sont fantasmés comme la plus grande menace pesant sur l'identité de la « race aryenne », donc sur « la civilisation », si l'on croit, comme l'affirme Hitler dans le premier tome (1925) de Mein Kampf, que « l'Aryen », qui représente « le type primitif [Urtyp] de ce que nous entendons sous le nom d'"e;homme"e; », est « le Prométhée de l'humanité » et qu'il a « créé la civilisation ».

L'ennemi juif est défini par Hitler comme ennemi absolu dans le cadre d'une vision conspirationniste étayée par le célèbre faux antijuif, les Protocoles des Sages de Sion, qu'il connaissait depuis le début des années 1920. Ce faux d'origine franco-russe, qui deviendra rapidement un best-seller international, fut transmis au début de 1919 en Allemagne par des émigrés russes  (Fedor V. Vinberg, Piotr N. Chabelski-Bork) et baltes (Max-Erwin von Scheubner-Richter, Alfred Rosenberg). Il fut lu par Hitler en 1920, dans sa première traduction allemande, réalisée par Gottfried zur Beek (pseudonyme de Ludwig Müller, dit Müller von Hausen, fondateur de l'Alliance contre l'arrogance de la juiverie en 1912, puis membre du Germanenorden) et publiée sous le titre Die Geheimnisse der Weisen von Zion (« Les Secrets des Sages de Sion »). C'est sous l'influence de ces émigrés antibolcheviks - en particulier Rosenberg et Scheubner-Richter, qui mêlaient dans leur discours l'antimaçonnisme à l'antisémitisme -, s'ajoutant à celle qu'exerçait sur lui Dietrich Eckart, qu'Hitler interprète de façon apocalyptique la révolution bolchevique comme une preuve de la conspiration juive mondiale, sa preuve à la fois la plus récente et la plus flagrante. En 1920, Eckart stigmatisait la Russie soviétique comme « la dictature d'égorgeurs de chrétiens sous l'égide du rédempteur juif Lénine et de son Élie, Trotski-Bronstein », et affirmait qu'à ses yeux, la meilleure solution de la « question juive » serait d'embarquer tous les Juifs dans un train et de déverser ce chargement dans la mer Rouge. C'est à Eckart que les nazis vont emprunter leur cri de guerre : « Deutschland, erwache ! » (« Allemagne, réveille-toi ! »).

Lancée par le général Erich Ludendorff, la légende du coup de poignard dans le dos, censée expliquer la défaite allemande et la « désastreuse » paix de Versailles, parut fournir une nouvelle preuve historique de la réalisation du programme de domination juive mondiale censé avoir été révélé par les Protocoles des Sages de Sion. Cette légende, fondée sur le stéréotype du Juif « destructeur des nations » et des « empires », fut aussitôt reprise par la quasi-totalité des milieux de l'extrême droite allemande qui, traumatisés par la révolution de novembre 1918 qu'ils supposaient à direction juive, s'appliquaient à disculper le militarisme prussien en imputant aux Juifs la responsabilité principale des malheurs de l'Allemagne. Le général prussien Friedrich von Bernhardi (1849-1930), chef de file du bellicisme allemand d'avant-guerre, reprend à son compte la légende dans un ouvrage paru en 1922 : Deutschlands Heldenkampf 1914-1918 (« Le Combat héroïque de l'Allemagne, 1914-1923 »). Le journaliste et essayiste néo-conservateur Hans Blüher (1888-1955) - connu comme historien du mouvement des Wandervögel -, dans un opuscule également paru en 1922 : Secessio Judaica, considère l'accusation comme irréfutable, en ce qu'elle est en parfait accord avec la conviction qu'a le peuple allemand de la culpabilité des Juifs dans le dénigrement du prussianisme. Dans un livre paru en 1921, Kriegführung und Politik (« Conduite de la guerre et politique »), Ludendorff accuse expressément les Juifs d'avoir voulu la défaite de l'Allemagne et s'efforce d'expliquer pourquoi les hauts dirigeants du peuple juif se sont engagés contre l'Allemagne :

« Le directoire [Oberleitung] du peuple juif a soutenu les efforts de la France et de l'Angleterre, peut-être a-t-il même guidé la politique de ces deux pays. Il a considéré la guerre mondiale imminente comme le moyen d'atteindre ses objectifs politiques et économiques : acquérir un territoire ayant le statut d'un État en Palestine, faire reconnaître l'existence du peuple juif ; procurer aux Juifs d'Europe et d'Amérique une position de suprématie, au-dessus des Étatset à la tête des capitalismes. Dans le cadre de la réalisation de ce programme, les Juifs, en Allemagne, aspiraient à une position identique à celle qu'ils détenaient dans les pays qui s'étaient déjà livrés à eux. Pour cela, le peuple juif avait besoin de la défaite allemande. »

Cette accusation visant les Juifs comme principaux responsables de la défaite de l'Allemagne sera intégrée par Hitler dans nombre de ses discours, où elle jouera le rôle d'une justification d'un type de prophétie-menace dont le démagogue fera un usage récurrent, comme dans le discours du 30 novembre 1919 à Hersbruck : « Les temps viendront où les coupables de l'effondrement de l'Allemagne perdront l'envie de rire. Ils seront saisis d'angoisse. Qu'ils sachent que le juge arrive. » Dans le deuxième tome de Mein Kampf, Hitler réitère et précise sa prophétie sur le châtiment des « criminels de Novembre » : « Un jour, un tribunal national allemand aura à juger et à faire exécuter quelques dizaines de milliers d'organisateurs responsables de la trahison de Novembre et de tout ce qui s'y rapporte. » Lesdits « criminels » sont d'abord et avant tout les Juifs. Le 21 janvier 1939, Hitler déclare au ministre des Affaires étrangères tchèque Frantisek Chvalkovsky : « Nous allons détruire les Juifs. Ils n'auront pas l'occasion de recommencer ce qu'ils ont fait le 9 novembre 1918. Le jour du règlement de comptes est arrivé. » Lancée deux ans et demi avant l'invasion de l'URSS et la montée aux extrêmes - dans les actes comme dans la vision mythique - de la lutte contre le « judéo-bolchevisme », on peut voir dans cette « prophétie » l'un des indices de la « primauté de l'idéologie », justifiant qu'on puisse parler d'une « croisade » hitlérienne, à l'instar de l'historienne Lorna Waddington. Mais une « croisade » visant exclusivement l'extermination de l'ennemi, sans laisser la moindre place à la conversion ou au ralliement. Une guerre idéologique génocidaire dont l'antisémitisme « apocalyptique » hitlérien (Wistrich) aura constitué la première illustration historique.

L'indéniable fixation sur la figure répulsive du « bolchevisme juif » ou du « judéo-bolchevisme », qu'on rencontre dans les discours d'Hitler à partir de 1920, dans Mein Kampf et, pour finir, dans les déclarations faites entre l'été 1941 et le printemps 1945, a pu faire croire à certains historiens, marxisants ou non, que les Juifs étaient haïs en tant que bolcheviques. Il y a là une lourde erreur d'interprétation, qui constitue le fil conducteur de l'étude d'Arno J. Mayer,  La « Solution finale » dans l'histoire (1988). Pour Hitler, si les bolcheviques étaient intrinsèquement haïssables, ils l'étaient d'autant plus qu'ils étaient supposés juifs. Tel était l'objet de la haine absolue et abstraite du Führer : les bolcheviques en tant que Juifs. Selon le même principe mythopolitique, si, aux yeux d'Hitler, la « finance juive internationale » était absolument haïssable, elle l'était en tant que juive, ou comme manifestation particulière de la satanique « juiverie internationale ».

Hitler s'inspire aussi d'une littérature antisémite völkisch alors largement répandue qui stigmatise le Juif comme « parasite », en recourant notamment à des métaphores bio-médicales qui permettent de construire le type répulsif du Juif-bacille. Dans Mein Kampf, « le Juif » est opposé à « l'Aryen », d'une façon manichéenne, comme le type du parasite destructeur à celui du créateur de civilisation, ou encore comme le principe satanique au principe divin. Non seulement, pour Hitler, un Juif ne pouvait pas être un citoyen allemand, mais il ne pouvait pas non plus être un artiste ou un écrivain allemand. Ces convictions nationalistes-racistes, Hitler les avait reçues non seulement de Wagner ou de Chamberlain, mais aussi de tous les essayistes qui, à la fin du XIXe siècle, avaient varié sur le thème « L'Allemagne aux Allemands », tels Paul de Lagarde (1827-1891), le prophète de la renaissance germanique, postulant que « les Juifs en tant que Juifs sont un fléau pour tous les peuples de l'Europe », ou Julius Langbehn (1851-1907), le fameux auteur de Rembrandt als Erzieher (« Rembrandt éducateur »), qui soutenait qu'« un Juif peut tout aussi peu devenir un Allemand qu'une prune peut devenir une pomme ». Cette thèse rejoignait les diatribes de Richard Wagner contre les Juifs coupables de « judaïser » la culture allemande. Le jeune Wagner, dans son fameux essai Le Judaïsme dans la musique (Das Judentum in der Musik), publié sous pseudonyme dans la Neue Zeitschrift für Musik de Leipzig les 3 et 6 septembre 1850, puis sous son nom en 1869, avait dénoncé avec virulence l'émancipation des Juifs comme instrument de leur domination dans le monde moderne. Dans ses écrits et ses déclarations publiques, à partir de 1850, Wagner a beaucoup fait pour diffuser la thèse selon laquelle l'influence juive dans la culture européenne était essentiellement négative, et qu'il fallait de toute urgence lutter contre le processus de « judaïsation (Verjudung) de l'art moderne ». Ainsi, dans « Qu'est-ce qui est allemand ? » (1879), Wagner dénonçait les Juifs comme des faussaires dangereux pour l'identité allemande : « Les Juifs [tiennent] le travail intellectuel allemand entre leurs mains. Nous pouvons ainsi constater un odieux travestissement de l'esprit allemand, présenté aujourd'hui à ce peuple comme étant sa prétendue ressemblance. Il est à craindre qu'avant longtemps la nation prenne ce simulacre pour le reflet de son image. Alors, quelques-unes des plus belles dispositions de la race humaine s'éteindraient, peut-être à tout jamais. » Dans son essai de 1881, « Connais-toi toi-même », Wagner dénonçait une nouvelle fois « le Juif » comme le « démon plastique de la décadence [Verfall] de l'humanité, qui triomphe avec assurance » - expression particulièrement prisée par Alfred Rosenberg et Joseph Goebbels -, et concevait la décadence comme le règne de l'abstraction généralisée, effet d'une perte du « sentiment cosmique » et d'une disparition des attitudes désintéressées, chassées par ce qu'il appelait en 1849, dans son essai L'¼uvre d'art de l'avenir, la puissance de « l'utilitarisme judéo-oriental ». Rauschning est assurément crédible lorsqu'il fait dire à Hitler : « Quiconque désire comprendre le national-socialisme doit d'abord connaître Richard Wagner. »

Quant à l'écrivain antisémite et historien völkisch de la littérature Adolf Bartels (1862-1945), qui postulait qu'« un Juif ne peut pas être un écrivain allemand », il fut reconnu comme un maître et honoré en tant que tel sous le Troisième Reich, et Hitler lui-même tint à lui rendre visite à Weimar en 1926. En 1910, Bartels définissait le postulat raciste de son approche de la littérature allemande en ces termes : « Celui qui de nos jours, en histoire littéraire, évince la question juive, celui qui ne distingue pas d'une manière absolument claire entre un esprit allemand sain et l'esprit juif, international et malsain, celui-là ne se détourne pas simplement de son devoir à l'égard du peuple allemand, il commet un crime contre lui. »

Face à « l'idéalisme » propre à l'Aryen se profile donc, au regard d'Hitler, la menace du « parasite » juif, du « bacille » ou du « virus juif », selon un jeu de métaphores pathologisantes empruntées notamment à Wilhelm Bölsche (1861-1939), l'un des représentants du « darwinisme social » à l'allemande, situé dans le sillage de Ernst Haeckel, et auteur d'un livre intitulé Vom Bazillus zum Affenmenschen. Naturwissenschaftliche Plauderein (« Du bacille à l'homme-singe. Causerie scientifique »), paru en 1899. Cette représentation du Juif comme expression d'une forme de vie inférieure constituera pour les nazis une puissante rationalisation hygiéniste de l'élimination des Juifs : face à la « vermine juive », il va de soi qu'il faut prendre des mesures d'hygiène, « désinfecter », « nettoyer », « épurer ».

Mais le Juif est aussi un principe de corruption, d'infection ou d'« empoisonnement du sang », qui hante l'imaginaire hitlérien. Les rapports sexuels que les Juifs peuvent avoir avec les Aryens constituent un « péché contre le sang », selon l'expression banalisée par le titre du célèbre roman de l'écrivain völkisch Artur Dinter (1876-1948) : Die Sünde wider das Blut, paru en décembre 1917. Dans un discours prononcé le 2 février 1922, Hitler demande la peine de mort pour « tout Juif pris avec une fille blonde ». Évoquant son séjour à Vienne, ville « cosmopolite » à ses yeux, symbolisant le « chaos ethnique » (ce qu'il appellera en 1928, dans le Second Livre,la « bouillie de races », Rassenbrei), Hitler écrit : « Et au milieu de tous ces gens : cette éternelle bactérie de l'humanité, des Juifs, encore et toujours des Juifs. Cette ville tentaculaire me faisait l'effet d'incarner "e;le péché contre le sang"e;. » La présence des Juifs au milieu des peuples aryens représente une menace de « souillure raciale », de « profanation de la race » (Rassenschande). Dès lors, l'élimination du principe du Mal, le Juif, constitue la voie de la rédemption de l'humanité aryenne.

 

4. La « purification » et l'amélioration de la « race » : l'« hygiène raciale » au programme

 

En quatrième lieu, Hitler expose dans Mein Kampf l'utopie d'une politique de « purification » et de « régénération » relevant de l'« hygiène raciale », programme à la fois raciste et eugéniste visant à éliminer, dans la population considérée, les éléments jugés « dégénérés » ou « inférieurs » (eugénique dite « négative ») et à favoriser la multiplication des éléments « racialement sains » ou « supérieurs » (eugénique dite « positive »). Cette biopolitique raciste suppose une vision instrumentale de l'État : « L'État n'est pas un but, mais un moyen. Il est bien la condition préalable mise à la formation d'une civilisation humaine de valeur supérieure, mais il n'en est pas la cause directe. Celle-ci réside exclusivement dans l'existence d'une race apte à la civilisation. » Lecteur enthousiaste du célèbre traité d'hérédité humaine et d'« hygiène de la race » publié en 1921 par les généticiens Erwin Baur, Eugen Fischer et Fritz Lenz : Grundriss der menschlichen Erblichkeitslehre und Rassenhygiene, en deux volumes (t. 1 : Menschliche Erblichkeitslehre ; t. 2 : Menschliche Auslese und Rassenhygiene), Hitler prône publiquement, au début du deuxième chapitre (« Années d'études et de souffrances à Vienne ») du tome I de Mein Kampf, le meurtre des enfants handicapés, dans un passage où il fait référence aux rejetons « dégénérés » des familles ouvrières misérables qu'il avait observées à Vienne durant sa jeunesse : « Anéantir avec une décision brutale les rejetons non améliorables. » Dans le deuxième chapitre (« L'État ») du tome II, Hitler préconise clairement la stérilisation des porteurs de « tares » et de maladies héréditaires, et justifie longuement les mesures d'eugénique négative censées corriger l'impératif nataliste qu'il défend par ailleurs en tant que nationaliste allemand :

« L'État raciste [völkische Staat] (...) devra faire de la race le centre de la vie de la communauté ; veiller à ce qu'elle reste pure ; déclarer que l'enfant est le bien le plus précieux. Il devra prendre soin que, seul, l'individu sain procrée des enfants ; il dira qu'il n'y a qu'un acte honteux : mettre au monde des enfants quand on est maladif et qu'on a des tares, et que l'acte le plus honorable est alors d'y renoncer. Inversement, il professera que refuser à la nation des enfants robustes est un acte répréhensible. L'État doit (...) déclarer que tout individu notoirement malade ou atteint de tares héréditaires, donc transmissibles à ses rejetons, n'a pas le droit de se reproduire et il doit lui en enlever matériellement la faculté. (...). Celui qui n'est pas sain, physiquement et moralement, et par conséquent n'a pas de valeur au point de vue social, ne doit pas perpétuer ses maux dans le corps de ses enfants. (...) On se préoccupera tout naturellement de développer la valeur de ce qui constitue la moelle la plus précieuse de la race et d'augmenter sa fécondité pour qu'enfin toute la nation participe à ce bien suprême : une race obtenue selon les règles de l'eugénisme. »

Chez les théoriciens racio-eugénistes, dont s'inspire Hitler en 1924-1925, la notion de « race » sort des classifications de l'anthropologie physique pour se redéfinir comme l'effet d'une action volontaire dont l'instrument principal est la sélection des procréateurs. L'idée eugéniste de la race voulue rompt avec l'imaginaire gobinien de la race perdue. « La race n'est pas un phénomène primitif, elle est produite » (« Rasse ist nicht ein Urphänomen, sondern sie wird erzeugt »), affirme Houston Stewart Chamberlain en 1899 dans son ouvrage le plus célèbre, les Grundlagen des neunzehnten Jahrhunderts (littéralement : « Les Fondements du XIXe siècle »). En 1921, le généticien eugéniste Lenz, dans le célèbre traité de génétique humaine et d'hygiène raciale qu'il a co-signé avec Baur et Fischer, pose le problème de la race à la manière de Chamberlain : « Au début de toute chose se trouve le mythe. (...) Oui, la race est un mythe, c'est moins une réalité du monde expérimental qu'un idéal à atteindre. »

Au début d'octobre 1923, un mois avant le putsch manqué de Munich, Hitler, en admirateur du théoricien aryaniste et eugéniste, gendre de Wagner et wagnérien éminent, qu'était Chamberlain, avait rendu visite à ce dernier à Bayreuth. Le 7 octobre, Chamberlain lui adresse une lettre où, en prophète reconnu du germanisme, il adoube le jeune agitateur :

« En vérité, vous n'êtes pas un fanatique, comme vous m'aviez été décrit ; je voudrais plutôt vous définir comme le contraire du fanatique. Le fanatique excite les esprits ; vous échauffez les c½urs. Le fanatique veut persuader ; vous voulez convaincre, seulement convaincre - et c'est pourquoi vous réussissez (...). De hautes tâches vous attendent ; mais, malgré votre force de volonté, je ne vous prends pas pour un homme de violence (...). Il y a une violence qui vient du chaos et qui y mène, et il y a une violence dont l'essence est de former le cosmos (...). C'est en cette signification cosmique que je vous range parmi les hommes qui construisent et non parmi les violents (...). Rien ne sera atteint tant que subsistera le système parlementaire (...). Je tiens son règne pour le plus grand malheur qui puisse advenir à un peuple (...). Ma foi dans le Germanisme n'a pas vacillé un seul jour ; mais mon espoir, je l'avoue, était descendu au plus bas du reflux. D'un seul coup, vous avez transformé mon état d'âme. Qu'au moment de sa plus grande détresse l'Allemagne se donne un Hitler, cela prouve sa vitalité (...). Que Dieu vous protège !  »

Cette lettre, caution donnée à Hitler par une personnalité de réputation internationale, fut largement diffusée et exploitée par la propagande nazie. Chamberlain adhéra au parti national-socialiste et, en 1924, salua Hitler dans l'organe du NSDAP, le Völkischer Beobachter, comme l'homme destiné par Dieu à conduire et à diriger le peuple allemand. En 1925, à l'occasion du soixante-dixième anniversaire de Chamberlain, le Völkischer Beobachter célébra le principal ouvrage du maître, Die Grundlagen des neunzehnten Jahrhunderts, comme « l'Évangile du mouvement national-socialiste ». Il n'est pas sans signification qu'Alfred Rosenberg, dans un livre sur Chamberlain paru quelques mois après la mort de ce dernier (janvier 1927), l'ait célébré comme « le prophète et le fondateur de l'avenir germanique ».

