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L’Algérie ou le terrorisme opportuniste


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Par Claude Moniquet   
8 octobre 2007
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ESISC — Le retour de la terreur en Algérie prouve à quel point le terrorisme islamique peut se montrer opportuniste et comment il entend exploiter les faiblesses – réelles ou supposées – des “régimes impies” qu’il combat. Car si les attentats spectaculaires sont revenus sur le devant de la scène, c’est certainement autant en fonction d’un agenda interne et purement national que pour s’inscrire dans une stratégie globale.

Sur cette stratégie globale, nous n’insisterons pas. On a assez souligné, ici, le fait que l’installation d’une troisième zone de Djihad – après l’Afghanistan et l’Irak – surtout si près de l’Europe (et donc apte à menacer directement celle-ci) représentait un intérêt pour la mouvance al-Qaïda.

Mais l’Algérie n’a pas été choisie au hasard et “al-Qaïda dans les Etats islamiques du Maghreb” porte bien mal son nom et devrait plutôt s’appeler al-Qaïda en Algérie, car c’est bien ce pays qui, aujourd’hui, est le maillon faible sécuritaire du Maghreb.

Certes, demain, des bombes peuvent exploser au Maroc ou en Tunisie mais elles ne changeront rien à la réalité: même si le malaise islamiste et l’influence djihadiste ont augmenté dans ces deux pays, l’un, le Maroc, est engagé dans des réformes démocratiques et économiques qui modifient profondément son apparence, et l’autre, la Tunisie, réussit son pari économique de développement tout en contrôlant aussi parfaitement que possible la sphère sécuritaire. Quant à la Mauritanie et à la Libye, ce n’est pas leur faire insulte que d’estimer que leur déstabilisation serait de peu d’influence sur la région tant leur position est marginale, en termes de populations comme en termes politiques et même économiques. Il en va tout autrement de l’Algérie, énorme exportateur de gaz et de pétrole et peuplé de 32 millions d’habitants.

Las, l’Algérie de 2007 ressemble fort à celle du début des années quatre-vingt-dix: bloquée dans une crise sociale sans fin – paradoxe indéfendable: étant l’un des pays les plus riches d’Afrique, l’Algérie laisse aujourd’hui sa population survivre dans des conditions lamentables – et a une très large tendance à rejeter toutes les fautes sur le passé colonial qui l’aurait empêchée de se développer. Si l’on considère que le pays est indépendant depuis plus de 45 ans et que l’immense majorité de ses citoyens n’a jamais connu cette période maudite, il y aurait de quoi sourire si la situation n’était pas tragique.

Le pire, certainement – et le plus prometteur pour les islamistes – est que le pouvoir est en situation de vacances de fait. Ce n’est pas dévoiler un secret d’Etat que de dire que la santé du président Bouteflika laisse gravement à désirer, ce qui explique ses nombreuses absences, dans toutes les acceptions de ce terme. Le Calife, pardon, le Président règne, certes, mais, de fait, il ne gouverne plus. Ou peu. Le pouvoir étant structuré comme il l’est à Alger, les clans qui entourent la présidence – la haute hiérarchie militaire, le FLN, le lobby technico-pétrolier pour n’en citer que trois, mais l’on pourrait aussi évoquer les “pro-Français”, les “pro-Américains” et même, maintenant, les “pro-Russes”, regroupés autour du ministre de l’Intérieur, M. Yazid Zerhouni, grand admirateur de Vladimir Poutine et de son modèle d’Etat fort - se déchirent depuis des mois pour lui trouver un éventuel successeur. En vain.

Les mêmes, sentant le terrain se dérober sous leurs pieds, ont tendance à concentrer beaucoup d’énergie sur la recherche ou l’entretien de basesarrières – le plus souvent, dans le seizième arrondissement de Paris… – qui pourraient se révéler vitales pour leur survie si les choses tournaient vraiment mal. Il en résulte qu’une énergie considérable est perdue dans des négociations de faction et des arrangements d’arrière boutique. On remarquera encore que la mouvance islamiste a tellement bien compris que le président Bouteflika était peut-être, aujourd’hui, la dernière clé de voûte d’un système fragilisé que, le 6 septembre dernier, elle n’a pas hésité à essayer de s’en prendre au Président lui-même lors d’un attentat qui a tourné au carnage (une vingtaine de morts et 107 blessés) à Batna. Le calcul est clair: “tentons de hâter la venue du moment historique qui verra le régime totalement déstabilisé et plus fragilisé que jamais”.

