Dalil Boubakeur, recteur de la Grande Mosquée de Paris, président du conseil français du culte musulman (CFCM) depuis son origine a lancé l'idée d'un "moratoire de dix ou vingt ans" sur la loi de 1905, qui interdit tout financement public des lieux de culte, afin d'opérer un "rattrapage" des besoins de l'islam : « Il faut donner un peu de respiration aux associations qui gèrent les lieux de culte ».
Une telle initiative serait complètement contraire à l’article 2 de la loi de 1905 sur la séparation des Eglises et de l'Etat (qui ne s'applique ni en Alsace ni en Moselle, encore sous le régime concordataire) qui précise que «la République ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte», cette interdiction de financement public concernant toutes les religions.
A priori, peu de chances donc, pour cette demande dérogatoire aboutisse. Sauf que Les récents propos de N.Sarkozy à Latran (1), tenus donc en tant que chef d’Etat, ont ouvert une brèche dans la laïcité républicaine, dans laquelle D.Boubakeur s’est engouffré. D’autant que ces propos ont été relayés par M.Alliot-Marie, ministre de l’Intérieur, chargée des cultes, qui a déclaré (2): « Depuis 1905, la société a changé. Certaines modalités de la loi de 1905, qui créent des entraves à l’exercice des cultes, doivent être adaptées » et qui estime que la séparation entre associations cultuelles et culturelles «mérite sans doute d’être revue» (les associations cultuelles ne peuvent pas recevoir de subventions publiques, tandis que les associations culturelles le peuvent, elles) au nom d’une laïcité tolérante. Propos repris par Emmanuelle Mignon qui a confirmé : « Le président a la volonté d'avancer sur les conditions d'application de la loi de 1905. Et notamment en élargissant la notion d'association cultuelle ».
D.Boubakeur, tente donc sa chance, se présentant en musulman modéré, habillant sa demande de progressisme et de tolérance et même de laïcité ! Son propos est d’autant plus intéressant qu’il provient de la même personne qui justifiait la fatwa contre Salman Rushdie en 1989, qui a lutté contre la loi contre le voile à l’école, qui a manifesté contre le Pacs, qui a porté plainte pour injures raciales contre Charlie Hebdo pour avoir publié les caricatures de Mahomet !
Actuellement, faute de fonds publics, le budget de construction des mosquées en France provient des communautés elles-mêmes, des pays musulmans et des ONG islamiques. Par exemple, la mosquée de Lyon a été financée très largement par l'Arabie saoudite, et celle d'Evry par la Ligue islamique mondiale. En fait, les villes sont de plus en plus souvent confrontées à des projets de création d'édifices cultuels, des mosquées bien sûr, mais aussi des temples évangéliques, de plus en plus présents. Après s'être longtemps montrées réticentes, de nombreuses municipalités apportent désormais leur soutien financier, dans un souci d'intégration ce qui leur vaut des plaintes (en cours à Alfortville, l’une visant l'annulation du permis de construire de la mosquée, l'autre à prononcer l'illégalité du financement d'un lieu de culte par la Mairie) et des remises en cause par différentes juridictions administrative des baux consentis.(3)
Il est temps que la laïcité retrouve ses lettres de noblesse : L’Etat garantit la liberté de culte car c’est une liberté fondamentale qui comme telle, figure dans la déclaration des “Droits de l’homme et du citoyen” mais n’en finance aucun. Le consentement à l’impôt étant la base du principe républicain, dans une république laïque, comme la France, les religions sont résolument hors du champ de la puissance publique.
(1) “Dans la transmission des valeurs et l'apprentissage de la différence entre le bien et le mal, l'instituteur ne pourra jamais remplacer le curé ou le pasteur, même s'il est important qu'il s'en approche, parce qu'il manquera toujours la radicalité du sacrifice de sa vie et le charisme d'un engagement porté par l'espérance.»