On retrouvera ces quatre grandes orientations idéologiques, définies par Hitler en 1924-1925, dans la politique nazie de 1933 à 1945 : racisme (ou national-racisme), darwinisme social impérialiste (ou nationalisme expansionniste), antisémitisme apocalyptique (inséparable d'un anticommunisme radical) et eugénisme (plus précisément, un eugénisme d'État, impliquant un contrôle systématique et coercitif de la procréation). La quadripartition de la doctrine hitlérienne, telle qu'elle est exposée dans Mein Kampf, semble s'être reflétée dans la politique du Troisième Reich, qui fut donc une politique idéologique, conforme à une conception du monde ou à une « philosophie » qui lui préexistait. Il y a là un fait observable qui ne laisse pas d'être surprenant : le fait que les grandes lignes d'une doctrine politique se soient comme réalisées dans l'histoire, alors que la marche ordinaire de celle-ci offre le spectacle d'une suite non cohérente d'effets pervers, les programmes politiques ou les utopies sociales ne se réalisant que sur le mode de l'inversion, de la perversion ou de la distorsion. Le fait que ce programme politique dérivant de dogmes idéologiques ait pu trouver une réalisation effective, grâce à la conjonction spécifique d'une violence coercitive et d'un consensus créé par un puissant appareil de propagande et d'endoctrinement, ce fait est inintelligible sans poser comme facteur déterminant l'emprise polymorphe du personnage central, Hitler. Ce dernier, loin de se contenter de satisfaire, comme tout homme politique ordinaire, sa soif de pouvoir, a voulu transformer le monde selon ses idéaux, aussi monstrueux qu'ils aient été. En quoi il a bien été un « révolutionnaire », ainsi que l'a montré John Lukacs dans son essai de 1997 : The Hitler of History. Osons suggérer un rapprochement : Mein Kampf aurait pu être titré, à l'instar du livre de Proudhon, Les Confessions d'un révolutionnaire. Il y a en effet autant de postures révolutionnaires que de grandes idéologies politiques : s'il existe des révolutionnaires jacobins, communistes et anarchistes, il existe aussi des révolutionnaires anticommunistes, nationalistes, fascistes et racistes. Au mot d'ordre communiste « Prolétaires de tous les pays, unissez-vous ! » fait écho le mot d'ordre raciste « Racistes de tous les pays, unissez-vous ! », qui prendra sens avec l'ouverture de la Waffen-SS, fin 1942, aux combattants d'origine non germanique.

Concernant le programme d'eugénique raciale exposé par Mein Kampf, il faut noter que sa mise en ½uvre a été immédiate : de 1933 à 1935, le Troisième Reich s'est donné une législation inspirée à la fois par l'eugénique négative et par une judéophobie raciste centrée sur la mise à l'écart des Juifs d'Allemagne. Dans un premier temps, la biopolitique nazie, en tant que « biologie appliquée », s'est traduite, aussitôt après la prise du pouvoir, d'abord par une législation eugéniste (1933-1934), puis par la promulgation de lois expressément racistes (les « Lois de Nuremberg », 1935). Ces lois discriminatoires ont été appliquées sans tarder. La  loi pour la « prévention d'une descendance héréditairement malade » fut adoptée le 14 juillet 1933 et entra en application le 1er janvier 1934. Il s'agit d'une loi proprement eugéniste dans laquelle on ne trouve pas trace de racisme ni d'antisémitisme, contrairement aux « Lois de Nuremberg ». En 1934, deux lois d'inspiration eugénique furent adoptées, qui vont constituer la base légale de la stérilisation de plus de 350 000 personnes : la loi limitant la procréation chez les malades héréditaires, et la loi contre les criminels irrécupérables et dangereux. Le 15 septembre 1935 furent votées à Nuremberg par le Parlement, lors du septième Congrès du Parti national-socialiste (10-16 septembre), deux lois, dites « de Nuremberg », visant à réaliser l'épuration raciale de la population allemande : la loi définissant la citoyenneté et, surtout, la « Loi pour la protection du sang et de l'honneur allemands », loi discriminatoire et ségrégationniste interdisant « les mariages entre Juifs et ressortissants de l'État de sang allemand ou apparenté » (art. 1). Cette loi interdisait le mariage et les rapports sexuels entre « Juifs » et « Aryens », tout en distinguant, parmi les « Aryens », les « Allemands » et ceux de « race apparentée ». L'orientation générale de cette politique où l'eugénisme était mis au service d'objectifs à la fois productivistes, collectivistes et racistes, allant de la ségrégation et la stérilisation à l'extermination, fut la recherche d'une « solution finale des problèmes sociaux » (Norbert Frei), qui prenait tout son sens dans le cadre d'un vaste projet de « régénération » ou de « rénovation nationale ». L'eugénique dite « positive » (favoriser la procréation chez les individus supposés porteurs d'une « bonne hérédité ») a pris figure, sous le Troisième Reich, avec le projet Lebensborn (« source de vie », « printemps de la vie »), projet de « régénération raciale » mis en application par Himmler à partir de 1936. Dans la perspective néo-païenne d'Himmler, il s'agissait d'ouvrir la voie au remplacement final du mariage chrétien par des normes morales et des cérémonies s'inspirant de l'hygiène raciale « nordique ». Le Reichsführer-SS, dont le programme d'action était de pratiquer « l'élevage humain » afin de « rendre sa pureté à la race germanique », définissait ainsi ses objectifs eugénico-racistes devant un groupe d'officiers de marine : « Je me suis fixé la mission d'obtenir, par une sélection basée sur l'apparence physique et par un effort continu, par un tri brutal effectué sans aucune sentimentalité humaine, et par l'éradication du faible et de l'inapte, l'émergence d'une nouvelle race germanique. »

La politique nazie pouvait ainsi se présenter et se célébrer comme une science appliquée. Et la plupart des scientifiques de renom restés en Allemagne applaudissaient. En 1934, le plus célèbre des généticiens allemands, Eugen Fischer, enthousiasmé par l'adoption des premières lois eugénistes, ne marchandait pas ses éloges : « Pour la première fois dans l'histoire mondiale, le Führer Adolf Hitler met en pratique les découvertes concernant les fondements biologiques des peuples - la race, l'hérédité, la sélection. Ce n'est pas par hasard que cela se produit en Allemagne : la science allemande donne aux politiciens les outils nécessaires. » En 1935, alors qu'il n'avait pas encore rallié le parti national-socialiste, le généticien Otmar von Verschuer, l'étoile montante de la biologie allemande, glorifiait à son tour l'action « pionnière » d'Hitler : « Le Führer du Reich allemand [a été le] premier homme d'État à avoir fait des connaissances de biologie de l'hérédité [Erbbiologie] et d'hygiène raciale un principe directeur de la conduite de l'État. »

L'eugénique dite « négative » (décourager ou empêcher la procréation chez les individus jugés porteurs de défauts ou de maladies héréditaires) a pris la forme radicale d'une entreprise d'extermination des handicapés et des malades mentaux, travestie en actions de « compassion » ou de « charité » envers les « malades ». Cette campagne dite « d'euthanasie », lancée dans le plus grand secret en octobre 1939 - dénommée Aktion T4 d'après l'emplacement de son bureau spécial, situé au 4 de la Tiergartenstraße -, fut interrompue, grâce aux protestations de hautes autorités ecclésiastiques, le 28 août 1941. Le discours eugéniste (lui-même euphémisé par le recours au terme « euthanasie ») a ainsi longtemps servi à masquer la réalité de la politique nazie d'élimination de la « vie sans valeur » (« unwertes Leben ») : d'abord mise à part et à l'écart, puis extermination des individus « sans valeur de vie ». Lorsque le secret de la politique d'extermination a été percé, et son langage codé décrypté, le massacre a dû être interrompu par les hauts dirigeants nazis. Même dans le cadre d'un État totalitaire, l'accès d'une information dissimulée à l'espace public (aussi réduit soit-il) suffit à exercer une pression symbolique. On sait que les choses se sont passées tout autrement dans le cas de la « Solution finale de la question juive », qui, le « terrifiant secret » ayant été plutôt bien gardé, a pu être réalisée sans rencontrer d'obstacles insurmontables. Hitler s'en félicitera le 2 avril 1945 : « Le fait d'avoir éliminé les Juifs d'Allemagne et de l'Europe centrale demeurera un titre de reconnaissance durable à l'égard du national-socialisme. » Le philosophe et théologien juif Richard L. Rubenstein, dans son bel essai paru en 1968, The Religious Imagination, ne cachera pas la leçon pessimiste qu'il a tirée de ses réflexions sur Auschwitz : « Les Allemands ont gagné la seule guerre qui comptait vraiment pour eux : la guerre contre les Juifs. En outre, ils ont enseigné au monde que, grâce à la technologie humaine, le génocide psychologique, moral et physique est chose possible. (...) Toute action menée à bien incite à la répétition. La menace du génocide ne s'effacera plus. » Ce que nous a appris la Shoah, c'est en effet qu'un génocide peut se réduire à « une série de problèmes techniques à résoudre ». Terrible leçon, qui n'offre ni consolation, ni raison de ne point désespérer.

 

Fin de la seconde et avant-dernière partie.

 

Pierre-André TAGUIEFF


La Question Mein Kampf (Part. III)

 

Rappel :
Pierre-André Taguieff prend position dans le débat qui oppose depuis quelques années, en Allemagne et en France notamment, les partisans d'une édition critique de Mein Kampf à ceux qui, pour des raisons diverses, y sont hostiles. Considérant qu'il serait irresponsable de parier sur l'ignorance, et que le « laisser-faire » en matière éditoriale relèverait ici de l'aveuglement volontaire, Pierre-André Taguieff plaide en faveur d'une édition historique et critique de Mein Kampf, porté à considérer qu'une telle édition réalisée par une équipe pluridisciplinaire de spécialistes constitue - du moins dans les sociétés libérales/pluralistes garantissant la liberté d'expression et de discussion - le seul moyen d'éviter d'abandonner ce texte dangereux aux propagandistes extrémistes et aux éditeurs sans scrupule. Et la seule façon de priver Hitler d'une victoire posthume.
Troisième et dernière partie.


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Par cette rapide traversée des principaux thèmes doctrinaux de Mein Kampf, incluant un aperçu quant aux origines intellectuelles de l'ouvrage et la mention de quelques-uns de leurs développements ou de leurs avatars institutionnels sous le Troisième Reich, j'espère avoir montré que le détour par une lecture critique du livre-manifeste de Hitler n'était pas un travail inutile. Le moment est venu pour les historiens de ne plus affecter de croire que l'analyse de la dimension idéologique doit être secondaire, voire négligeable, dans les approches savantes du phénomène nazi. Hitler était au centre du nazisme, et, chez lui, l'orientation vers l'action n'a cessé de coexister avec un intérêt aussi brouillon que passionné pour les questions de doctrine, pour ce qu'il appelait la « conception du monde » (Weltanschauung), recouvrant un large spectre de questions d'ordre théorique. Cet intérêt d'autodidacte pour l'histoire politique et militaire, la théori
e politique, la philosophie et les arts (musique et architecture avant tout) est une constante dans l'évolution du Führer, qui confiait à ses interlocuteurs, dans la nuit du 25 au 26 janvier 1942 : « S'il s'était trouvé quelqu'un pour accomplir l'½uvre à laquelle je me suis consacré, jamais je ne me serais engagé dans la voie de la politique. J'eusse choisi les arts ou la philosophie. » D'une façon plus inattendue encore, le dictateur le plus redouté du XXe siècle lance dans un discours prononcé en septembre 1936 : « Tout ce que l'homme consomme, en richesses, pour les besoins matériels de sa vie, est voué à l'oubli, et seul ce qu'il a édifié, ce qu'il laisse de durable comme trace de son existence portera témoignage de son passage sur cette terre. Le manuscrit d'un philosophe affamé vivra immortellement dans l'histoire de l'humanité, bien plus que les entreprises lucratives du plus vaniteux des capitalistes. (...) La seule réalisation du travail, de l'énergie humaine qui soit impérissable, c'est l'art ! » Indéniablement, Hitler se prenait au sérieux et prenait très au sérieux les questions dites indistinctement intellectuelles, culturelles ou idéologiques, comme le montrent notamment ses « Libres propos » des années de guerre. Il a appliqué le même esprit de sérieux à la poursuite de ses fantasmes, à la réalisation de ses illusions. Or, notait Carlyle, « l'homme dangereux est celui qui se laisse guider par ses illusions et qui se trompe quant à l'essentiel de la chose dont il s'occupe. Il est dangereux, indiciblement dangereux, quand il est appelé à occuper une haute situation. » Hitler fut un tel homme, ainsi que l'a noté Otto Dietrich, un ancien proche du Führer devenu l'un de ses critiques les plus lucides.

Sans l'élaboration idéologique dont Hitler, dès le début de 1920, a été le principal artisan au sein du NSDAP, le mouvement nazi n'aurait pu exister, se développer et finalement s'imposer. En outre, la réalisation de la « Solution finale » n'est pleinement intelligible qu'à la condition de prendre au sérieux la doctrine antijuive qu'Hitler a fabriquée avec les matériaux symboliques particulièrement abondants fournis par les différents courants de l'antisémitisme allemand. Cette doctrine indéfiniment rappelée et résumée dans ses thèmes fondamentaux, qui a bénéficié d'une diffusion de masse et a été inculquée méthodiquement au peuple allemand, a donné à la fois une impulsion, une orientation et une justification aux décisions qui ont conduit au génocide des Juifs d'Europe. Les historiens qui prennent au sérieux les facteurs idéologiques, et en particulier l'efficacité symbolique de la doctrine hitlérienne centrée sur un programme antijuif, sont souvent en même temps des partisans de la « route directe » vers Auschwitz, qui s'opposent à l'approche strictement fonctionnaliste illustrée par les travaux de Martin Broszat, Karl A. Schleunes, Hans Mommsen ou Norbert Frei, partisans de la « route tortueuse ».

