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par Daniel Pipes,
Jerusalem Post, 11 octobre 2007
VO: http://www.danielpipes.org/article/4997
«Nous sommes tous des Keynésiens, à présent», avait déclaré Richard Nixon juste avant que les théories économiques de John Maynard Keynes tombent en discrédit. De même, en 1989, à l’heure où Israël était largement accepté, on aurait pu dire avec une égale assurance: «Nous sommes tous des sionistes, à présent.»
Ce n’est plus le cas. Israël est assiégé à de nombreux égards: par les Iraniens qui préparent une bombe nucléaire, par les Syriens qui accumulent des armes chimiques, par les Égyptiens et les Saoudiens qui s’équipent de moyens militaires conventionnels considérables, par le Hezbollah qui attaque depuis le Liban, par le Fatah depuis la Cisjordanie, par le Hamas depuis Gaza et par les citoyens israéliens musulmans qui s’agitent politiquement et se font plus violents.
Dans le monde entier, des professeurs, des éditorialistes et des bureaucrates de ministères des affaires étrangères remettent en question la pérennité de l’État juif. Même des gouvernements amis, notamment l’administration Bush, se lancent dans des initiatives diplomatiques qui sapent la capacité de dissuasion israélienne alors même que leurs ventes d’armes fragilisent sa sécurité.
Mais supposons que le pays parvienne à maîtriser toutes ces difficultés. Il lui reste son principal défi: une population juive de plus en plus désenchantée, déçue et même embarrassée par l’idéologie fondatrice du pays, le sionisme, le mouvement national juif.
Développée par Theodor Herzl (1860-1904) et d’autres théoriciens, la vision d’un État juif souverain transportée par le sionisme répondait au contexte politique et à l’humeur de son temps. Si les Chinois, les Arabes et les Irlandais voulaient établir leur nation, pourquoi pas les Juifs?
Et même surtout les Juifs car, plus que tout autre peuple, ils avaient payé le prix fort pour leur faiblesse politique, avaient été expulsés, maltraités, persécutés et massacrés en masse comme aucune autre communauté. Le sionisme offrait un moyen d’échapper à cette histoire tragique en se dressant l’arme à la main.
Dès sa création, le sionisme a eu son lot d’opposants juifs, depuis les haredim (ultra-orthodoxes) jusqu’aux rabbins réformistes en passant par les Irakiens nostalgiques. Mais, jusqu’à récemment, ces éléments restaient marginaux. Aujourd’hui, en raison des taux de natalité, la communauté haredi autrefois minuscule constitue 22% des élèves de première année en Israël. En ajoutant à cela le nombre à peu près équivalent d’élèves arabes de première année, on voit se dessiner des changements radicaux dans la politique israélienne à l’horizon de 2025.
Pire encore pour Israël, le nationalisme juif a perdu le soutien quasi-automatique dont il jouissait autrefois parmi les Juifs laïques, qui sont nombreux à juger dépassée son idéologie du XIXe siècle. Certains acceptent l’argument aux termes duquel un État juif constitue un suprématisme raciste ou ethnique, d’autres sont séduits par des solutions universalistes et multiculturelles. Voici quelques signes des changements en cours:
- Les jeunes Israéliens évitent le service militaire en nombres record – 26% des hommes et 43% des femmes en âge de servir n’ont pas été incorporés en 2006. Alarmées, les forces de défense israéliennes ont demandé que la législation refuse les prestations étatiques aux Israéliens juifs qui ne servent pas le pays.
- Le ministre de la justice israélien Menachem Mazuz a compromis le travail du Fonds national juif, l’une des institutions sionistes pionnières (fondée en 1901) en décidant que son rôle, qui consiste à acquérir des terres destinées à des Juifs, ne pourrait plus recevoir le soutien de l’État.
- Des historiens de premier plan s’attachent à montrer qu’Israël a été conçu dans le péché et a constitué un élément nuisible.
- Le ministre israélien de l’éducation a approuvé des manuels scolaires destinés à des élèves arabes de troisième année qui présentent la création d’Israël, en 1948, comme une «catastrophe» (naqba en arabe).
- Avraham Burg, fils d’une famille sioniste de grand renom et lui-même figure importante du Parti travailliste, a publié un livre comparant Israël à l’Allemagne des années 1930.
- Un sondage de 2004 a révélé que seuls 17% des Juifs américains se disent «sionistes».
Dans un contexte plus large, cet éloignement du sionisme reflète les tendances à l’œuvre dans d’autres pays occidentaux, où le patriotisme à l’ancienne et la fierté nationale sont également en recul. En Europe occidentale, les citoyens tendent à ne distinguer que peu, voire pas du tout de valeur dans leur propre histoire, leurs propres us et coutumes. Par exemple, le mois dernier, la princesse Máxima des Pays-Bas, l’épouse de l’héritier du trône, annonça sous les acclamations que «l’identité néerlandaise n’existe pas». Ce déclin du patriotisme généralisé dans tout l’Occident aggrave la situation délicate d’Israël en suggérant que son évolution s’inscrit dans une tendance plus vaste et donc d’autant plus difficile à contrer ou à renverser.