Pendant ce temps, le pays n’est pas ou peu gouverné. En témoigne entre autres le fait qu’aucun successeur n’a été nommé pour remplacer feu le général Smaïn Lamari, décédé le 27 août, et qui, en sa qualité de numéro deux du Département de la Sécurité et du Renseignement (DRS), occupait une place centrale dans la lutte contre le terrorisme.

La nature a horreur du vide. Et la mouvance islamiste a fort bien compris qu’en concentrant son énergie pour frapper maintenant, à coups si possible redoublés, elle pouvait profiter de ce moment historique voire amplifier la crise. Que se passerait-il, par exemple, si demain, des expatriés, de préférence français, étaient enlevés et assassinés devant les caméras, à la mode irakienne? Chacun connaît la réponse à cette question.

Or, étant donné son importance propre et son poids énergétique, si l’Algérie bascule dans une nouvelle crise telle que celle qui l’a ensanglantée dans les années quatre-vingt-dix, c’est tout le Maghreb qui tremblera et l’Europe en subira, durement, le contrecoup. Pour cette raison, au moins, il faut, aujourd’hui, aider Alger – comme il faut conforter Rabat et Tunis – à dépasser ce cap dangereux et retrouver la stabilité menacée. Il importe donc de garder son calme, de rester en Algérie, bien entendu, mais aussi de faire comprendre à ceux qui sont au pouvoir à Alger que c’est à eux de reprendre l’initiative.

Pas seulement par la répression, indispensable au demeurant, mais également par des réformes intelligentes et nécessaires. Celles que le pays attend depuis plus de vingt ans.


Claude Moniquet, président de l’ESISC, est Senior Fellow à l’Atlantis Institute



Al-Qaida au Maghreb Islamique à l'automne 2007
L’Algérie a été frappée de plein fouet par deux attentats meurtriers, les 6 et 8 septembre derniers, causant la mort de plus de 52 personnes. Toutefois ces actions peuvent être analysées davantage comme un aveu de faiblesse que comme une preuve de bonne santé du mouvement Al-Qaida au Maghreb Islamique (AQMI)1. Les attentats suicide de Batna et de Dellys2 ont été le fait de kamikazes, c’est-à-dire d’une méthode importée depuis peu en Algérie, vraisemblablement par des activistes de retour d’Irak. L’utilisation de cette tactique prouve que les membres d’AQMI ont de plus en plus de mal à monter des opérations de guérilla comme ils le faisaient par le passé. Cela est du en grande partie au fait qu’à l’été 2007, AQMI a connu des revers importants sur le sol algérien. Cependant, ce net affaiblissement ne diminue en rien la menace terroriste que fait peser ce mouvement islamique radical, aussi bien en Algérie que sur les intérêts français à l’étranger, et plus encore, sur le sol national. En effet, étrillé en Algérie, AQMI peut très bien se refaire une légitimité en déclenchant des actions terroristes spectaculaires à l’étranger, et plus particulièrement en Europe et dans les autres pays du Maghreb.