À vrai dire, dans le monde des recherches savantes, la réaction contre les approches fonctionnalistes de l'histoire du Troisième Reich a débuté au cours de la dernière décennie du XXe siècle. Dans le modèle fonctionnaliste du régime nazi, notamment chez Schleunes ou Mommsen, l'hitlérisme n'avait plus de place. La « volonté du Führer » et sa doctrine, comme le visage et les discours du dictateur, s'effaçaient derrière le jeu des fonctionnements institutionnels. Le dictateur charismatique, réduit à n'être que le jouet de forces impersonnelles, n'était plus qu'un pion parmi d'autres, au point de devenir presque invisible dans le tableau de la sinistre famille. D'une façon générale, les aspects idéologiques étaient considérablement sous-estimés, et, chez certains auteurs, totalement négligés. Cet effacement de la dimension idéologique du nazisme se heurtait pourtant à des faits bien établis par certains historiens : les manuels scolaires du IIIe Reich, par exemple, en particulier les manuels d'histoire, furent rédigés suivant les consignes exposées par Hitler dans Mein Kampf. Et l'on ne pouvait pas nier l'existence ni l'importance prise par l'idéologie, la mythologie ou la « conception du monde » du Führer dans le régime nazi. Dès 1985, dans son livre important traduit en français en 1993, La Religion de la nature et le national-socialisme, l'historien américain Robert A. Pois a apporté la confirmation de cette importance, voire de cette centralité de la dimension idéologique. Avec d'autres, tel Caesar C. Aronsfeld, il venait prendre le relais des travaux pionniers de Werner Maser (Hitlers Mein Kampf, 1966) et de Eberhard Jäckel (Hitlers Weltanschauung, 1969). Si certains contemporains d'Hitler avaient cru pouvoir se passer de lire Mein Kampf, les historiens du IIIe Reich ne pouvaient pas se permettre de faire une telle impasse. En 1991, dans un article sur « la vision du monde de Hitler », Philippe Burrin notait à juste titre : « Les contemporains auraient dû lire Mein Kampf : tout y est indiqué des grandes directions qu'allait prendre l'avenir, lorsque l'auteur de l'ouvrage aurait en main les rênes de l'Allemagne. »

L'historien britannique Hugh R. Trevor-Roper (1914-2003), auteur des Derniers jours de Hitler (1947) et éditeur des « Propos de table » du Führer (Adolf Hitler's Secret Conversations 1941-1944, 1953), a lu dès 1938 Mein Kampf en allemand, à une époque où l'on ne prêtait guère attention à la composante doctrinale du nazisme. Quelques années avant sa mort, questionné par le journaliste et écrivain américain Ron Rosenbaum, auteur d'une enquête éclairante sur le conflit des interprétations concernant le cas Hitler (Explaining Hitler, 1998), Trevor-Roper est revenu sur cet épisode :

« Il [Hitler] avait élaboré un puissant et horrible message, une philosophie. Et qu'il prenait à l'évidence très au sérieux. Il n'était absolument pas, au contraire de ce que prétend Bullock, un aventurier. Hitler se prenait totalement au sérieux, c'est en tout cas ce qui ressort de Mein Kampf. Il se considérait comme un prodige tel qu'il n'en apparaît qu'un par siècle. Et, en le lisant en 1938, après avoir été en Allemagne, je ne pus qu'être frappé par le fait que Mein Kampf avait été publié en 1924, ou 1925, et qu'il avait fait exactement ce qu'il avait dit. Ce n'était donc pas de la blague. C'était tout ce qu'il y a de plus sérieux. »

C'est pourquoi, depuis les années 1990, s'est opéré un retour au texte hitlérien, lu et interprété avec toutes les ressources de l'érudition. Le créateur et le diffuseur de thèmes doctrinaux et de mythes que fut Hitler devenaient objets de recherche. Et le corpus des textes étudiés ne se limitait pas à Mein Kampf et au « Second Livre » (manuscrit inachevé rédigé en 1928, resté non publié jusqu'en 1961), il comprenait tous les discours publics du Führer, toutes ses conversations privées, ses fameux « Propos de table » ou « Libres propos », ses « Conversations secrètes », ses notes manuscrites, ou encore ses propos rapportés par des témoins plus ou moins crédibles, tels Hermann Rauschning, Otto Wagener, Otto Dietrich ou Édouard Calic - sans compter Joseph Goebbels, dans son Journal, instrument de travail indispensable. En 1995, non sans provocation, Lawrence Birken n'a pas hésité à titrer l'un de ses livres : « Hitler en tant que philosophe », et, en 2003, Ambrus Miskolczy a consacré une étude fouillée aux lectures faites par Hitler, à partir d'un inventaire de sa bibliothèque. Il a été suivi par le journaliste Timothy W. Ryback, auteur en 2008 d'une enquête sur la bibliothèque privée d'Hitler. Quant à David Redles, il a poursuivi ses travaux sur « l'idéologie raciale » de Hitler en les inscrivant dans une approche des croyances millénaristes et apocalyptiques qui, coexistant avec une « religion de la nature », constituèrent les fondements de la « religion politique » que fut le nazisme. Dans cette perspective, même si elles débordent le cas Hitler, il convient également de mentionner les recherches de Claus-Ekkehard Bärsch (Die Politische Religion des Nationalsozialismus. Die religiösen Dimensionen der NS-Ideologie in den Schriften von Dietrich Eckart, Joseph Goebbels, Alfred Rosenberg und Adolf Hitler, 1998), de Richard Steigmann-Gall (The Holy Reich : Nazi Conceptions of Christianity, 1919-1945, 2003) et de Karla O. Poewe (New Religions and the Nazis, 2006). S'il faut rompre avec le fonctionnalisme aveugle à l'idéologie et aux intentions des acteurs, tordre le bâton dans l'autre sens ne ferait pas faire un pas de plus dans la compréhension des phénomènes. Aussi convient-il de résister à la tentation de se contenter d'un intentionnalisme naïf, présupposant que l'on passe des convictions idéologiques aux actions réelles sans médiations imprévisibles, d'une façon nécessaire, linéaire, continue. Si penser, c'est toujours en même temps faire, il n'est pas de pensée qui soit programmée pour se réaliser nécessairement, il n'est pas non plus de pensée conduisant à un acte qui puisse se réaliser sans distorsions. De grands historiens du nazisme comme Saul Friedländer, Yehuda Bauer ou Christopher Browning ont montré que le paradigme intentionnaliste n'était pas voué à des mises en œuvres naïves ou simplistes, et qu'il pouvait inspirer des recherches qui ne sombrent pas dans telle ou telle forme de nécessitarisme historique.

Dans son grand livre sur « L'Allemagne nazie et les Juifs » paru en deux tomes (1997 et 2007), Saul Friedländer a clairement établi la centralité de l'antisémitisme « rédempteur » chez Hitler tout en montrant l'importance de l'idéologie antisémite chez les hauts dirigeants nazis. Il résume les résultats de ses recherches dans l'introduction du premier tome de son ouvrage :

« Pour toutes ses décisions majeures, le régime dépendait de Hitler, notamment lorsqu'il fut question des Juifs. En ce domaine, le Führer fut souvent motivé par des obsessions idéologiques bien différentes des prudentes man½uvres du démagogue qu'il était. Autrement dit, il cultiva, jusqu'à ses limites les plus extrêmes et les plus radicales, une variété toute particulière d'antisémitisme racial que j'appelle l'"e;antisémitisme rédempteur"e;. Cet "e;antisémitisme rédempteur"e; se distinguait des autres formes de haine antisémite très répandues dans l'Europe chrétienne, et aussi du fonds ordinaire de l'antisémitisme racial allemand et européen. C'est cette dimension rédemptrice, cette synthèse de frénésie meurtrière et d'objectif "e;idéaliste"e;, commune au Führer et au noyau dur du parti, qui amena la décision définitive de Hitler d'exterminer les Juifs. »

Dans son ouvrage paru en 2001, Rethinking the Holocaust, où il soumet à un examen critique les grandes hypothèses interprétatives avancées depuis une trentaine d'années sur la genèse de la « Solution finale », l'historien israélien Yehuda Bauer se situe clairement du côté des intentionnalistes, qui croient au rôle crucial de l'idéologie et des décisions prises par Hitler et les hauts dirigeants nazis : « Je pense, contrairement à beaucoup de mes collègues, que l'idéologie raciale antisémite des nazis est le facteur essentiel du glissement vers l'Holocauste. » Mais Bauer montre par ses travaux que le primat accordé à la causalité idéologique n'interdit nullement d'intégrer dans le modèle explicatif de la « Solution finale » les principaux facteurs retenus par les historiens fonctionnalistes, qui décrivent des structures ou reconstruisent des processus, mais ne posent jamais la question « pourquoi ? ». Pourquoi, par exemple, la bureaucratie allemande a-t-elle joué un rôle central dans l'extermination des Juifs d'Europe ? Raul Hilberg, auteur de l'un des grands livres pionniers sur la Shoah (The Destruction of the European Jews, 1961 ; nouvelle éd., 1985), s'est interdit de poser une telle « grande » question, à laquelle on risque en effet de n'apporter que de « petites » réponses. Position abstentionniste, qui peut paraître fort sage à première vue.  Mais elle implique d'assumer la position mystique du « sans pourquoi ». Peut-on s'en satisfaire ? Pourquoi s'arrêter devant la question « pourquoi ? ». Dès lors qu'on sait que les hommes agissent en fonction de ce qu'ils pensent (quelle que soit la manière dont ils pensent), et qu'ils ne peuvent penser que sur la base de ces systèmes de croyances et de représentations plus ou moins organisés qu'on appelle « idéologies », il convient de prendre en considération les motivations idéologiques des acteurs historiques. En historien scrupuleux, Bauer pose clairement le problème : « Si l'on accepte en règle générale l'importance de la bureaucratie et d'autres facteurs de modernité comparables, de même que l'impact des crises sociales, politiques et économiques, les meurtres de masse et l'intention d'exterminer le peuple juif en particulier auraient été impensables sans les directions fournies par une motivation et une justification idéologiques. L'idéologie est primordiale. » Ainsi que le montre l'évolution intellectuelle d'un Christopher Browning qui, ayant rompu avec le fonctionnalisme strict caractérisant ses premiers travaux, se présente lui-même désormais comme un « fonctionnaliste modéré », l'opposition entre les approches intentionnalistes et fonctionnalistes n'est pas absolue. L'oscillation n'est point fatale entre le fonctionnalisme aveugle et l'intentionnalisme naïf. Et, ici comme ailleurs, des débats et des controverses peuvent naître une meilleure compréhension de la réalité historique. Comme disait Bachelard, « la vérité est fille de la discussion, non de la sympathie ».

Un bref retour sur les quelques mois durant lesquels la Shoah fut mise en route suffira pour mettre en évidence le rôle déterminant joué par Hitler dans la conception et l'exécution de la « Solution finale ». Faisant écho aux déclarations d'Hitler qu'il avait entendues à Berlin quelques jours plus tôt, Hans Frank, de retour dans le Gouvernement général (Pologne), prononce un discours le 16 décembre 1941 où, s'adressant aux gouverneurs de districts et aux chefs de divisions, il aborde sans fard la « question juive » : « Nous devons en finir avec les Juifs, je veux le dire très ouvertement. (...) Nous devons détruire les Juifs [wir müssen die Juden vernichten], partout où nous les rencontrons et partout où c'est possible. » Frank n'est là que le porte-voix de la volonté du Führer. Dans son Journal, le 27 mars 1942, Joseph Goebbels ne cache pas son admiration devant la « force » qu'Hitler a  donnée selon lui au Troisième Reich pour « résoudre » la « question juive », et « résoudre cette question une fois pour toutes », sans reculer devant l'emploi de « méthodes plutôt barbares » : « Les Juifs subissent un châtiment qui est sans doute barbare, mais qu'ils ont pleinement mérité. (...) Dans ce domaine, il ne faut laisser aucune sentimentalité prendre le dessus. Si nous ne nous défendions pas, les Juifs nous anéantiraient. C'est une lutte à mort entre la race aryenne et le bacille juif. (...) Ici encore, le Führer est le champion inflexible et le porte-parole d'une solution radicale que les circonstances exigent et qui semble donc inévitable. » Après avoir cité ce passage dans son grand livre de 2004 sur « les origines de la Solution finale », Christopher Browning, prenant ses distances vis-à-vis de l'hyper- réductionnisme fonctionnaliste académiquement dominant, fait ce juste commentaire : « Dans la longue évolution de la politique nazie envers les Juifs vers la "e;solution finale"e;, Hitler n'a bien sûr pas été seulement "e;le champion et le porte-parole"e;, mais aussi le décideur indispensable et central. » Tout est dit, ou presque.

Il est un principe qui doit régir le travail de l'historien, ainsi formulé en 1969 par Eberhard Jäckel : « Tout ce qui a eu des conséquences historiques doit être analysé et compris objectivement, peut-être même plus encore lorsqu'il s'agit de ce qui est absolument répugnant. C'est cela qui est et demeure la tâche de la recherche historique.» Que ce principe soit d'abord d'ordre méthodologique n'exclut pas qu'il prenne en outre la valeur d'une obligation morale, impliquant un refus de toute censure fondée sur un code quelconque du « politiquement correct ». Face à Mein Kampf, l'application de ce principe me paraît devoir s'imposer. En 1961, dans l'avant-propos du tome II de son Histoire de  l'antisémitisme, Léon Poliakov faisait mélancoliquement allusion à « ces flots d'encre qui précédèrent ou qui suivirent les flots de sang ». C'est en partie avec l'encre de Mein Kampf qu'a été écrite l'une des plus sanglantes pages de l'Histoire universelle. Voilà ce qui est à penser : le devenir génocidaire d'un monde de représentations et de croyances articulées dans un livre. La tâche est redoutable.

On ne peut expliquer ni comprendre le phénomène nazi sans commencer par lire Mein Kampf, en s'aidant des rares commentaires disponibles de facture universitaire, tous lacunaires et insatisfaisants à tel ou tel égard, malgré la parution récente d'un certain nombre d'études historiques de qualité consacrées au livre-manifeste d'Hitler, tels les ouvrages respectifs, parus en 2006, de Barbara Zehnpfennig, Othmar Plöckinger et Felicity J. Rash. Mais il ne s'agit pas seulement d'expliquer et de comprendre. Theodor W. Adorno dans sa conférence de 1966, « Éduquer après Auschwitz », commençait par cette affirmation : « Exiger qu'Auschwitz ne se reproduise plus est l'exigence première de toute éducation. » La connaissance du phénomène nazi en constitue la condition nécessaire. Une connaissance du phénomène nazi tout entier comme stade suprême de la barbarie, sans en excepter le « génie du mal » qui lui a donné son idéologie et ses orientations génocidaires, animé par une haine absolue à l'égard de l'abstraction nommée « le Juif ». Et sans négliger le texte fondateur signé par celui qui fut l'instigateur de la « Solution finale », celui qu'avec le philosophe américain Berel Lang l'on est en droit de considérer comme un scélérat conscient, qui n'a pas craint de théoriser la déshumanisation systématique à laquelle il vouait ses ennemis et qui, loin d'incarner la « banalité du mal » décrite par Arendt, s'est montré terriblement imaginatif dans les moyens de réaliser son programme de déshumanisation. C'est pourquoi l'annonce d'une édition critique de l'unique livre publié par Hitler, à condition qu'elle soit établie par les meilleurs spécialistes internationaux de l'hitlérisme, doit être reçue comme une bonne nouvelle. Sur un épisode d'une telle importance dans l'Histoire du XXe siècle, sur cette catastrophe sans précédent, on ne saurait plus longtemps considérer que l'ignorance est un argument, ni que le savoir approximatif est suffisant.

 

Pierre-André TAGUIEFF

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16 juillet 2010 5 16 /07 /juillet /2010 05:54

 

by Baron Bodissey

 

It seems that Geert Wilders and the Alliance to STOP Sharia are on the same wavelength. Mr. Wilders — the “maverick”, as the AP calls him — is launching a new international initiative:

Wilders to launch international anti-Islam group

THE HAGUE, Netherlands — Maverick Dutch lawmaker Geert Wilders says he is launching an international “freedom alliance” to spread his anti-Islam message across the West.

He told The Associated Press in an interview Thursday he will launch the international movement late this year, initially in five countries: the United States, Canada, Britain, France and Germany.

Wilders, who calls Islam a “fascist” religion and wants an end to immigration from Muslim nations to the West, has seen his support in the Netherlands soar in recent years.

His Freedom Party won the biggest gains in a national election last month, coming third with 24 seats, up from the nine his party held in the last parliament.

Wilders is due to stand trial in October on hate speech charges.


Monday, July 12, 2010

 

The Alliance to STOP Sharia

 

by Baron Bodissey

Counterjihad Zurich 2010


Last month’s Counterjihad meeting in Zurich was a milestone for several reasons, one of them being the participation of a substantial contingent of French delegates. Gandalf
*, who has appeared several times previously at Gates of Vienna and blogs at Vérité, Valeurs et Démocratie, gave a presentation on his proposed Alliance to STOP Sharia.

In the wake of the meeting a group of people from a number of European countries (plus the United States and Canada) began preparations for the launch of the Alliance to STOP Sharia as an umbrella group that can apply anti-sharia strategies across the entire West.

Countries with secularism written into their constitutions encounter a problem with any official effort to oppose Islamization. How can Islam be stopped when the state is enjoined not to interfere in religious affairs? In particular, the constitutions of France and the United States forbid any state meddling with religions. We Americans have the Establishment Clause of the First Amendment, and the French have an official policy of laïcité — the complete removal of religious matters from the purview of the government.

The Alliance, however, is completely unconcerned with Islamic religious beliefs — as far as it is concerned, Muslims may believe whatever they want. Instead, the focus is on Sharia, or Islamic law.

Last week Gates of Vienna interviewed Gandalf about the reasoning and methodology behind the planned alliance.

Alliance to STOP Sharia


Q: You say that you do not take issue with Islamic beliefs or religious doctrines, but only with the body of law known as Sharia. Could you please explain the reasons for your focus on Sharia?

A: Well, let’s begin with Islamic beliefs and religious doctrines. We cannot take issue with someone’s beliefs for the simple reason that we are respectful of their human rights. In a democratic society you have the right to believe what you want; it’s as simple as that. Let me add that having issues with what’s inside your neighbour’s brain seems a very unproductive way of spending your time.

Sharia is an entirely different matter, Sharia in an occidental society is of a political nature (politics being the thing that rules society). In a Muslim society Sharia is of religious essence but we are not in a Muslim society, and we don’t have to consider their weltanschaaung in this matter.

Some people pretend to introduce something they consider as a body of laws into our society. Laws regulating individual and collective behaviour, morals, clothing, food, justice, matrimonial relations, sexual life, inheritance, citizenship status, and even what you are allowed to believe or not believe. Laws voted by nobody, laws absolutely incompatible with the principles of democracy, laws violating each and every human right you can think of, laws rejecting our basic civilisationnal concept of human dignity, and you ask why we focus our concerns on the Sharia?