Par-dessus le marché, les Arabes progressent actuellement dans le sens opposé et se dirigent vers des sommets de bellicosité ethnique et religieuse.
En tant que sioniste, j’observe ces tendances avec inquiétude pour l’avenir d’Israël.
Je me rassure en me rappelant que bien peu des problèmes actuels étaient évidents en 1989. Peut-être que d’ici 2025, les perspectives du sionisme se seront à nouveau largement ouvertes, à mesure que les Occidentaux en général et les Israéliens en particulier s’éveilleront enfin aux dangers engendrés par les irrédentistes palestiniens, les djihadistes et autres moyen-orientaux extrémistes.
La Turquie, l'Irak et les Kurdes : quelques rappels d'André Nahum, à l'heure d'une très grave crise régionale
Bonjour,
Comme si les Etats-Unis n'avaient pas assez de problèmes en Irak, voilà que se profile maintenant la possibilité d'une attaque d'envergure de l'armée turque sur le Nord du pays afin de chasser les combattants du PKK de leur sanctuaire.
Dimanche dernier, les rebelles kurdes avaient monté une embuscade qui s'est soldée par la mort de 15 soldats turcs et la capture de huit autres. C'est plus qu'il n'en fallait pour exacerber le ressentiment de l'armée et du peuple turcs qui réclament maintenant une intervention énergique.
On comprend l'embarras du gouvernement de Bagdad sur lequel Ankara exerce sa pression ainsi que sur les Etats-Unis pour qu'ils mettent un terme à l'activité du PKK dans le Turkistan irakien et que ses combattants soient expulsés.
Situation difficile quand on sait que cette région jouit d'une très large autonomie, qu' elle est la seule qui reste relativement calme et que le président de l'etat irakien est lui-même kurde.
Le gouvernement irakien ne peut pas se payer le luxe d'une crise avec la Turquie, d'un nouveau conflit et d'un nouveau front. Les USA ne peuvent se permettre de se brouiller avec leurs alliés turcs qui sont membres de l'OTAN, et l'un des très rares pays à majorité musulmane à se proclamer laïc malgré la preponderance croissante des fondamentalistes et qui ont très mal vécu un vote du Congrès américain appelant à reconnaitre le génocide arménien. Mais qui est ce PKK et que représente-t-il ?
Souvenons nous que le peuple kurde qui vivait groupé jusqu'au17ème siècle à l'intérieur de l'Empire Ottoman est écartelé depuis les années 1920 entre la Turquie, l'Iran, l'Irak et la Syrie.
Apres la première guerre mondiale les Français et les Britanniques ont dépecé l'empire turc vaincu et remodelé la carte du Moyen-Orient; MM Sykes et Picot qui ont dessiné les frontières des nouveaux Etats, aveuglés par les problèmes de pétrole, par leurs intérets nationaux et la nécessité de récompenser les cheikhs arabes qui les avaient soutenus pendant la guerre et auxquels il fallait donner des trônes, ont complètement occulté les droits des kurdes.
Dans les années vingt, on a créé de toutes pieces un Etat irakien en réunissant artificiellement des populations et des provinces qui n'avaient rien de commun entre elles sinon leur appartenance à l'islam et la richesse de leur sous-sol en hydrocarbures et le seul peuple qui aurait dû bénéficier d'un Etat cohérent n'a pas été entendu. Après la chute de Saddam Hussein, qui les avait asservis et souvent massacrés, les Kurdes d'Irak ont gagné avec l'aide des Américains une quasi-indépendance à l'intérieur de l'Etat irakien, ce qui ne peut qu'attiser les rancoeurs et les envies de leurs frères de Turquie, d'Iran et de Syrie.
En Turquie, ils sont 20 millions environ le quart de la population. Bien qu'ils aient actuellement 20 députés au parlement groupés sous la bannière du DTP, leur organisation politique, ils ne bénéficient nullement des droits des minorités, de la reconnaissance de leur personnalité au sein de la nation et de leur langue le kumaci . Le PKK fondé en 1978 par Abdullan Oçalan, aujourd'hui emprisonné à vie après avoir été condamné à la peine de mort, est passé à l'action violente multipliant les attentats et les embuscades. Sous les pressions américaines et irakiennes, Il vient de proclamer qu'il est prêt aujourd'hui à un arrêt des hostilités. Une offre que le gouvernement turc a rejeté. L'essentiel pour lui, s'il ne veut pas perdre la face est dans l'immédiat la récupération de ses huit captifs.
L'Administration américaine a tout intérêt de calmer la situation, obtenir par la négociation le retour des soldats turcs retenus par le PKK, et un retour au calme sur la frontière. Elle s'y emploie certainement. Mais même si elle y arrive, cela ne résoudra pas le problème de fond, remis à l'ordre du jour par l'émergence en Irak d'une entité kurde quasi-indépendante. Il ne peut être résolu que par une négociation nationale, en Turquie même et internationale.
André Nahum
source : http://rencontrejfm.blogspot.com/2006/01/la-turquie-lirak-et-les-kurdes-quelques.html