Une importante série de revers

Le 30 juillet, les forces de sécurité algériennes abattent un des cerveaux d’AQMI dans la région d’Iboudranène, près de Tizi Ouzou, en Kabylie. Il s’agit de Rachid sid Ali - alias Ali Diss ou Abou Daddah - conseiller militaire du mouvement pour la 2 e région. Ce dernier aurait notamment organisé les attentats suicide d’Alger le 11 avril (33 morts) et contre une caserne de Lakhadaria, en Kabylie, le 11 juillet (10 morts). Au cours du même accrochage, Nour Mohamed - alias Haroun El Achaâchi - chargé de la logistique de la 2 e région est également tué. Ces deux hommes agissaient sous les ordres d’Abdelhamid Saadaoui - alias Abou El-Haytan Yahia - l’ancien émir de la 2 e région (Tébessa, Khenchela, Batna, Biskra et El-Oued à l’est d’Alger) devenu l’adjoint opérations d’AQMI et chef de la phalange Al Ansar. Malgré l’intense chasse à l’homme qui lui est livrée, Saadaoui est toujours libre3. Il a été remplacé à la tête de la 2 e région par Samir Sayoud, alias Abou Moussab. Cependant, ce dernier a été tué par les forces de sécurité en mai 2007. Un certain Harek Zobeir - alias Sofiane El-Fassila- a alors pris sa succession.

En juillet, Benmessaoud Abdelkader - dit Moussab Abou Daoud - le chef de la 9 e région (Sahara), se rend aux autorités algériennes. Très prolixe, il livre de nombreuses informations sur la vie du mouvement et les difficultés qu’il traverse. Selon son témoignage, à l’exception de la 2 e région, les unités d’AQMI manquent cruellement de moyens humains et logistiques. De plus, la motivation de ses membres présents sur le sol algérien est en train de s’émousser très sérieusement.

Les maquisards de la 7 e région ont également été rudement étrillés cet été dans la zone de Tébessa, considérée comme un refuge sûr pour certaines de ses katiba (compagnies).

En juin, l’émir de la 6 e région (Jijel), Houari Youssef - alias Abou Omeir - a été tué lors d’une embuscade tendue par l’Armée nationale populaire (ANP).

Début mai, Sami Sayoud présenté comme le numéro 2 d’AQMI a trouvé la mort à Si Mustapha à 60 Km à l’est d’Alger.

Abdelmalek Droukdel - alias Abou Moussab Abd El-Ouadoud - l’émir d’AQMI, serait en fait sensible à l’influence de Saadaoui cité plus haut. Ce dernier préfère agir en tant qu’« éminence grise » plutôt qu’apparaître au grand jour. Sa position officielle est celle d’adjoint « opérations » auprès de Droukdel.

Les deux hommes n’auraient aucune confiance en Moktar Belmokhtar (MBM) - alias Abou El Abbas - le responsable d’AQMI pour le Sahel. En effet, ce dernier songerait à négocier sa reddition avec Alger dans la mesure où il pourrait bénéficier d’une amnistie pour lui et ses hommes. Si ses conditions ne sont pas acceptées par Alger, MBM envisagerait de faire sécession en créant sa propre organisation. Pour l’instant, il semble appliquer la politique du « ni reddition ni action ».

Pour sa part, Hassan Hattab, le chef historique du GSPC, se serait rendu aux autorités dans la banlieue est d’Alger le 22 septembre. Cette « reddition » est très importante sur le plan psychologique, car elle peut pousser d’autres activistes à faire de même. Cependant, sur le plan opérationnel, elle ne change pas grand-chose. En effet, Hattab avait été mis sur la touche du GSPC en 2003 (il avait même été déclaré mort).

Les combattants étrangers qui ont rejoint le GSPC (des Libyens, des Tunisiens, des Maliens, des Marocains et des Mauritaniens) seraient très déçus par la tournure que prennent les évènements. Il est possible qu’ils rejoignent leur pays d’origine pour y poursuivre la lutte. Selon Benmessaoud (cité plus haut), ils seraient au nombre d’une cinquantaine et certains seraient déjà partis. Toujours selon la même source, les jeunes recrues attirées par l’appellation même d’Al-Qaida au Maghreb Islamique qui leur fait espérer de mener la guerre sainte internationale, seraient désappointées par ce que leurs chefs leur demandent de faire. En effet, en fait de djihad international -dont l’Irak reste pour eux l’exemple emblématique - ils se trouvent impliqués dans des attentats dirigés contre des concitoyens, parfois avec des objectifs qui sont loin d’être politiques ou religieux. En effet, l’entourage de Droukdel dévoierait la lutte dans des buts purement criminels destinés à enrichir les notables de Bordj Menaïel dont sont originaires la plupart des chefs de la 2 e région.