Let me return your question by asking this: why hasn’t everyone in our democratic countries focused yet on the Sharia problem we are facing today?

Some clever souls say that it only concerns Muslim people, why should we care?

What is a Muslim? A new kind of citizen having different rights and obligations? A new kind of citizen denied the benefits of his constitutional rights, of his basic human rights — especially if this Muslim person is a woman?

We don’t know what a Muslim is, and to be really honest, we don’t care. But we know what a free citizen is and we know what Sharia does to people: it enslaves them in a degrading servitude. Sharia is mental slavery, that’s why we take issue with it.

Q: So, if I understand you correctly, you are completely opposed to any application of Sharia law, because it violates our human rights as well as our constitutions?

A: My answer will be yes and no.
- - - - - - - - -
Yes, we are completely opposed to any kind of individual or collective behaviour (note that we are speaking of behaviour, not beliefs) promoting a political system which is non-democratic and incompatible with our citizens’ constitutional and human rights. Actively promoting a non-democratic political and social system in our society is called subversion. This is an offence.

Acceptable prayer


Teaching children and citizens that they cannot use their constitutional liberties and that they have to obey a foreign law — however small this obligation might be — is intolerable. There is no such thing as a parallel law beside our own, and our opinion is that everyone who is trying to enforce a foreign law in our country, even when hiding behind a religious façade and seemingly harmless behaviours, must be stopped.

Let’s take an example to be very clear: Ramadan. It seems to be an inoffensive custom, festive and convivial — right?

Wrong: Ramadan is an obligation dictated by the Sharia. As such, if you don’t respect it, you become a kafir (a non-Muslim kind of sub-human). In an Islamic society (ruled by Sharia) you can go to jail or be mobbed by your neighbours because “you insult Islam” simply by eating or drinking something during this period.

And in a not-yet Islamic society Ramadan applies a very strong social pressure on individuals daring to take liberties with the strictures of Sharia. Our citizens of Muslim faith are suffering from that “innocent and festive custom” which allows for the counting of heads and the stigmatization of those who hope to live a free life.

Sharia victims who have internalized the rules they must obey just think it’s the “normal” way of doing things. Uneducated people just see the feast and the pastries, but it’s Sharia law, no more and no less than the stoning of women for adultery and amputation of thieves’ hands.

Sharia is a “package”; you cannot pick what you fancy and forget about the rest. That’s what we do with religions in a democratic society, but please remember that Sharia is outside the realm of democracy and outside the Western definition of civilisation.

What we see now of Sharia seems mostly harmless — halal food, a publicly displayed dress code, etc. — but it’s strongly linked with all the ugly content we don’t want to look at. Accepting one step is calling for the next. If you don’t want to go to the cellar why start to descend the stairs?

The “no” part of this answer concerns what people think is non-harmful in Sharia, wearing distinctive outfits, eating special food, building mosques, etc. In themselves each of those actions is not significant — outfits, food, buildings, what is the problem?

If there were no connection with Sharia, we would take no issue with all of that. We have no problem with Islam as a religion.

But at the present day, wearing Sharia-compliant clothing is an ostentatious sign of submission, and as such an open promotion of Sharia, a social conquest flag. Consuming halal food is another sign of submission, and a financial contribution for more Sharia in the society. And, in the mosques appearing in our towns, Sharia is often openly taught as a behavioural norm to our citizens, to defenceless children, to our neighbours.

So yes, we are definitely opposed to any application of Sharia law, any teaching of it and we believe confidently that if enough people raise their voices to demand efficient policies against Sharia, our representatives will forget their fears and will do what we elected them to do: protect our nations and our democracy.

Q: You seem to assert that a ban against Sharia will be a force for the liberation of Muslims, as well as for non-Muslims. Is this correct ?

A: Absolutely! In a democratic country each citizen is granted a full array of rights and liberties, he has the right to live his life as a free human being provided that he doesn’t threaten others’ right and liberties.

Why should we tolerate that Sharia preachers/activists actively work at the destruction of our neighbours’ rights and liberties by indoctrination, social pressure, and more often than not physical violence?

The “Muslim community” (umma) is a Sharia-derived concept binding individuals in a “community” with specific customs and obligations (sharia law). This concept has absolutely no validity — either you are a citizen or you are not; all the rest is irrelevant.

A total ban on Sharia will help to protect citizens of Muslim faith from those who insidiously try to bind them to the Sharia’s mental slavery. Our democratic societies are offering the fabulous gift of freedom to every citizen of Muslim faith willing to accept it. It’s our collective duty to maintain the conditions allowing our citizens to break the yoke of an alien and barbaric law.

Getting rid of Sharia will protect us too, because Sharia concerns non-Muslims too.

Sharia heavily promotes discrimination, hatred, deception, and violence against non-Muslims, kuffar. Sharia creates social unrest and tensions leading to urban semi-insurrectional situations when mixed with social and immigration issues.

Everyone will enjoy a better life without Sharia, everyone.

Q: Your program makes complete sense. However, our countries already have in place constitutions and laws that are antithetical to sharia. What strategy do you propose to persuade our leaders to reject Sharia explicitly? How will you compel them to enforce existing prohibitions against such undemocratic laws?

A: To answer this question some things need to be explained first.

It’s exact: our countries already have constitutions and laws that are antithetical to sharia. This simple fact should shelter us from any attempt to introduce sharia in our societies. In theory yes, but the reality is very different, as we all can see.

Why?

Information. The western democracies are suffering from a grievous lack of information.

  • We are at war and we don’t even know it (remember that jihad against non-Muslims is a holy duty for everyone obeying sharia).
  • We face a political ideology and we don’t even know it (most people are still mentally stuck in a “clash of civilizations”, a “religious conflict” or a “racism-related” problem).
  • We can see symptoms of the growing influence of sharia and we can’t identify them as such (scarves, halal food, a withering of freedom of speech due to a latent climate of threatening and violence around sharia-related subjects, etc…).


We just don’t know what we are facing. Most people don’t know what sharia is, nor anything about its relations with the fundamental texts of Islam.

Ask around — how many people do you know who have read the Koran and the hadith or know what sharia is and what it is not?

People don’t know what sharia is. Most Muslims in our countries don’t know either, by the way. And our leaders? Why should they know better? Because you voted for them? Think twice…

This is the root of the problem: our societal inability to detect the presence of sharia and to analyze the threat it represents to our democratic societies.

Once educated about the sharia and its dangers, our leaders will be able to defend the nation against it.

At this point comes the answer to you question.

How to persuade our leaders to put the name “sharia” on our problem?

How will we compel them to enforce prohibitions against sharia?

Information is the answer. Once you know what sharia is and how to recognize it when you see it, you know what to do.

We’ll show people and leaders what sharia is and how it has already crept stealthily into our streets, where it is rapidly growing if not strongly challenged.

And when you know what sharia is, trust me, you know that you don’t want it in your country, never.

And at this point if enough of us raise our voices to say “Stop sharia now!” our leaders will hear their electors.

And if they don’t, they won’t remain our leaders much longer. Democracy is not that bad a system, you know — once people understand that their leaders are truly blind and deaf to the needs of their nation, they kick them out.

Truth about sharia: that’s our strategy. Truth is our weapon; we don’t need anything else.



*   Not to be confused with the British blogger Gandalf, who runs the Counterjihad site Up Pompeii.


This interview was originally published in four installments at Big Peace.

 

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Au siège de Vienne en 1683 l'Islam semblait prête à envahir l'Europe chrétienne. Nous sommes dans une nouvelle phase d'une guerre très ancienne.

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24 juin 2010 4 24 /06 /juin /2010 12:41

"La nature d'une civilisation, c'est ce qui s'agrège autour d'une religion. Notre civilisation est incapable de construire un temple ou un tombeau. Elle sera contrainte de trouver sa valeur fondamentale, ou elle se décomposera."

"C'est le grand phénomène de notre époque que la violence de la poussée islamique. Sous-estimée par la plupart de nos contemporains, cette montée de l'islam est analogiquement comparable aux débuts du communisme du temps de Lénine. Les conséquences de ce phénomène sont encore imprévisibles. A l'origine de la révolution marxiste, on croyait pouvoir endiguer le courant par des solutions partielles. Ni le christianisme, ni les organisations patronales ou ouvrières n'ont trouvé la réponse. De même aujourd'hui, le monde occidental ne semble guère préparé à affronter le problème de l'islam. En théorie, la solution paraît d'ailleurs extrêmement difficile. Peut-être serait-elle possible en pratique si, pour nous borner à l'aspect français de la question, celle-ci était pensée et appliquée par un véritable homme d'Etat. Les données actuelles du problème portent à croire que des formes variées de dictature musulmane vont s'établir successivement à travers le monde arabe. Quand je dis "musulmane", je pense moins aux structures religieuses qu'aux structures temporelles découlant de la doctrine de Mahomet. Dès maintenant, le sultan du Maroc est dépassé et Bourguiba ne conservera le pouvoir qu'en devenant une sorte de dictateur. Peut-être des solutions partielles auraient-elles suffi à endiguer le courant de l'islam, si elles avaient été appliquées à temps. Actuellement, il est trop tard! Les "misérables" ont d'ailleurs peu à perdre. Ils préféreront conserver leur misère à l'intérieur d'une communauté musulmane. Leur sort sans doute restera inchangé. Nous avons d'eux une conception trop occidentale. Aux bienfaits que nous prétendons pouvoir leur apporter, ils préféreront l'avenir de leur race. L'Afrique noire ne restera pas longtemps insensible à ce processus. Tout ce que nous pouvons faire, c'est prendre conscience de la gravité du phénomène et tenter d'en retarder l'évolution".

André Malraux, 3 juin 1956, Valeurs actuelles, n° 3395

  DRZZ


Nouveau en Turquie: la politique médiatique islamiste modérée

En avril dernier, une organisation gouvernementale turque, le Tasarruf Mevduatı Sigorta Fonu (TMSF), ou Fonds de garantie de dépôts, confisqua Sabah-atv, le deuxième groupe médiatique du pays (trois quotidiens, deux chaînes TV, une série de magazines et une société de distribution), pour le revendre.

La presse turque annonce ce matin (via MEMRI) que c’est chose faite, après que tous les candidats sauf un se soient retirés. L’heureux nouveau proprétaire est donc la société Calik Holding, qui opère dans le textile, la construction, la finance et l’énergie. Calik a énormément profité, ces dernières années, d’un grand projet gouvernemental, le pipeline Samsun-Ceyhan, qui lui a été attribué sans mise au concours. Son directeur général, Berat Albayrak, 26 ans, est le gendre du premier ministre Recep Tayyip Erdoğan.

Sabah-atv est le troisième groupe médiatique turc qui passe en des mains proches de l’AKP de cette manière.

Voir aussi:
Nouveau en Turquie: le «suicide d’honneur»

Nouveau en Turquie: l’égalité islamiste modérée

Nouveau en Turquie: l’adoption islamiste modérée

Nouveau en Turquie: la poupée islamiste modérée

Scènes de la Turquie islamiste modérée

À quoi pensent les «islamistes modérés»?

La parole du prophète au coin de la rue


Combien avez-vous donné pour détruire la démocratie, cette semaine?

L’UNRWA, l’«Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient», la plus grande agence des Nations Unies (et de loin: plus de 25.000 employés, dont 99% de Palestiniens), qui se charge notamment d’éduquer les petits Palestiniens (70% du personnel dans le secteur éducatif), c’est-à-dire les enfants, petits-enfants, arrière-petits-enfants et arrière-arrière-petits-enfants des quelques centaines de milliers d’Arabes qui ont été déplacés de quelques kilomètres pendant les affrontements de 1947-1948, fait appel à la générosité des nations pour équilibrer son budget de 2008.

À elle seule, la Suisse a offert plus de trois fois plus d’argent (11 millions de CHF) que la somme ($3.085.000) des promesses des gouvernements de Turquie ($500.000), du Bahreïn ($50.000), des Émirats Arabes Unis ($1.000.000), du Koweït ($1.500.000), d’Oman ($25.000) et d’Égypte ($ 10.000). Les principaux contributeurs sont les États-Unis ($90.000.000) et la CE (€66.000.000).

Il faut croire que les Américains et les Européens se sentent plus proches des «réfugiés» palestiniens que leurs voisins arabes. Et ce n’est pas nouveau, les gouvernements arabes se sont toujours montrés très réservés (c’est le moins qu’on puisse dire) à leur égard, comme le rappelait récemment Bernard Lewis:

Le gouvernement jordanien a accordé une forme de citoyenneté aux Arabes palestiniens, mais il les a gardés dans des camps de réfugiés. Dans les autres pays arabes, ils sont devenus et restent à ce jour des apatrides sans droits ni perspectives, entretenus par les fonds des Nations Unies. Paradoxalement, les Palestiniens qui ont fui en Grande-Bretagne ou aux États-Unis ont pu s’y faire naturaliser passé un délai de cinq ans, et leurs enfants nés sur place y étaient des citoyens légitimes dès leur naissance. Mais en Syrie, au Liban ou en Irak, les réfugiés palestiniens et leurs descendants restent des apatrides, maintenant pour la quatrième ou la cinquième génération.

Pourquoi?

La raison de cette situation a été mentionnée par plusieurs porte-parole arabes. Il s’agit de la nécessité de préserver les Palestiniens comme une entité séparée jusqu’à qu’ils puissent revenir et revendiquer la totalité de la Palestine, c’est-à-dire l’entier de la Cisjordanie, de la bande de Gaza et d’Israël.

La Suisse vient de promettre 11 millions de francs de plus pour le soutien de l’effort d’annihilation de la seule démocratie du Moyen-Orient.

Et la semaine est loin d’être terminée: Mahmoud Abbas vient d’annoncer qu’il demanderait un doublement de l’aide de la communauté internationale d’ici 2010, pour un total de 5,8 milliards de dollars.


La publication du dernier rapport du renseignement américain – lequel indique que l’Iran aurait suspendu ses efforts d’armement nucléaire en 2003 – est largement considérée comme une victoire pour l’Iran et une preuve que l’administration Bush a exagéré la menace nucléaire iranienne et que la Maison Blanche s’est montrée trop sceptique envers la diplomatie.

Mais c’est oublier que ce rapport confirme que l’Iran a menti au monde entier et sciemment trompé des hordes de diplomates sur son programme d’armement nucléaire, en fait bien réel jusqu’en 2003. Comme le relève Michael Rubin ce matin (je traduis):

Le 4 août 1997, Khatami déclara: «Nous sommes favorables à un dialogue entre les civilisations et à une détente dans nos relations avec le monde extérieur.» Les diplomates européens, les universitaires américains et même la sectétiaire d’État Madeleine Albright l’applaudirent. Les hommes d’État auropéen lui ouvrirent les portes de leurs palais et le président iranien devint le toast favori de Rome, Paris et Londres.

En fait, pour encourager les promesses de réforme de Khatami, l’Union européenne tripla presque son volume d’échanges avec l’Iran, ce qui apporta un puissant élan à la République islamique. Mais, au lieu de s’intégrer dans la famille des nations, Khatami et les dirigeants théocratiques qu’il servait investirent leur argent dans un projet secret de bombe nucléaire. Le [rapport] prouve une fois pour toutes que toutes les offres de dialogue de Khatami n’étaient guère qu’un rideau de fumée. [...]

Les rapports de l’AIEA confirment bien l’étendue du subterfuge iranien. Alors que leurs leaders clamaient que leur programme n’avaient que des objectifs pacifiques, en 2003, les inspecteurs trouvèrent des traces d’uranium métallique, un élément central dans le développement d’armes nucléaires mais sans utilité pur un projet civil, dans leurs centrifugeuses. Une année plus tard, l’AIEA découvrit que l’Iran avait fait des tests avec du polonium 210, un élément utilisé pour démarrer la réaction en chaîne conduisant à la détonation d’un bombe nucléaire.

Et si l’Iran a bien abandonné la fabrication maison d’armes nucléaires en 2003, ce qui n’est pas encore établi (on parle juste d’une suspension), rien n’indique qu’il a renoncé à utiliser celles pouvant lui être livrées par des scientifiques corrompus russes, pakistanais ou libyens. La fourniture supposée par la Corée du Nord à la Syrie d’un site de développement nucléaire dont on a beaucoup parlé en septembre dernier consolide cette hypothèse. Et c’est pourquoi,

Hier, Bush déclara que «[le rapport] ne fournit aucun élément qui puisse me faire changer d’avis sur le danger que l’Iran fait peser sur le monde, bien au contraire». Certains autres politiciens feraient bien de tirer la leçon de leurs erreurs au lieu [...] de se préparer à les répéter.


Pas d’Islam sans profanation barbare

La dernière et sans doute la plus grotesque en date des tentatives d’intimidation de l’Occident par des islamistes s’inscrit, comme le relevait Daniel Pipes l’an passé, dans une série qui va en s’accélérant :

  • 1989 – le roman de Salman Rushdie Les Versets sataniques incite l’ayatollah Khomeiny à émettre un arrêt de mort contre lui et ses éditeurs sous le prétexte que l’ouvrage est «opposé à l’Islam, au prophète et au Coran»; les émeutes qui s’ensuivent font 20 morts, essentiellement en Inde.
  • 1997 – la Cour suprême des États-Unis refuse de supprimer une frise de sa principale salle d’audience réalisée dans les années 1930 et montrant Mahomet en législateur; le Conseil des relations américano-islamiques monte l’affaire en épingle, provoquant des émeutes et des blessés en Inde.
  • 2002 – le leader évangélique américain Jerry Falwell qualifie Mahomet de «terroriste», à la suite de quoi des églises sont brûlées et au moins dix personnes perdent la vie en Inde.
  • 2005 – un article erroné de Newsweek prétendant que des enquêteurs américains de Guantanamo Bay «jetèrent un Coran aux toilettes afin d’ébranler des suspects» est pris au vol par le fameux joueur de cricket pakistanais Imran Khan et déclenche des protestations dans le monde musulman qui coûtent la vie à au moins 15 personnes.
  • Février 2006 – le quotidien danois Jyllands-Posten publie douze caricatures du prophète Mahomet dont se sert un imam palestinien de Copenhague, Ahmed Abdel Rahman Abu Laban, pour dresser l’opinion musulmane contre le gouvernement danois. Il réussit si bien que des centaines de gens perdent la vie dans les troubles qu’il provoque, pour l’essentiel au Nigeria.
  • Septembre 2006 – le pape Benoît XVI cite l’avis d’un empereur byzantin selon lequel l’Islam n’a rien apporté de nouveau sinon «des choses mauvaises et inhumaines», déclenchant l’usage de bombes incendiaires contre des églises et le meurtre de plusieurs Chrétiens.