(2) Le Canard enchainé 23/01/08
(3) Le bail accordé par le conseil municipal de Marseille à la mosquée est annulé le 17 avril 2007, et le 26 juin dernier le tribunal administratif de Cergy-Pontoise annule le bail emphytéotique consentit pour la construction de la mosquée de Montreuil (Seine-Saint-Denis)
CFCM : l'erreur de Sarkozy
par Pierre Lance
Notre Ministre de l'Intérieur a multiplié les efforts pour que se constitue un " Conseil français du culte musulman ". C'est la vieille manie des hommes de l'État : Ils veulent toujours avoir en face d'eux des " représentatifs ", des notables qui se donneront de l'importance et avec lesquels on pourra discuter, négocier, " s'arranger ", en comptant sur eux pour qu'ils fassent avaler à leurs " mandants " les compromis adoptés. C'est cette même politique qui a donné aux grandes centrales syndicales une " représentativité " artificielle, sans commune mesure avec le nombre anémique de leurs adhérents, et qui a permis la constitution de féodalités aussi arrogantes que parasitaires (comme, par exemple, le Comité d'entreprise d'EDF, noyauté par la CGT et le PC, qui subtilise aux Français 1 % du montant de leur consommation électrique, soit 400 millions d'euros par an !).
Le Conseil musulman sera-t-il une féodalité de ce genre ? C'est très probable. Avec une conséquence infiniment plus grave : c'est que cet organisme va favoriser l'islamisation des jeunes d'origine maghrébine et africaine, qu'il faudrait tout au contraire libérer de l'emprise d'une des religions les plus obscurantistes qui soient. Si certains augures s'imaginent que l'existence de ce Conseil va favoriser l'intégration à la nation française de ces jeunes issus de l'immigration, je propose qu'on leur décerne la médaille d'or aux Jeux olympiques de la Naïveté, où la concurrence est pourtant sévère. Car, par la simple logique des choses, il est inéluctable que cet organisme aboutisse à particulariser plus encore la population concernée et la sépare radicalement de l'ensemble des citoyens, créant une sorte de " ghetto mental " de personnes inintégrables.
Les Maghrébins ne sont pas tous Arabes
Les bons apôtres de l'intégration nous citent volontiers des exemples de Maghrébins parfaitement intégrés à notre culture. J'en connais moi-même plusieurs, en effet. Or, je suis frappé de constater que ces personnes sont le plus souvent des Kabyles. Mais les Kabyles ne sont nullement des Arabes. Ce sont des Berbères, appartenant à l'une des plus anciennes ethnies d'Afrique du Nord et dont l'origine se perd dans la nuit des temps. Certains auteurs les considèrent comme les fondateurs des premières civilisations égyptiennes. Ils ont au cours des siècles vaillamment résisté aux vagues conquérantes successives : Phéniciens, Romains, Vandales, Arabes, Turcs, Français.
Aujourd'hui encore, nul n'ignore que les Kabyles revendiquent vigoureusement leur autonomie culturelle, juridique et linguistique. Sur le plan physique, une proportion non négligeable de Kabyles présente des caractères européens : grande taille, teint et yeux clairs, parfois même cheveux blonds.
Les invasions eurent pour effet de concentrer les Kabyles dans les zones montagneuses (notamment les Aurès) et ils ne furent islamisés qu'au xiie siècle, soit environ quatre siècles après la conquête arabe. Encore faut-il préciser que cette islamisation est toute relative, et largement remise en question aujourd'hui par la jeunesse kabyle. De nombreux intellectuels kabyles sont libre-penseurs ou agnostiques.
Alain Mahé, chercheur associé à l'IRMC, écrit pour sa part : " À l'inverse des législations inspirées par les traditions islamiques, les droits berbères et le droit kabyle en particulier, seraient le produit d'une activité profane et séculière. À ce titre, et à la différence du droit musulman figé dans son caractère de droit révélé, ils sont toujours susceptibles d'être amendés et évoluent au gré des dispositions des assemblées qui les édictent ".
Or, il faut rappeler que sur 30 millions d'Algériens, il y a 12 millions de Kabyles, soit un gros tiers de la population. À l'époque de la colonisation, la grande erreur de la France fut de favoriser l'Islam. Va-t-elle recommencer aujourd'hui la même erreur en métropole ?
C'est au contraire la laïcité républicaine rigoureusement observée qui doit s'imposer comme premier facteur d'intégration. Elle favorisera celle des Kabyles. Mais prendre exemple de cette intégration pour prétendre qu'elle est extensible aux Arabes qui demeurent musulmans pratiquants est un non-sens. La religion musulmane, ne serait-ce que par le statut inférieur et dépendant qu'elle attribue à la femme, rend totalement impossible l'intégration de ses adeptes à la civilisation française et européenne. Les politiciens qui ne comprennent pas cela ne font qu'étaler sur la place publique leur ignorance crasse de l'histoire des civilisations et des peuples.
Pierre Lance
source : les 4 vérités