Cependant, Droukdel continue à menacer directement la France. Après la visite du président Sarkozy en Algérie, en juillet dernier, au cours de laquelle le chef de l’Etat français a proposé un projet d’« Union méditerranéenne », il a déclaré : «  ce traité serait un crime ajouté à longue liste des crimes commis par la France contre ce pays (l’Algérie) et constituerait une trahison du régime en place en Algérie ajouté à la longue liste des trahisons qu’il a déjà commis ». Globalement, il affirme que le rôle de la France présente un caractère « colonialiste » et « croisé ». Ce langage est un mélange de nationalisme anti-colonialiste et de zèle religieux salafiste.

Le docteur Ayman Al-Zawahiri, le numéro deux d’Al-Qaida et mentor officiel d’AQMI, reproche trois choses à la France : assister les Etats-Unis en Afghanistan, supporter la résolution 1701 des Nations Unies sur le Liban et s’attaquer aux droits des «  vrais musulmans » en prônant le sécularisme. Les deux leaders islamiques ont en conséquence placé la France en tête de liste des Etats à frapper. A la différence des GIA et du GSPC4, AQMI semble avoir fait passer la France au premier rang de ses objectifs, le pouvoir en place à Alger étant relégué en deuxième position. Cela est vraisemblablement dû à l’affaiblissement des infrastructures djihadistes au Maghreb laquelle s’est malheureusement accompagné, surtout depuis 2003, d’un renforcement des réseaux clandestins implantés en Europe, particulièrement en Allemagne et en Italie. Paris craint que les réseaux déjà implantés en Europe ne reçoivent le renfort d’activistes islamiques libérés dans le cadre de la politique de réconciliation nationale prônée par Alger. De plus, des militants condamnés et incarcérés en France pour leur participation aux attentats de 1995-96 et aux tentatives de complots déjoués en 1998 devraient bientôt recouvrer la liberté ayant purgé leurs différentes peines de prison. Dans l’avenir, l’association de ces deux catégories d’individus pourrait être « explosive ». En effet, les premiers apporteraient avec eux leur technicité et leur fanatisme, les seconds leur connaissance du terrain et les réseaux qu’ils ont pu créer en prison.

Afin de mériter la confiance qu’Ayman Al-Zawahiri a placée en lui lorsqu’il a officiellement fait allégeance à Al-Qaida, le 11 septembre 2006, Droukdel, faute de moyens suffisants ne peut obtenir de résultats significatifs en Algérie, doit donc internationaliser son action. Il semble que la France constitue l’objectif de choix d’autant que Zawahiri a nommément désigné notre pays comme une cible prioritaire.

Enfin, en Algérie même, AQMI devrait se réorganiser en huit zones militaires et une «  brigade pétrolière » dont l’objectif serait de s’en prendre aux installations pétrochimiques du pays. Les derniers évènements laissent craindre que la tactique qui sera privilégiée sera celle des attentats-suicide.

Alain Rodier
Octobre 2007

source : http://www.cf2r.org/fr/article/article-Al-Qaida-au-Maghreb-Islamique-automne-2007-3-106.php

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S
Il y a actuellement plus de 100 000 chinois travaillant en Algérie.Le rapport professionnels entre les asiatiques et les algériens se dégrade lentement mais sûrement.Les chinois trouvent les algériens fainéants, et estiment travailler plus de 2 fois plus qu'eux dans le même laps de temps.Les algériens, passée à lune de miel ... commencent à s'inquiéter de cette présence sur leur sol, des moyens que les chinois ont à leur disposition (ils peuvent tout acheter, ils tiennent les finances) et commencent à vouloir un  "quota" limité de chinois sur leur sol, de limitation de cette présence et de ses moyens...Ce que la Chine évidemment n'entend pas.Le "conflit" en germe est prioritairement , majoritairement accès sur le BTP mais pourrait bien vite s'étendre.A quand les premiers heurts?L'Islamisme peut il se risquer contre des Chinois. C'est un schéma géopolitique que je ne me représente pas.
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