Il est intéressant de mettre ces réactions en relation avec les actes de profanation commis par des Musulmans. Un ouvrage récent d’Aaron Klein, Schmoozing with Terrorists, en fait le compte (je traduis):

En 2002, des terroristes du Fatah fuyant un raid israélien se réfugièrent dans l’Église de la Nativité, à Bethlehem – le lieu supposé de la naissance de Jésus – où ils prirent des nonnes et des prêtres en otages et restèrent terrés pendant 39 jours. Après la fin du siège, de nombreux reportages, y compris des films, montrèrent l’état désastreux de l’Église de la Nativité. Un prêtre catholique romain pris en otage indiqua au Washington Times que des bibles avaient été détruites et les pages arrachées pour servir de papier de toilette. (…)

Quand Israël évacua les communautés juives de la bande de Gaza en 2005, il laissa sur place 20 synagogues, intactes, car la loi juive interdit de détruire les bâtiments sacrés. Immédiatement après l’évacuation, des foules de Palestiniens détruisirent la plupart des synagogues de Gaza, y compris deux grandes synagogues à Neve Dekalim, la principale communauté juive de Gaza. (…)

En 2000, lorsque les Israéliens évacuèrent la zone située hors de la ville de Naplouse, la Shechem biblique, en Cisjordanie, a eu lieu ce que Klein appelle la «plus ignoble des profanations de lieux saints de l’histoire récente». Alors, des Palestiniens s’emparèrent de la tombe de Joseph, le troisième lieu le plus saint du Judaïsme, situé dans la zone du retrait des Israéliens. Cette tombe est considérée comme la sépulture du patriarche biblique Joseph, le fils de Jacob, qui a été vendu comme esclave par ses frères et qui devint plus tard le vice-roi d’Égypte.

Selon les reportages, moins d’une heure après le retrait des Israéliens, des Palestiniens prirent d’assaut la tombe de Joseph et commencèrent à la saccager. Des foules de Palestiniens déchirèrent des livres, détruisirent des chaires et des statues de pierre disposées dans le tombeau. Les Palestiniens fixèrent une bannière islamique sur la tombe, en peignirent le dôme en vert – la couleur de l’Islam – et, plus tard, transformèrent l’école du site en une mosquée.

Il faut également se souvenir, pour rester dans l’histoire récente, des Bouddhas détruits par les talibans et des églises chrétiennes des territoires palestiniens et du Kosovo. Si les adeptes d’autres religions réagissaient comme les Musulmans, où en serions-nous?

Certains diront qu’il s’agit seulement d’extrémistes, de bandits, de foules en colère, et pas de pieux Musulmans. Peut-être. Mais c’est là un phénomène qui accompagne la pratique de la religion islamique partout où apparaissent des clivages quelconques, également au sein de l’Islam: des émeutes, des massacres, des opérations de pillage, des manifestations de haine aveugle contre toutes les autres religions (ou autres groupes islamiques). Comme au temps du prophète. Et la religion islamique accompagne ou nourrit beaucoup d’autres choses encore:

Ce n’est pas par hasard et ce n’est pas comparable aux excès des religions «normales». Le problème de l’Islam se situe non pas à la périphérie, mais au coeur même de la religion.  


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23 juin 2010 3 23 /06 /juin /2010 03:28
Spéciale 18 juin - Chronique d'une défaite annoncée

La défaite de 1940

     


 Juin 1940 : c’était il y a soixante-dix ans. La France subissait une sévère défaite face aux armées allemandes. Cette débâcle allait entraîner la mort de la IIIe République et l’instauration d’une dictature. Nous avons l’occasion d’aborder cet événement historique en remettant en cause quelques idées reçues. La défaite française n’était pas inévitable, loin de là, d’autant que, côté allemand, la victoire fut obtenue d’extrême justesse. Le blitzkrieg n’a jamais été, pendant la guerre, le succès que l’on imagine. Par ailleurs, les forces alliées ont fait jeu égal avec celles des Allemands, ces dernières n’étant motorisées qu’en minorité. Mais juin 1940, c’est aussi l’appel du général de Gaulle. Juin et juillet 1940 marquent donc aussi la naissance de deux France : celle de l’Etat français, de Vichy, Pétain et de sa dictature et de la collaboration ; et celle des Français libres.


 

 

La défaite de 1940-copie-1Il y a 70 ans, le 22 juin 1940, la France signait l’armistice avec l’Allemagne qui avait remporté une bataille rapide. La défaite française s’explique à la fois par des erreurs monumentales du commandement mais aussi par une très grande audace des Allemands qui ont remporté la victoire de justesse. Cette défaite marquait le début de la fin de la IIIe République… Il y a 70 ans aussi, l’appel du général de Gaulle montrait que des Français refusaient la défaite et étaient prêts à continuer le combat jusqu’à la libération du pays. Juin 1940, ce fut aussi la naissance de la France libre.

 

 

Les ravages du pacifisme

 

 

Replaçons d’abord la bataille de France de mai et juin 1940 dans son contexte historique. À partir de 1934, le rejet par Adolf Hitler de l’ordre européen issu des traités de paix de 1919 et 1920 [1] se traduit par une succession de coups de force, de 1936, date d’occupation de la Rhénanie, à mars 1939, date de l’annexion de la Tchécoslovaquie, en passant par l’Anschluss – le rattachement de l’Autriche à l’Allemagne – en 1938. La dernière crise, celle qui va aboutir à la Seconde Guerre mondiale, concerne le corridor de Dantzig, en Pologne, qui coupe l’Allemagne en deux. En avril 1939, Hitler revendique ce territoire. Des négociations sont engagées en juillet entre l’Union soviétique et et les Franco-britanniques mais elles butent sur le problème du passage des troupes soviétiques en Pologne et en Roumanie. Le 17 août, Staline accepte la demande par l’Allemagne de conclure un traité de non-agression. Le 23 août, le pacte est signé entre Ribbentrop, ministre des Affaires étrangères allemand, et Molotov, son homologue russe. Le 1er septembre, la crise prend fin par l’invasion allemande de la Pologne qui marque le premier jour de la Seconde Guerre mondiale.

 

En septembre 1939, sur le plan géopolitique, la France aborde le conflit en position de faiblesse. On vient de le voir, l’alliance entre l’URSS et l’Allemagne permet à cette dernière d’avoir les mains libres à l’ouest, contrairement à ce qui s’était passé pendant la Première Guerre mondiale. La France ne bénéficie donc pas d’une alliance de revers. Par ailleurs, la neutralité de la Belgique et le rapprochement entre l’Italie de Mussolini et l’Allemagne font que les Français ne peuvent compter que sur le soutien de la Grande-Bretagne.

 

Enfin, d’autres éléments sont à prendre en considération pour comprendre la défaite. Les ravages du pacifisme, d’abord, font préférer un rapprochement avec le nazisme plutôt qu’une politique de fermeté : en témoigne la passivité des démocraties, en 1936, quand Hitler remilitarise la Rhénanie avec quelques troupes seulement… La Grande-Bretagne, jusqu’en mars 1939, refuse de répondre par la force aux provocations hitlériennes. Les prises de position idéologiques jouent un grand rôle également : la peur du communisme pousse la droite à dénoncer l’alliance avec l’URSS dans les années 1930. L’opinion se divise entre, d’une part, pacifistes et bellicistes, et, d’autre part, entre anticommunistes et antifascistes. Mais face au dernier coup de force nazi en Pologne et en vertu d’un traité d’alliance avec la Pologne, la France et la Grande-Bretagne doivent entrer en guerre. Le même jour, la France mobilise. Le lendemain, la Chambre vote les crédits de guerre. Le 3, elle déclare la guerre à l’Allemagne. Pourtant, même si le pacifisme des années 1930 a fait des dégâts, dans l’ensemble, l’armée française ne connaît que peu de désertions. En réalité, l’opinion publique est résignée, d’autant plus que le danger n’est pas ressenti comme immédiat puisque l’attaque allemande concerne la Pologne, un pays éloigné. Ceci dit, chez les Allemands, la même résignation existe. Eux aussi se souviennent de la Grande Guerre, eux aussi ont souffert énormément à Verdun. Le journaliste américain William Shirer relate l’abattement sur les visages des Berlinois quand ils apprennent la déclaration de guerre [2].

 

Les premiers mois du conflit entre la France et l’Allemagne se passent sans combats : c’est ce qu’on appelle la « drôle de guerre ». Une offensive symbolique a été lancée en Sarre, constituée de coups de main et de reconnaissances. Mais dès octobre, les troupes sont rétrogradées derrière la ligne Maginot. Par ailleurs, la France et la Grande-Bretagne imposent à l’Allemagne un blocus maritime. Pour affaiblir encore leur ennemi, les deux pays lancent une offensive visant à s’emparer des mines de fer de Suède ou, au moins, à couper la route du fer à l’Allemagne. C’est la campagne de Norvège en avril et mai 1940. La vie politique française est marquée par l’affrontement entre partisans et adversaires de la guerre. Pour les communistes, qui sont aux ordres de Moscou et donc inféodés à une alliée des nazis, la guerre est « impérialiste », il ne faut donc pas y prendre part.

 

Mais la France et son alliée ont les moyens de mener la guerre. Quelles sont, en effet, les forces en présence ? La France et la Grande-Bretagne font jeu égal avec les Allemands. Du côté allié, trois mille chars sont disponibles face aux 2440 allemands. Cent divisions alliées doivent se battre face aux cent-trente cinq divisions allemandes. Au total, cinq millions de Français et un million cinq cent mille Britanniques sont mobilisés contre trois millions cinq cent mille Allemands. En ce qui concerne les forces aériennes, par contre, les Alliés opposent 1450 avions aux 2590 appareils allemands, dont leurs 340 célèbres stukas. Mais les efforts de réarmement déployés par le Front populaire sont réels. La défaite française n’est pas annoncée sur ce plan-là. Quant au réarmement allemand, il s’est heurté à trois problèmes : le risque d’inflation, le manque de matières premières et l’insuffisante coordination de l’économie.

 

La vraie différence ne réside donc pas dans les moyens proprement dits mais dans leur utilisation. Les stratégies sont en effet radicalement différentes. La France donne le primat à la défensive, à la sanctuarisation du territoire national. Pour elle, il ne s’agit pas d’entreprendre une guerre de conquête. De la Suisse jusqu’aux Ardennes, une ligne de fortifications, la ligne Maginot, achevée en 1935, doit contenir l’ennemi en épargnant le plus de vies possibles : il faut éviter une réédition des effroyables massacres de 1914-1918. Par ailleurs, les plans Dyle et Breda prévoient qu’en cas de violation de la neutralité belge – qui était envisagée par l’Etat-major – des troupes françaises se porteront en avant. Enfin, une éventuelle contre-offensive, « le moment venu », préparée à l’abri de la ligne Maginot, n’est pas exclue. Mais le schéma tactique français comporte de sérieuses faiblesses. D’abord, les chars ne sont pas utilisés au mieux puisqu’ils en sont réduits à n’être que des supports à l’infanterie et sont dispersés dans les différentes unités alors qu’ils devraient être concentrés dans des unités spécifiques, comme le colonel de Gaulle l’avait souhaité en 1934 dans son livre Vers l’armée de métier. Ensuite, l’aviation est le parent pauvre de l’armée, cantonnée à un strict rôle d’observation. Par ailleurs, la ligne Maginot laisse un trou béant dans les Ardennes. Enfin, l’instruction des conscrits n’est pas très bonne. Toute la classe militaire était donc nourrie des théories défensives héritées de 1914-1918.

 

Les Allemands, eux, ont une conception tactique radicalement opposée. Ils privilégient l’offensive dans le but de gagner du temps. Néanmoins, il ne s’agit pas d’un blitzkrieg théorisé. Au départ, Hitler pense à rééditer le plan Schlieffen de 1914, c’est-à-dire de déborder les Français en violant la neutralité belge. Mais en janvier 1940, les services secrets alliés apprennent que les Allemands projettent de passer par la Belgique, ce qui pousse l’Allemagne à réviser ses plans. Aussi prête-t-on attention aux idées du général von Manstein. Celui-ci préconise un assaut dans les Ardennes en menant deux attaques : la première doit mener vers l’embouchure de la Somme afin d’envelopper toute l’aile nord ennemie ; la seconde, à partir de Sedan, doit se diriger vers le sud. En même temps, une première offensive devrait être lancée en Belgique pour faire diversion et ainsi attirer et piéger les forces alliées.

 

 

La victoire allemande : un « miracle »

 

 

La bataille commence le 10 mai 1940 avec l’offensive allemande. Deux groupes d’armées ont été constitués. Le groupe d’armées A, commandé par Rundstedt, s’avance vers Sedan à travers la Belgique et le Luxembourg. Le groupe d’armées B, sous les ordres de von Bock, envahit la Belgique et les Pays-Bas. Les aérodromes français du nord, belges et néerlandais sont bombardés. Le 15 mai, les Pays-Bas capitulent. Dès le début de l’attaque, le commandant en chef des forces alliées, le général Gamelin, déclenche les opérations Dyle et Breda qui parviennent à freiner, avec beaucoup de difficultés, l’avance allemande le 14 mai sur la ligne Anvers-Louvain. L’avantage est de bénéficier d’une profondeur stratégique pour une éventuelle contre-attaque. Mais Gamelin commet l’erreur de déplacer la VIIe armée entre Lille et Dunkerque : il trahit ainsi la doctrine française car il va à la rencontre de l’ennemi au lieu de s’en tenir à la défensive. En outre, peu d’unités gardent le secteur des Ardennes : 18 divisions seulement attendent les 45 divisions allemandes.

 

Le 13 mai, les Allemands franchissent la Meuse entre Sedan et Dinant. Le 15, la percée est faite en quelques heures : une brèche de 80 kilomètres a été ouverte par où s’engouffrent les troupes allemandes en direction de la Manche, commandées par Guderian et Rommel. Dans ce mouvement vers Calais, les Allemands effectuent ce que Churchill a appelé un « coup de faucille », c’est-à-dire que les armées alliées au nord sont enveloppées par les Allemands au sud. Ainsi, du 15 au 28, l’aile gauche du dispositif français est détruite. Les Français tentent de réagir mais la VIIe armée s’est avancée trop loin pour manœuvrer, la défense antiaérienne allemande est très efficace et les blindés ainsi que la suprématie aérienne des Allemands annulent tous les efforts des Alliés : lors de la bataille de France, la Royal Air Force perd plus d’appareils que pendant la bataille d’Angleterre… Pourtant, quelques succès ponctuels sont obtenus par les Français. Par exemple, à Montcornet, le colonel de Gaulle parvient à un succès remarquable avec ses blindés, parce qu’il a conscience qu’en utilisant les mêmes armes que l’ennemi, la victoire est possible. À la fin du mois de mai, de Gaulle réalise encore une avance de quatorze kilomètres dans la Somme et fait 500 prisonniers…Mais ces succès sont loin d’être suffisants. Dès le 21 mai, les Allemands sont à Arras. Les 28 et 29 une contre-attaque alliée échoue à Abbeville : l’encerclement des armées du nord est définitif. Le « coup de faucille » a réussi.

 

Des erreurs ont été commises. Nous avons déjà signalé le déplacement de la VIIe armée ainsi que l’inattention portée sur les Ardennes. Ajoutons que, le 13 mai, les 41 000 véhicules du groupe de blindés allemand marchant sur Sedan ont été bloqués dans un embouteillage monstre de 250 kilomètres et que les Alliés n’ont pas bombardé. Il s’agissait pourtant du fer de lance de l’offensive allemande !

 

Weygand, qui a remplacé Gamelin, tente de ressouder le dispositif français mais n’y parvient pas. Pris au piège, 500 000 soldats français et britanniques refluent vers la côte. Ils rembarquent à Dunkerque du 28 mai au 4 juin sous les bombardements allemands. C’est l’opération Dynamo. Les forces françaises sont désormais seules. Un front est reconstitué sur la Somme et l’Aisne mais le rapport de force est très défavorable. Le 5 juin, le groupe d’armées A attaque sur la Somme et enfonce, dès le lendemain, l’aile gauche du front français. L’aile droite recule. Le 9, le groupe d’armées B, à son tour, lance une offensive sur l’Aisne et parvient à effectuer une percée en quarante-huit heures. Dès lors, plus rien n’arrête l’avance des Allemands. Ceux-ci sont à Paris le 14 juin, à Rennes et Nantes le 19, à Brest et Lyon le 20 et à La Rochelle le 22.

   

 

La défaite de 1940

  

La carte est extraite de L’Histoire, avril 2010, n° 352, p. 53. Les deux flèches vertes principales montrent bien le « coup de faucille » opéré par les armées allemandes.

 

Pourtant, la victoire nazie a été obtenue d’extrême justesse. Ce qu’on a appelé la « guerre-éclair » ou blitzkrieg, n’est pas une tactique très au point. L’expression, d’ailleurs, ne vient pas des Allemands mais d’un journal américain, Time magazine, qui l’a employée pour la première fois en septembre 1939 pour désigner la victoire allemande en Pologne. C’est la propagande nazie qui l’a récupérée. Mais dans l’ensemble, les Allemands s’opposaient à l’aventurisme militaire. Ils ont eux-mêmes été surpris de la victoire sur la France et ont parlé, à cette occasion, de « miracle ». Ce « miracle » était du à la désobéissance de Guderian et Rommel qui, de leur propre initiative, se sont rués sur la Manche à la tête des seuls 10 % mécanisés de l’armée allemande. L’état-major allemand n’avait pas prévu cette action dans le plan initial et l’a jugée risquée, même si, au final, elle a réussi. Ainsi, la victoire allemande contre la France en juin 1940 n’est pas un modèle de réussite du blitzkrieg. D’ailleurs, les autres victoires allemandes entre 1939 et 1941 ont été remportées contre des pays aux dimensions limitées ou aux armées très inférieures à l’armée allemande. Et le seul blitzkrieg planifié en juin 1941 contre l’URSS s’est soldé par un échec… [3]

 

Le bilan de la bataille est lourd. Les pertes françaises, selon les estimations, vont de 50 000 à 90 000 morts. Les Allemands aussi ont payé un tribut relativement lourd : ils comptent 27 000 morts et 18 000 disparus, preuves de la dureté des combats.

 

 

L’armistice signé à Rethondes, comme en 1918

 

 

Dès le 10 mai, la composition du gouvernement avait été modifiée. En particulier, le maréchal Pétain a été appelé à la vice-présidence du Conseil. Deux phases se succèdent. La première, du 12 au 16 juin, voit s’affronter partisans et adversaires de l’armistice. Du 17, quand Pétain remplace à la tête du Conseil Paul Reynaud qui a démissionné, au 22, le processus est lancé. Contre l’arrêt des combats et pour continuer la lutte, le 18, le général de Gaulle lance à un appel depuis Londres à continuer la lutte. L’armistice est signé le 22 juin à Rethondes, dans le wagon même qui avait accueilli l’armistice du 11 novembre 1918. Il entre en vigueur le 25 juin. Trois types de clauses composent la convention d’armistice. D’abord, sur le plan militaire, les forces armées seront démobilisées et désarmées, la flotte devra rester dans les ports et les prisonniers resteront captifs en attendant la conclusion du traité de paix. Ensuite, les clauses stratégiques et politiques prévoient l’occupation des trois cinquièmes du territoire dont toute la façade maritime, à l’exception des côtes méditerranéennes. L’Alsace-Lorraine est annexée au Reich. Les autorités en zone occupée sont invitées à collaborer avec les Allemands. Enfin, en matière économique, l’occupant contrôle les transferts de marchandises et de valeurs et le gouvernement français doit financer l’entretien des troupes d’occupation.

 

Le 18 juin, on l’a vu, de Gaulle a lancé son appel, qui a reçu peu d’écho, malgré son renouvellement le 19 et le 22. Mais en tout cas, il est reconnu par le gouvernement britannique comme « chef des Français libres » le 28 juin. Le 7 août suivant, la Grande-Bretagne accepte l’existence d’une force française autonome, distincte de l’armée britannique.

 

Des signes de rupture apparaissent avec la composition du gouvernement Pétain. Celui-ci appelle notamment l’un de ses proches, Raphaël Alibert, proche de l’Action française. Après l’armistice, Pierre Laval arrive au gouvernement comme ministre d’Etat et vice-président du Conseil. Surtout, Pétain se montre très réservé à l’égard du parlementarisme. Il projette une rénovation nationale. Dans les discours qu’il prononce du 17 juin au 11 juillet, il dénonce notamment « l’esprit de jouissance [qui] l’a emporté sur l’esprit de sacrifice », le désordre social, les tromperies des hommes politiques… Laval, propose, le 29 juin, de voter un texte autorisant la promulgation d’une nouvelle loi constitutionnelle. Le 1er juillet, le gouvernement s’installe à Vichy.

 

Le 4 juillet, Laval présente l’article unique de son projet de réforme de l’Etat. Il stipule ceci : « L’Assemblée nationale donne tous les pouvoirs au gouvernement de la République, sous la signature et l’autorité du maréchal Pétain, président du Conseil, à l’effet de promulguer par un ou plusieurs actes la nouvelle constitution de l’Etat français. » Il faut alors convaincre les parlementaires de cette réforme. Du 4 au 9 juillet, Laval travaille à convaincre les parlementaires. Le 9, ceux-ci votent à la quasi-unanimité le principe de la révision. Le lendemain, 570 parlementaires votent les pleins pouvoirs à Pétain et le soin de « réviser les lois constitutionnelles ». Quatre-vingt votent contre. La IIIe République est ainsi mise à mort.

 

 

Aller plus loin :

AZÉMA, Jean-Pierre, 1939-1940. L’année terrible, Paris, Le Seuil, 1990.

AZÉMA, Jean-Pierre, 1940, l’année noire, Paris, Fayard, 2010.

BERL, Emmanuel, La fin de la IIIe République, Paris, Gallimard, 2007 (rééd.).

BLOCH, Marc, L’étrange défaite, Paris, Gallimard, « Folio histoire », 1990 (rééd.), préface de Stanley Hoffmann (un classique).

FRIESER, Karl-Heinz, Le mythe de la guerre-éclair. La campagne de l’Ouest de 1940, Paris, Belin, 2003.

HORNE, Alistair, Comment perdre une bataille ? France, mai-juin 1940, Paris, Tallandier, « Texto », 2010.

LÉVISSE-TOUZÉ, Christine (dir.), La Campagne de 1940, Paris, Tallandier, 2001.

MICHEL, Henri, La défaite de la France, Paris, PUF, « Que sais-je ? », 1980 (un classique).

QUÉTEL, Claude, L’impardonnable défaite : 1918-1940, Paris, Jean-Claude Lattès, 2010.

ROUSSEL, Éric, Le naufrage. 16 juin 1940, Paris, Gallimard, « Les journées qui ont fait la France », 2009.

VAÏSSE, Maurice (dir.), Mai-juin 1940. Défaite française, victoire allemande sous l’œil des historiens étrangers, Paris, Autrement, 2010 (rééd.), postface de Laurent Henninger (une perspective historiographique).

« France, 1940. Le printemps tragique » (dossier), in L’Histoire, avril 2010, n° 352, pp. 40-99 (on y trouvera de nombreuses photographies inédites provenant de l’Établissement de communication et de production audiovisuelle de la Défense (ECPAD), ainsi qu’une bibliographie complète pour faire le tour de la question).

 

 


[1] Cf. Les traités de paix de 1919 : un désastre ?

 

[2] JACKSON, Julian, « Les politiques ont-ils failli ? », in L’Histoire, avril 2010, n° 352, p. 84.

 

[3] « Le blitzkrieg est-il un mythe ? », in L’Histoire, avril 2010, n° 352, pp. 56-57.

 

  

Source de l’illustration.


Le Webzine de l'Histoire

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22 juin 2010 2 22 /06 /juin /2010 20:57

Spéciales 18 juin - L'Appel du 18 juin

 


« L'Appel du 18 juin 1940 du général de Gaulle et son impact jusqu'en 1945 », dossier pédagogique du Concours national de la résistance et de la déportation 2009-2010


 

« L’APPEL DU 18 JUIN » ou LA MECONNAISSANCE DE L’HISTOIRE

 

« J’aurais suivi De Gaulle avec joie contre les Allemands, mais je ne pouvais le faire contre les Français… Il me semblait qu’un Français de l’étranger devait se faire le témoin à décharge, et non à charge de son pays… Si je n’étais pas gaulliste, c’est que leur politique de haine n’était pas pour moi la vérité » (Antoine de Saint-Exupéry)

 

 

         Le 18 juin 2010 sera l’occasion pour bon nombre de gaullistes de commémorer   « l’appel » (le 70ème) lancé de Londres par leur chef spirituel. L’histoire a fait de ce discours le symbole de la résistance face à l’occupant allemand et a qualifié le général de brigade « à titre temporaire » Charles de Gaulle, de « premier résistant de France ». C’est une ineptie ! De Gaulle n’a jamais fait partie de la résistance. La résistance, c’est l’histoire du Colonel Fabien qui a débuté le 21 juin 1941.

            Comme le disait Weygand, de Gaulle était un militaire, pas un soldat et il y a à son sujet, toute une légende à détruire. Sa carrière militaire a pris des allures très particulières, marquées très tôt par la certitude de sa supériorité intellectuelle sur ses pairs. Ces derniers, en raison de sa morgue et de son extrême confiance en soi, l’avaient baptisé « le Connétable ». En fait, il les détestait tous, en particulier Juin, major de sa promotion dans laquelle de Gaulle avait obtenu un rang médiocre.

            Sa réputation de prophète d’une armée blindée moderne fait partie de la légende. Le général Guderian, spécialiste des blindés allemands, consulté à propos de l’influence qu’auraient pu avoir les écrits du colonel De Gaulle sur l’emploi d’une force mécanisée, répondit : « Ces théories sont déjà anciennes, les écrits de de Gaulle ne sont guère que de la littérature sans réelles applications pratiques nouvelles. Nous n’y avons pas porté d’intérêt ! »

            En 1940, au commandement de la 4ème division cuirassée, il subit un échec sanglant, prouvant d’une part son incapacité tactique et un entêtement criminel devant les conseils de ses pairs. D’ailleurs, il abandonna sa division en plein combat, apprenant qu’il était nommé général à titre temporaire et que Paul Reynaud faisait de lui un sous secrétaire d’Etat à la Défense. Le képi de général et ses deux étoiles devinrent alors sa première préoccupation, la seconde étant de contrer Weygand par tous les moyens.

            La fin de la campagne de 1940 apporte la confirmation : De Gaulle n’est pas un guerrier. Il n’est pas de ces officiers qui vont à l’assaut en casoar et en gants blancs, de ceux qui crient « debout les morts ! » ; c’est un rhéteur, un communicant que son entourage appellera bientôt « le général micro ». L’armée n’est pour lui qu’un instrument qui ne reflète en aucun cas un symbole national.

            Le 17 juin 1940, quand il quitte Bordeaux à destination de Londres, la guerre n’est pas finie puisque l’armistice est du 24 juin. Alors, pourquoi est-il parti en Angleterre ?

            Le 17 juin, eût lieu à Bordeaux le passage des pleins pouvoirs à Pétain et la formation du nouveau gouvernement. Or, de Gaulle eût l’amère surprise de constater que le Maréchal n’avait pas voulu de lui. Il connaissait trop bien l’homme et son orgueil démesuré pour lui confier un poste dans son nouveau gouvernement. Déçu, dépité, vexé, il décida à ce moment de quitter la France. Il attendit, caché derrière un pilier des vestibules, le passage du général anglais Spears, lui raconta avec une mine défaite qu’on voulait l’assassiner (une élucubration de plus) et lui demanda de l’emmener avec lui en Angleterre dans l’avion que Churchill avait envoyé à cette occasion. Le soir, il était à Londres et adressa un télégramme au Ministre de la Guerre à Bordeaux : « Suis à Londres. Ai négocié avec le Ministre de la Guerre britannique, sur instruction de monsieur Paul Reynaud, au sujet des points suivants… » (Il s’agissait des matériels d’armement remis aux alliés par les Etats-Unis et du sort des prisonniers allemands actuellement en France).

La réponse arriva de Bordeaux sous la forme d’un câble adressé par le général Colson, secrétaire d’Etat à la Guerre, à l’attaché militaire à Londres, le général Lelong : « Informez le général de Gaulle, qu’il est remis à la disposition du Général commandant en chef. Il doit rentrer sans délai. »

            Hésitation de de Gaulle : Obéir ou pas ? Dans un premier temps il décida d’obéir et demanda un avion au général Lelong. Celui-ci désigna le capitaine de l’armée de l’air Brantôme, pour l’accompagner avec l’unique avion que les Anglais avaient laissé aux Français. Cet officier déclarera : « Tout semblait devoir se dérouler sans encombre  lorsque j’apprends que les Anglais, sans avertir personne, avaient fait vidanger le matin même l’essence des réservoirs et déplacer l’avion dans un hangar aux portes cadenassées et gardées par des sentinelles en armes. »

            Devant l’impossibilité désormais de rejoindre Bordeaux, de Gaulle s’adressera aux Français, le 18 juin, sur les ondes de la BBC, en ces termes :

« Moi, général de Gaulle, actuellement à Londres, j’invite les officiers et soldats français qui se trouvent en territoire britannique, ou qui viendraient à s’y trouver, j’invite les ingénieurs et les ouvriers spécialisés des industries d’armement, qui se trouvent en territoire britannique ou qui viendraient à s’y trouver, à se mettre en rapport avec moi. Quoi qu’il arrive, la flamme de la résistance ne doit pas s’éteindre et ne s’éteindra pas. Demain comme aujourd’hui, je parlerai à la radio de Londres. »

            Ce texte n’a rien à voir avec ce qu’on appelle communément, l’appel du 18 Juin, où se trouverait la phrase fameuse : « la France a perdu une bataille, elle n’a pas perdu la guerre » En effet, cette phrase ne vit le jour qu’en Août 1940 sur une affiche placardée sur les murs de Londres. Ce faisant, de Gaulle ne faisait que copier, la proclamation du ministre anglais de l’information, Duff Cooper, à la suite de la capitulation de l’armée belge.

            Dès lors, de Gaulle devint pour bon nombre de Français le « symbole de la résistance »… alors qu’il passa toute la guerre en toute quiétude en famille, mangeant à sa faim, à l’abri des affres de la pénurie et de l’insécurité. Mais qu’importe : La légende gaullienne était en marche…

            Que serait-il advenu de l’auteur de « l’appel du 18 Juin » si le Maréchal Pétain (respecté par les Allemands pour avoir été le seul général à les avoir battus à Verdun), au lieu de confirmer Weygand dans le rôle de Général en Chef, pour qu’il réorganise l’Armée d’Afrique, avait choisi de Gaulle ? Ce dernier n’aurait, assurément, jamais rejoint Londres.   

            Roosevelt détestait de Gaulle et le considérait comme un dictateur en puissance, « un arriviste » à ses yeux. Il disait de lui : « De Gaulle se prend de temps en temps pour Clemenceau, de temps en temps pour Jeanne d’Arc ». Par contre, il estimait Giraud qui, arrivé à Alger, fin 1942, n’avait qu’une idée en tête : recomposer une armée française pour continuer la guerre… d’où l’animosité sans borne que De Gaulle vouait à ce dernier.

Churchill n’estimait pas davantage De Gaulle et dira du personnage : « De toutes les croix que j’ai portées, la plus lourde a été la Croix de Lorraine ». Un jour, il lui fit cette remarque qui le glaça : « Votre pire ennemi, c’est vous-même. Vous avez semé le désordre partout où vous êtes passé ! » Et le désintérêt –voire l’antipathie- qu’ils vouaient à de Gaulle amenèrent Churchill et Roosevelt à le tenir à l’écart de leurs projets concernant le débarquement du 8 novembre 1942 en AFN, ce qui fit s’écrier l’homme de Colombey : « J’espère que les gens de Vichy vont les refoutre à la mer ! ».

Tenu à l’écart, il le sera aussi lors du débarquement en Normandie, le 6 juin 1944… date à laquelle l’Armée d’Afrique défilait dans Rome qu’elle venait de libérer sous les ordres des généraux Juin et Monsabert.

Cependant, cette mise à l’écart, au lieu de provoquer chez lui un sentiment d’humilité, aiguisera au contraire son orgueil démesuré et, désormais, sa seule devise sera : « Moi, de Gaulle ! » Cette paranoïa, cette ambition amèneront les catastrophes qui détruiront l’unité nationale.

Dans ses principales destructions : l’empire et l’armée qu’il a toujours méprisée. On lui reprochera –entre autres- sa complicité dans la destruction de la flotte française par l’aviation anglaise, le 3 juillet 1940 à Mers-El-Kébir et du massacre de près de 1600 marins ; de l’attaque de Dakar, le 25 septembre 1940, par cette même armada anglaise ; la guerre franco-française de Syrie dont il fut le principal responsable. A cet effet, en janvier 1941, le colonel Monclar, commandant la 13ème DBLE et futur commandant du fameux bataillon de Corée, éprouvant quelques scrupules à l’idée de devoir tirer sur d’autres soldats français, s’adressa à de Gaulle en ces termes : « Mon général, en face il y a la Légion… La Légion ne tire pas sur la Légion… d’ailleurs vous nous avez affirmé que nous ne nous battrions jamais contre des Français… » Et le « chef de la France libre » de répliquer : « Monclar ! Les Français, c’est moi ! La France, c’est moi ! ». On lui reprochera aussi l’épuration de l’armée d’Afrique à qui il ne pardonna pas d’avoir « gagné sans lui » ; son opposition à la libération de la Corse par Giraud ; sa mise à l’écart de De Lattre et de Juin, généraux victorieux qui pouvaient lui faire de l’ombre. Son égocentrisme sera exacerbé quand le général Américain Clarck rendra au général Alphonse Juin, après que l’armée d’Afrique se couvrit de gloire en Italie, un vibrant hommage en ces termes : « Sans vous et vos magnifiques régiments, nous ne serions pas là ! ». De Gaulle saura s’en souvenir… 

Après sa prise de pouvoir en mai 1958, il n’eut de cesse de se débarrasser de l’armée victorieuse en Algérie en épurant ses chefs les plus prestigieux au bénéfice d’hommes « à lui » qui, s’ils n’étaient guère brillants sur le plan professionnel, avaient au moins l’avantage « d’être sûrs » : Gambiez, Ailleret, Katz, Debrosse… Le Maréchal Juin, patron de l'Armée d'Afrique qui libéra la France avec Eisenhower, Roosevelt, Churchill eût à donner son jugement sur l'OAS : « C'est un mouvement généreux ! » De Gaulle le mit aussitôt aux arrêts de rigueur et lui retira toutes ses fonctions. Il obtenait là sa revanche…

Et pourtant, on l’avait appelé, lui, de Gaulle, le sauveur, pour conserver l’Algérie française ! Mais d’incompétence en veulerie, de fautes en palinodies, d’abandon en trahison, de largesse en munificence, de discours en référendums, on en était arrivé aux concessions suprêmes, à l’abdication, à la fin sans le moindre égard pour ces milliers de morts et de disparus qui jalonnaient l’histoire de ce pays.

            Aventurier, paranoïaque, il restera, malgré la légende, épiphénomène dans l’histoire de France. Pour avoir rêvé de dominer la France –et probablement le monde- il avait pris un costume trop grand pour lui. Il est mort à Colombey, les pieds dans les charentaises, devant une tasse de camomille, sans doute étranglé par la rancœur, la haine à l’égard de ceux qui n’avaient pas su reconnaître son génie.

 

 

José CASTANO

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22 juin 2010 2 22 /06 /juin /2010 04:08

 

Tout ça ne vous rappelle rien ?

Une équipe digne de la France

lundi 21 juin 2010 - Nick de Cusa

Groupes de pressions qui se déchirent pour se partager un juteux butin. Incapacité à régler des différends, embrayage direct sur la grève, le blocage et la prise en otage du pays accompagnés de noms d’oiseaux. Le tout sous couvert de défense de l’intérêt général.

Le pays entier est en émoi. Déception, dépression honte, rage, colère, c’est un torrent. Oublions la pire marée noire de l’histoire, oublions Draguignan ou toute autre nouvelle secondaire, la Une des journaux est consacrée à la nouvelle qui compte : les bleus se désagrègent. Pire : le monde entier se moque de la Grande Nation.

Vite, que des têtes roulent, débarrassons nous de ces fauteurs de troubles si égoïstes et mal élevés qui donnent de notre beau pays, le plus beau du monde n’oublions pas, une image si déplorable. Et comment a-t-on pu en arriver là ? Certains journalistes en pilote automatique devant simplement produire de la copie pour toucher leur subvention d’Etat, ouvrent le tiroir « explications pour quand les choses vont mal » et en sortent LA cause obligatoire de tous les maux du pays : le fric, le bling bling, la société de consommation. Bref, l’ultra libéralisme sauvage.

Le lecteur perspicace aura tout de suite saisi que cette explication n’explique rien, puisque ces « causes » s’appliquent de la même façon aux 31 autres équipes et que, selon le principe « mêmes causes, mêmes effets », elle devraient toutes être en train d’insulter un entraineur schpountz que sa maman vient défendre à la radio parce qu’il ne sait pas le faire lui-même, et toutes refuser de s’entrainer. Or la nôtre est bien la seule à se donner de la sorte en spectacle.

Et si pour trouver l’explication, on prenait une ou deux minutes pour faire un pas en arrière et observer un tableau plus large. Voyons. Groupes de pressions qui se déchirent pour se partager un juteux butin. Incapacité à régler des différends, embrayage direct sur la grève, le blocage et la prise en otage du pays, accompagnés de noms d’oiseaux. Le tout sous couvert de défense de l’intérêt général. Superstructure de notables qui s’auto promeuvent tous de façon consanguine pour se sucrer luxueusement des fruits du travail de ceux qui prestent –prestent peu, certes, depuis la glorieuse année 2000, il est vrai.

Et n’oublions pas l’essentiel : ces bandes ou troupes concurrentes, jeunes musclés au langage fleuri d’un côté, notables bedonnant, grisonnants, ayant acquis leur place par quelque pitoyable bidouillage de l’autre, prêts à défendre leur part du butin jusqu’au bout, ayant complètement oublié, aveuglés qu’ils sont par leur cupidité, le mur qui se rapproche à grande vitesse, et prêts enfin à démolir tout ce bel édifice qui était pour eux si profitable.

Ajoutons enfin le gouvernement qui intervient directement dans l’affaire, puisque bien sûr il n’y a que l’Etat qui peut régler les problèmes. Surtout en foot, on sait bien depuis la grande époque des sélections Nigérianes faites par Sani Abacha, ou depuis que le Colonel Guei avait séquestré l’équipe de Côte d’Ivoire dans une caserne pour la discipliner militairement, que la prise de contrôle direct du gouvernement dans le football amène immanquablement de brillants résultats, que dis-je, des titres à la pelle.

Tout cela ne nous rappellerait-il pas étrangement quelque chose ? Un certains pays ?

Cette équipe qui nous fait honte à tous, finalement, ne nous représente-t-elle pas à la perfection ? J’irais jusqu’à dire, ne reflète-t-elle pas notre bon pays comme un miroir ?

Si vous m’y autorisez, je profiterais juste de l’occasion offerte par ces cocasses péripéties pour rappeler que l’appel de Contrepoints à céder notre place à l’Irlande prend désormais tout son sens.

Sauf que, finalement, comme me l’écrivait l’autre jour un ami, avouons, on n’aurait pas autant rigolé.

 


Les Bleus : la vérité sur "les caïds" commence à émerger
« Il y avait une très bonne ambiance. Personne ne l'a écarté. » C'est ce qu'assure William Gallas dans son interview parue dans les Inrockuptibles le 7 juillet dernier lorsqu'il évoque Yoann Gourcuff. Avant lui, Thierry Henry, Eric Abidal et Patrice Evra avaient également certifié, l'air grave, que l'ambiance dans le groupe était bonne, que les joueurs étaient solidaires et soudés. Pourtant, une source très proche d'un des joueurs de l'équipe de France nous a révélé que la réalité était toute autre.
 

 

« Evra, Gallas, Anelka et Ribery ont surnommé Gourcuff "la Nouvelle Star", nous a confié notre source qui souhaite garder l'anonymat pour des raisons évidentes. Ces quatre joueurs avaient pour rituel de mettre une claque derrière le crâne de Gourcuff à chaque fois qu'il passait devant eux dans l'allée du bus. Un jour, Evra est allé plus loin que d'habitude et Gourcuff a répondu. Alors que le ton montait entre les deux joueurs, A. Diarra s'est interposé et a signifié à Evra que s'il voulait avoir à faire à Gourcuff, il devrait d'abord avoir à faire à lui. Sur ce, Ribery, Gallas et Anelka se sont levés pour montrer leur soutien à Evra, alors que les Bordelais Carrasso et Planus en ont fait de même pour montrer leur soutien à leurs coéquipiers en club. C'était très tendu ».

source : Les Girondins.

Passeport bleu pour le nihilisme


 

1. La Genèse.

En France, quand un radical-socialiste déclare benoîtement qu’une chose anormale est normale, c’est le signe infaillible que nous sommes partis pour une longue spirale du déclin. Voyez le déficit de la nation, vanté comme une technique économique « normale » pendant trente ans. Au bout : faillite. Dans le cas du football français, le radical-socialiste, c’est Jacques Chirac, et l’événement profondément anormal qu’il trouve anodin, voire normal, c’est le coup de tête de Zidane, il y a quatre ans.
 
Or, rien n’est moins normal que ce coup de tête inaugural, car le football est un fait civilisateur, c’est-à-dire une manière collective d’élever un grand nombre de jeunes, ainsi que le furent et le sont parfois encore des institutions comme le service militaire, le parti communiste, le patronage, ou le scoutisme. Et quand l’exemplarité, à la tête de ces institutions, vient à manquer, ça donne… que le coup de tête de Zidane est au foot ce que les curés pédophiles sont à l’Eglise : une catastrophe, disproportionnée en raison de la responsabilité particulière de celui qui doit, par fonction, endosser un rôle exemplaire. N’importe quel sous-lieutenant sait ça.

Dans le cas d’une faute venue de haut, il n’y a qu’une issue : que la sanction tombe de plus haut encore, vite, fort et clair. La sanction n’est pas tombée. La civilisation, attaquée, ne s’est pas défendue. Elle a excusé, et c’est tout juste si elle ne s’est pas excusée. La jurisprudence Chirac-Zidane: le mou bénit les coups du fort. 

Nous n’aurions jamais dû jouer le match contre l’Afrique du Sud, car l’offense faite en 2010 au pays et au sport dépasse de loin la tête de Zidane quatre ans plus tôt. Avec la nouvelle génération, on est passé d’un scandale artisanal à l’obscénité à l’échelle industrielle.

En tout cas, cette culture de l’absence de sanction a engendré la haine de soi de cette équipe, car une faute non sanctionnée est un passeport pour le nihilisme. Depuis, à son sommet, le foot français s’est installé dans l’ambiance d’une boîte SM. Qu’est-ce qu’une boîte SM ? La complicité de plusieurs haines de soi. Le but du jeu : faire des confettis de plus en plus petits avec le sentiment de sa dignité.     

2. La chute.

A partir de là, on ne parle de morale sportive de l’équipe de France que pour évoquer son tabassage en règle : c’est un petit jeu décadent dans un coin de cette immense orgie romaine qu’est devenue la vie de ce groupe. Aux portes de l’orgie, la FFF et l’entraîneur de l’équipe ne sont plus que des videurs au service de ces très improbables fêtards, essayant comme ils le peuvent d’interdire à la presse et au public de voir le très décadent spectacle. 

Tout le monde (ou presque, et il faudra faire scrupuleusement le tri) se tient mal dans cette équipe, non pas par une espèce de fatalité, de concours malheureux de circonstances, ou de mauvaise éducation (car des voyous sublimés par un projet collectif, un rôle, un maillot, on en voit tous les jours), mais bien parce qu’ils sont là pour ça.  Ils sont là pour éclater deux trucs, « cousin » : la France, et le sport. La France, d’abord, parce qu’ils pensent qu’ils ne vont quand même pas représenter ce pays dont le pouvoir suprême les encourage depuis la dernière coupe du monde à continuer de sortir des clous … Ce groupe est officiellement installé dans l’obscène (c’est-à-dire en dehors de la scène du sport, et en dehors de la représentation du pays), en mode doigt d’honneur, et l’équipe sauvage pousse l’avantage toujours plus loin, pour voir si elle peut se payer un pays tout entier. Et de fait, elle peut, rien ne l’en empêche.
   

 


Sur le plan sportif, ensuite, ils sont beaucoup moins que nul, parce que pour avoir zéro il faut avoir au moins rendu une copie. Ils font mieux, ils trahissent carrément l’esprit de cette équipe, je veux dire l’esprit que les Français aiment retrouver en elle à travers les générations et les talents. Et en effet, rien de ce qui fait le style traditionnel de l’équipe de France – inventivité, fair-play, « furia francese » (un truc qui nous vient de Louis XII, quand même), dosage subtil de sens collectif et de charges individuelles débridées, improvisations folles et belles à voir sur une trame stratégique fragile mais inspirée ; et même ces effondrements soudains qui sont, parfois, comme un magnifique hommage de l’excès de talent à la défaite – n’a été représenté sur le terrain. Non : des atomes confits, des mécaniques esseulées, des solitaires à gueule de bois, des singularités fantomatiques et stériles, des mutins sans objet.    

L’air mécontent et pétrifié de Domenech, et son peu d’aménité envers la presse s’expliquent non pas, me semble-t-il, par une bizarrerie de caractère, mais par le fait que son honneur est engagé à ce que ça ait l’air
propre alors que c’est pourri, que ça ait l’air de marcher alors que ça rampe, et que ça semble fonctionner alors que ça explose… Je ne dirais pas du tout qu’il a manqué d’honneur – c’est-à-dire d’une définition de lui-même à laquelle il tient -, il en a au contraire beaucoup, il m’a l’air fier, il a fait face dans son genre, mais il a commis l’erreur énorme de décider que puisque tout merdait en grand, son honneur était engagé à faire en sorte que cette équipe ait l’air d’être quelque chose alors qu’elle n’était rien. Rien : même pas une mauvaise équipe. L’honneur de Domenech, c’est celui d’un videur de boîte louche. Sa fiche de poste : interdire qu’on vienne y voir. Le problème, c’est que la terre entière voulait y voir … à la fin, ça n’est pas tenable. Soi-disant entraîneur d’une bande de non sanctionnés en saturnales permanentes, Domenech, c’est le paradoxe du chômeur en poste, du responsable irresponsable, c’est la tête absente d’un attelage d’intouchables sans courroies et sans volonté, qui n’a plus rien de sportif.    

3. L’enfer.

Bref, la trame métaphysique est dantesque, et c’est logiquement Jérôme Bosch qui vient à l’esprit au spectacle des saynètes sulfureuses de la séquence Mondial. Brêve typologie pour un travail de mémoire futur : 

Scènes de purges : t’es pas de ma bande, je te passe pas le ballon. Pas la moindre idée de transcendance nationale n’a effleuré l’esprit de ces joueurs. 

Scènes de paranoïa en salle de presse : je veux bien répondre à vos questions si vous n’en posez pas. Yeux lourds, violence pure, animalisation du rapport aux médias. « Orangemécanisation » de la relation entre le public, l’encadrement, les joueurs, la presse… 



Scènes de vestes : ah ouais, l’ennemi n’est pas qu’intérieur, il y a aussi une équipe adverse qui vient de nous en coller une sur le terrain. Rentrons vite à l’hôtel purger l’ennemi intérieur (voir plus haut). 

Scènes de purée intellectuelle : le groupe va bien, dit un membre quelconque de l’équipe, mais le groupe va mal, mais le groupe va bien parce qu’il a envie d’aller mieux, enfin le groupe regrette, assume, souffre, et puis d’ailleurs il a envie de porter le maillot. On va tout donner. On arrête tout. Vous me suivez ?

Scènes de type Agonie de l’Empire Soviétique : vous prenez un type en costume gris avec une cravate en tergal, vous le mettez devant un semi de logos, et il vous livre un discours dont le sous-texte est le suivant : je, président de la FFF, ne comprends rien à ce qui se passe, mais il y a une FFF dont je suis le président, et ça, c’est du solide, c’est du pognon, c’est un système, et ça résiste au connard qui est à ma gauche et qui se prend pour le capitaine de l’équipe. Enfin je crois, que ça y résiste. 

Scènes de prise d’otages dans des cars, auxquelles il ne manquait plus que le GIGN en embuscade.

J’en passe…


Marin de Viry / agence Maxppp


4. La rédemption bidon.

Tout ça faisait gentiment des bulles de souffre jusqu’à l’arrivée pour la scène finale de madame Roselyne (Roselyne ?) Bachelot, affublée d’un regard mystique qu’elle a piqué pour l’occasion à Ségolène Royal. Elle dispensa aux joueurs un cours de moraline et improvisa une psychothérapie de groupe, au terme de laquelle les joueurs pleurèrent.

Pleurèrent.

Pleurèrent ! 

C’était la scène lacrymale, pour que notre honte fût entièrement consommée.
 
Je sais : pleurer, en langage psy, veut dire qu’ils ont extériorisé leur souffrance, et que c’est bon pour leur psyché. Ils vont pouvoir entamer leur travail de deuil grâce à la labialisation de leur douleur intime… Enfin, quelque chose comme ça.     

Le spectacle de ce télé-pseudo-repentir, de cette média-morale à deux balles, de cette pleurnicherie mondiale relayée par satellites, de cette alliance du psychologisme et de la démagogie ont brisé en moi quelque chose comme les derniers remparts démocratiques. Je suis tenté par le boulangisme à cause de Roselyne, et je vais finir par en appeler carrément à l’armée : mon royaume pour un adjudant-chef de régiment d’infanterie parachutiste, qui viendrait, avec sa science des coups de pompe dans le cul, s’occuper de l’équipe de France !

Car ce n’était pas ça qu’il fallait faire, ce numéro de cellule psychologique doublée de référent de Cité, madame la ministre. Il fallait leur dire : demain, vous ne jouez pas, bande de petits cons. Aujourd’hui, vous reprenez l’avion, tas de minables. OK on fera le tri plus tard entre les meneurs et les autres, mais là, tout de suite, vous êtes virés. Vous dégagez, vous regardez vos pieds, vous suivez les flèches jusqu’à l’aéroport. 

Car l’expiation « par le jeu », le rachat « sur le terrain », n’ont aucun sens tant que la sanction pour outrage n’a pas eu lieu. Et d’ailleurs, logiquement, le match France-Afrique du Sud, que nous n’aurions pas dû jouer, ne nous a rien appris que nous ne sachions déjà : ce n’est pas parce qu’il a la gueule de bois qu’un nul arrogant devient moins nul que dans son état normal.  Ce n’est pas parce qu’on pleure qu’on a raison.
 
5. La refondation sur des bases liquides

La prochaine étape, c’est Venise. Il va falloir refonder sur des bases liquides. Liquides, car madame Bachelot a fait comme Chirac : elle a nié l’offense, et les mufles, revenus de leurs larmes, se tapent sur les cuisses, car ils n’ont nullement été inquiétés. Elle a considéré que cette équipe était notre équipe, que ces joueurs étaient les enfants de la patrie. Elle a voulu réparer les prétendues blessures psychologiques, là où il aurait fallu laver les fautes dans la sanction. Elle a tricoté du compromis lacrymal, là où il aurait fallu juger. L’ultime séquence présidentielle, à base de voiture officielle venant chercher Henry à l’aéroport, n’a qu’un sens : avertir les prochains membres de l’équipe que quoiqu’ils fassent, qu’aussi loin iront-ils dans l’odieux, il ne leur arrivera rien.

Bref, pour l’avenir, je sens qu’on tient quelque chose de liquide.


Marin de Viry

Sur le RING

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21 juin 2010 1 21 /06 /juin /2010 11:30
La communauté chinoise et d'origine chinoise manifeste à Paris contre l'insécurité

manifestation à Belleville (Paris)

Une dizaine de milliers de Chinois et de Français d'origine chinoise sont descendus dimanche dans la rue à Paris pour réclamer le droit de vivre ensemble de sécurité.

Les manifestants en provenance de Paris et d'autres régions de la France se sont rassemblés au quartier parisien de Belleville, où habite une forte population chinoise et d'origine chinoise.

"Sécurité pour tous", "Belleville, quartier tranquille", a-t-on lu sur les slogans des manifestants, qui demandent une amélioration de la sécurité dans leurs quartiers. Des habitants d' autres origines ont également participé à la manifestation, a-t-on constaté sur place.

Ces derniers mois, l'insécurité règne dans certains quartiers de l'Est parisien, avec l'augmentation des violences volontaires en réunion, dont la communauté chinoise a souvent été victime, a dénoncé Chan Sing Mo, président du Collectif des associations franco-chinoises et principal initiateur de la manifestation .

"Gagnés par le sentiment d'anxiété et de peur, les habitants et les commerçants affrontent leur quotidien dans un climat de stresse permanente. Par ailleurs, de nombreux touristes en visite sont également victimes des agressions révoltantes dans ces quartiers", a déclaré M. Chan dans une lettre ouverte au public.

"Par la manifestation sur la voie publique de ce jour, le Collectif des associations franco-chinoises entend attirer l' attention des autorités publiques sur la nécessité d'avoir une politique de la ville coordonnée et concertée visant à prévenir, à sanctionner les actes d'infraction pénale et à assister les victimes en situation de détresse dramatique. Nous exigeons que les lois de la République soient appliquées pleinement et entièrement", a-t-il poursuivi.

Selon Huong Tan, chargé de communication de l'activité, entre 15.000 et 20.000 personnes - selon les organisateurs - ont participé à la manifestation et cette manifestation de la communauté chinoise sur la question sécuritaire est la première du genre en France.


PHOTOS DE LA MANIFESTATION A BELLEVILLE

manifestation chinois Paris

manifestation chinois Belleville

Manifestation contre violence à Belleville

 


Ce coup de feu tiré à Belleville sera-t-il le dernier pour préserver les droits et intérêts de la communauté chinoise en France ?



Le 20 juin, plusieurs dizaines de milliers d'habitants de la communauté chinoise vivant à Paris ont manifesté dans le quartier de Belleville de Paris 19ème et 20ème et leurs demandes ce sont la « sécurité » et la « non violence ». Cette manifestation a pour détonateur direct plusieurs coups de feu tirés le 2 juin. Ce jour-là, il y a eu dans un restaurant de Belleville, un banquet donné à l'occasion du mariage d'un couple de jeunes d'origine chinoise. Mais, plusieurs invités ont été agressés et attaqués, à l'entrée du restaurant, par des jeunes d'origine africaine et d'origine maghrébine qui se sont jetés soudainement sur eux pour arracher et enlever tout ce qu'ils portent sur eux Devant cette situation, A Wu, un jeune Chinois invité au banquet, a sorti un pistolet de sa poche et a tiré sur les malfaiteurs dont un a été blessé. Sachant que son geste irréfléchi a enfreint la loi française, le jeune Chinois s'est livré tout de suite de lui-même aux policiers français qui se tenaient à l'écart et laissaient faire les bandits sans réagir et il leur a remis son arme.

A Wu, qui porte le nom de Zhong Shaowu, est un jeune Chinois originaire de Wencheng de la Province du Zhejiang et à l'heure actuelle, il est toujours enfermé dans la maison de détention de la police parisienne. Il semble que la police ne s'intéresse pas du tout aux agressions et aux vols dont été victimes les habitants d'origine chinoise, ce qui l'intéresse tout particulièrement c'est d'où vient l'arme que A Wu porte sur lui, qui l'a engagé pour se défendre contre les bandits et son mobile en tirant le coup de feu, car d'après elle « Il y a un peu de la mafia derrière cela ».

Pour ce qui est du cas de Monsieur Zhong, les avis sont partagés et les opinions sont très diverses. Nous n'avons aucun commentaire à faire sur cela du fait que la chose n'est pas encore tirée au clair et qu'il y a la police parisienne et le consulat chinois qui se chargent de régler le problème. Le plus important pour nous, c'est que ce coup de feu a déclenché une fois pour toute l'indignation et la colère longtemps contenues, étouffées et comprimées dans le cœur des habitants de la communauté chinoise résidant en France, et surtout des habitants d'origine chinoise qui se sont installés dans des logements à bas loyer du quartier de Belleville du 19ème arrondissement de la capitale française qui travaillent dur et avec acharnement pour pouvoir avoir une meilleure vie en France. Mais depuis de longues années, ils souffrent énormément des provocations et des agressions des bandes de jeunes voyous qui infestent le quartier. Comme la plupart des Chinois se livrent et se consacrent au petit commerce, à la fin de la journée ils ont souvent sur eux de l'argent liquide et c'est la raison pour laquelle ils sont devenus les cibles préférés pour la canaille, le vaurien et la fripouille.

La manifestation du dimanche 20 juin a débuté ce jour-là dans l'après-midi. Depuis sa préparation et son organisation, elle traduit la grande différence de vue des divers milieux de la communauté chinoise en ce qui concerne le problème de l'intégration multiethnique. Les diverses et les différentes réflexions qu'elle suscite dans la société sont peut-être utiles pour que nous puissions connaître la direction à prendre pour pouvoir régler au mieux le problème de sécurité des habitants d'origine chinoise.

1 – Pourquoi on ne doit pas considérer le problème d'insécurité des Chinois à Belleville comme un simple conflit ethnique ?

Dans tous les cas criminels de violence ayant pour but de s'emparer des biens d'autrui, la plupart des victimes portent toujours de l'argent liquide sur elles, ont une faible capacité de se défendre, , n'ont pas de compagnons pour les aider et les défendre, elles sont surtout des femmes ou bien des personnes âgées, tandis que les personnes d'origine chinoise qui ne parlent pas bien ou ne parlent pas du tout le français ont des difficultés pour demander secours et pour communiquer avec les organismes de la justice. Compte tenu que la population d'origine chinoise est travailleuse, dure à la tâche, capable d'endurer souffrances et privations et très habile dans la gestion et l'exploitation, elle a souvent un revenu, alors que son caractère doux, paisible et affable fait qu'elle préfère supporter les ennuis et les tribulations et subir des pertes financières pour éviter des malheurs, c'est pourquoi elle est aux yeux des malfaiteurs un agneau peureux et docile qui fait ce qu'on lui dit. En France, les immigrés, et surtout la jeune génération des immigrés des pays africains francophones et des pays du Maghreb, un certain nombre d'entre eux se livrent souvent à des actes criminels pour satisfaire leurs besoins et cela est un casse-tête pour les autorités françaises qui ne savent plus à quel saint se vouer. Pour les habitants d'origine chinoise, ils méprisent ces gens-là et font souvent l'objet de leurs actes de vol, d'agression et de rapine.

Il y a une chose qu'on ne doit pas oublier, c'est que ces gens-là sont très différents des Chinois, car un grand nombre d'entre eux ont vécu et ont grandi depuis leur enfance dans un environnement de violence et ils considèrent l'oppression sur les faibles en utilisant la force comme règle de la survie. Ils malmènent, maltraitent, humilient et brutalisent non seulement les habitants d'origine chinoise, mais également les faibles de leur propre ethnie, alors que même les femmes, les vieillards et les enfants d'origine africaine et maghrébine, ainsi que certains Français font également souvent l'objet de leur maltraitance et de leur humiliation. Le but de leur vol et rapine c'est de s'emparer du fruit de labeur d'autrui et de pourvoir vivre sans travailler. Pour eux, la seule chose qui mérite réflexion c'est le moyen le plus sûr pour s'emparer des biens d'autrui. Quant à moi (auteur de cet article) ; j'ai des amis d'origine africaine ou maghrébine, ils sont modestes, aimables, raisonnables, assidus, diligents et travailleurs comme n'importe quel membre d'une société civilisée, c'est pourquoi il est complètement arbitraire et subjectif que de vouloir déterminer la qualité morale d'une quelconque personne en tenant compte seulement de son appartenance ethnique.

Contrairement à l'imagination de certains Chinois, dans le cas où cet incident évolue en une guerre totale entre la communauté chinoise et les autres communautés locales d'immigrés, cela ne profitera à personne et n'apportera aucune solution aux problèmes qui existe et sera favorable seulement pour les voyous, les chenapans et les malfaiteurs qui seront bien contents de manipuler le racisme et la conscience ethnique afin de pouvoir échapper aux poursuites et cela constituera pour eux le seul échappatoire leur permettant de se tirer d'embarras et d'ennuis. Il faut au contraire utiliser le modèle des relations entre associations et c'est aux organismes de Chinois d'agir en premier pour contacter les communautés de différentes ethnies afin d'unir et de rassembler tous les habitants des quartiers avoisinants, ce qui permettra de réduire autant que possible les espaces de cachettes des malfaiteurs et c'est comme cela que les Chinois peuvent faire valoir leur sagesse et leur intelligence.

2 – Les Chinois d'outre-mer ainsi que les étrangers d'origine chinoise qui vivent en territoire étranger, pourquoi doivent-ils faire en sorte que leurs réclamations et leurs revendications soient connues, comprises et acceptées par le grand public et les classes sociales majeures du pays où ils résident ?

Les Chinois d'outre-mer et les ressortissants chinois à l'étranger ont un cœur qui bat à l'unisson avec la patrie et cela est tout naturellement le choix de leur sentiment, mais personne ne doit oublier qu'elle doit respecter la souveraineté de la justice du pays qui l'accueille et lorsque ses droits et ses intérêts sont empiétés, elle doit alors solliciter l'aide et la protection de la justice du pays accueillant et elle doit également savoir utiliser la force des médias locaux pour augmenter le poids de ses réclamations pour qu'elles sont prises en compte par les dirigeants du pays concerné et par la communauté internationale et faire en sorte que son action puisse obtenir le soutien moral. Pour ce qui est de cela, la communauté juive s'est très bien comportée et a bien mené l'affaire. Je me rappelle qu'en 2007, la communauté juive parisienne a organisé une grande manifestation dont le nombre de participants n'a pas été compté par des dizaines de milliers, ni par des centaines de milliers, car il atteignait plus d'un million. La réclamation de la communauté juive, qui était alors d'honorer la mémoire d'Ivan, un jeune juif assassiné par des bandits ivoiriens, a obtenu le soutien total des principaux médias français et même des Français non juifs ont participé à la manifestation qui était partie de la Place de la République pour atteindre la Place de la Nation. Comparée avec elle, il y a seulement des dizaines de milliers de Chinois qui ont participé à notre manifestation « antiviolence ». L'itinéraire est non seulement court et les manifestants ont parcouru des rues et des lieux écartés où il y a peu de gens, et on voyait très peu de représentants d'autres ethnies, ce qui semble que notre manifestation est beaucoup moins populaire que celle organisée par les juifs il y a trois ans. Lors du déroulement de cette dernière, il y a eu plusieurs petites escarmouches entre jeunes musulmans et jeunes juifs (l'agresseur d'Ivan était un jeune Ivoirien qui pratiquait l'Islam), mais elles ont été très vite réprimées par les groupes de sécurité dépêchés sur place par les organisateurs de la manifestation avec l'aide de la police

Ce qui m'a le plus profondément impressionné c'est le haut degré d'autodiscipline de la communauté juive : lorsque plusieurs extrémistes juifs ont commencé à brûler le foulard-emblème du Mouvement de la Libération de Palestine et à se battre avec des jeunes Maghrébins qui suivaient la manifestation, j'ai agi instinctivement en prenant mon appareil photo. A ce moment-là, un jeune couple de fiancés juifs est venu jusqu'à moi et m'a supplié tout en pleurant en disant : « Monsieur le journaliste, nous vous prions de ne pas joindre cette photo dans votre article de reportage, car ces jeunes juifs-là sont une minorité et ils ne représentent pas le courant principal de la communauté juive. Nous ne souhaitons pas que notre manifestation provoque la contradiction ethnique. » et juste à ce moment-là, des membres du groupe chargé d'assurer la discipline et la sécurité ont intervenu en dispersant les antagonistes et en mettant fin aux conflits qui venaient à peine d'être déclenchés.

Par la suite, la presse locale a publié des reportages sur la dite manifestation et il y a très peu de commentaires négatifs sur elle, ce qui était tout à fait conforme au but initial arrêté par les organisateurs. Pour ce qui est de la communauté juive, elle est profondément enracinée dans la société française, c'est pourquoi il est impossible pour la communauté chinoise de prendre complètement et totalement exemple sur elle, mais elle peut se référer sur celle-ci quant à l'organisation de la manifestation.

3 – Les erreurs que les Chinois d'outre-mer doivent éviter de commettre lorsqu'ils luttent pour assurer leurs droits et leurs intérêts.

Au cours de la manifestation du dimanche dernier, il s'est produit certains problèmes que j'estime inappropriés et inconcevables.

En premier lieu, le principe de l' « union de toutes les ethnies pour résister et combattre les agissements illégaux » n'a pas été traduit dans le manifestation, tandis qu'on a trop insisté sur la participation des habitants d'origine chinoise en omettant de convier le plus grand nombre de représentants des autres ethnies. Par exemple, les Français souffrent également des malheurs apportés par les voyous et les malfaiteurs et on doit les convier à cette manifestation, alors que la plus grande partie de la population de Belleville est devenue de simples spectateurs et non pas des participants, ce qui a diminué de beaucoup les effets de cette démonstration populaire.

Ensuite, pour ce qui est de l'organisation de la manifestation, bien qu'il n'y a pas eu de grands problèmes, mais à la dernière phase, lors de l'évacuation des manifestants il y a eu querelles, disputes et altercations entre jeunes d'origine chinoise et jeunes d'origine maghrébine et même une femme d'origine chinoise a fait l'objet de vol du fait que son sac main lui a été arraché et a disparu en un clin d'œil, ce qui a provoqué un conflit qui a tendance à s'étendre. Car, lorsque les organisateurs ont quitté le lieu, certains jeunes d'origine chinoise ont pris à partie la police qui a utilisé la bombe lacrymogène pour tenter de disperser les manifestants dont une dizaine ont été appréhendés et mis en détention.

D'autre part, on a brandi et agité de nombreux drapeaux chinois tout le long de la manifestation et certains manifestants ont affirmé que « l'Ambassade de Chine soutient la manifestation …… », alors qu'en réalité dans ce genre d'affaires, les ambassades de Chine à l'étranger agit toujours avec prudence du fait de la souveraineté de la justice du pays concerné. Tout en préservant et en protégeant les droits et les intérêts légitimes des ressortissants chinois, il faut éviter d'intervenir dans l'indépendance de la justice du pays concerné. Un petit nombre de manifestants, qui ne comprennent pas cela agissent n'importe comment, ce qui ajoute des facteurs néfastes et un sentiment d'hostilité absolument inutiles pour le succès des démarches diplomatiques et au contraire ces facteurs et ce sentiment ne peuvent apporter aucune solution au règlement des problèmes.

Souhaitons que les réclamations et les revendications de la communauté chinoise en France quant à sa sécurité dans ce pays puissent être prises en considération par le gouvernement français. Mais de l'autre côté, les ressortissants chinois en France et les Français d'origine chinoise doivent faire des efforts pour renforcer leur communication et leur compréhension avec les principales classes sociales françaises, car l'évolution du problème d'insécurité en conflit ethnique n'est dans l'intérêt de personne et est une chose que personne ne souhaite voir ni connaître ni vivre.

Par Luo Hao


Source: le Quotidien du Peuple en ligne

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« Les faits sont têtus; quels que soient nos souhaits, nos inclinations ou les voeux de nos passions, ils ne peuvent changer l'état de fait et la preuve. »     John Adams

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LE WEB RESISTANT 

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Informez-vous sur la cyber-résistance

 

« Les religions chrétiennes furent sanglantes et meurtrières en s'éloignant de leurs textes tandis que l'islam le fut en se rapprochant des siens. »                                                      Eric Conan



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FONDAMENTALISME, DJIHADISME, TERRORISME

L’ISLAMISME EST UN TOTALITARISME

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Ce qu’il faut savoir sur l’une des plus grandes menaces politiques et religieuses du XXIème siècle

 


« Le socialisme cherche à abattre la richesse, le libéralisme à suprimer la pauvreté »                                                   Winston Churchill

 

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LISEZ LE rapport SUR LE SOCIALISME

Plus de 20 articles du blog C.R pour vous réinformer sur le socialisme


« Le Communisme est l'Islam du XXème siècle. »                                                   Jules Monnerot


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LISEZ LE rapport SUR LE COMMUNISME

Plus de 20 articles du blog C.R pour vous réinformer sur le communisme

 

« La religion d'Hitler est la plus proche qui soit de l'islamisme, réaliste, terrestre, promettant le maximum de récompenses dans cette vie, mais avec ce Walhalla façon musulmane avec lequel les Allemands méritoires peuvent entrer et continuer à gouter le plaisir. Comme l'islamisme, elle prêche la vertu de l'épée.  »                            Carl Gustav Jung

 

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LISEZ LE rapport SUR LE NAZISME

Plus de 20 articles du blog C.R pour vous réinformer sur le nazisme


« Ils ignorent que les épées sont données pour que personne ne soit esclave. »                                                                                        Lucain

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