Le Monde, 16 octobre 2007
"Le XXIe siècle est un siècle de pénurie alimentaire". Bruno Parmentier, auteur de Nourrir l'humanité (La Découverte, 2007), décrit les causes de l'insécurité alimentaire qui menace l'humanité. Il plaide en faveur des OGM pour produire les agrocarburants nécessaires face à une future pénurie de pétrole.
Milliere Guy - mardi 16 octobre 2007
ecologieL’environnementalisme est une idéologie totalitaire, donc imperméable à toute forme de réfutation. Il échappe à ce que Karl Popper appelle la « falsifiabilité ». Cela rend quasiment inutile toute tentative de faire des contre-démonstrations ou de parler en s’appuyant sur des faits. Je sais aussi que, comme diverses idéologies totalitaires antécédentes, l’environnementalisme a su recruter des scientifiques qui, vendant leur âme au diable, n’hésitent pas à recourir à diverses falsifications et autres travestissements pour servir ce qu’ils estiment être la Cause : ils ne sont pas les premiers à se comporter ainsi, le marxisme-léninisme a eu ses Lyssenko et ses Mitchourine, le nazisme ses médecins psychopathes et meurtriers façon Docteur Mengele.
J’ai néanmoins espéré que la vague montante finirait par se briser avant d’avoir fait trop de dégâts. J’ai pensé qu’en adressant des mises en garde aux gens encore non contaminés par l’idéologie, et qu’en rappelant le caractère profondément destructeur d’idéologies totalitaires passées, il serait possible de dresser des garde-fous. J’ai pris comme des signes encourageants le succès planétaire du livre de Bjorn Lomborg, « L’environnementaliste sceptique », et l’existence en France de quelques ouvrages émanant d’esprits libres tels que Claude Allègre, Cécile Philippe ou, plus récemment, Christian Gérondeau.
Mais la vague continue à monter. On ne peut, en France, ouvrir la radio ou la télévision sans entendre parler de « réchauffement global dû aux activités humaines », des méfaits du dioxyde de carbone, des bienfaits du vélo et des éoliennes. Un « Grenelle de l’environnement » a été organisé à Paris dont les résultats seront bientôt connus, et dont on peut d’ores et déjà attendre le pire. Des réunions planétaires sont organisées sous l’égide de l’ONU. Et maintenant, comme si tout cela n’était pas amplement suffisant, Al Gore se voit décerner le prix Nobel de la paix.
On pourra me dire que ce n’est pas la première fois que le comité Nobel se déshonore : parmi les prédécesseurs de Gore, on trouve Yasser Arafat, l’inventeur du terrorisme moderne (superbe contribution à la « paix »), et Jimmy Carter à qui on doit cette autre extraordinaire contribution à la paix qu’est le régime des mollahs en Iran. Néanmoins, c’est la première fois que le comité Nobel récompense quelqu’un qui prend la pose d’un faux prophète à l’échelle planétaire.
C’est la première fois qu’il salue l’entreprise d’une personne dont toutes les actions vont à l’encontre de la recherche scientifique dans des domaines cruciaux tels que la médecine, la chimie ou la physique, qui font eux-mêmes l’objet de prix Nobel. C’est aussi la première fois que le tenant d’un discours aussi radicalement et explicitement anti-humaniste se trouve ainsi mis en avant.
À l’échelle française, cela encouragera ceux qui voudraient que nous nous mettions tous à la pédale, que nous nous éclairions à la bougie, que nous mangions « bio », que nous arrêtions de voyager, que nous renoncions au nucléaire et, pourquoi pas, à l’électricité.
À l’échelle planétaire, on prétendra davantage encore « combattre » l’effet de serre en dépensant des milliards de dollars qui auraient été bien plus utiles pour donner à manger à ceux qui ont faim ou soigner ceux qui sont malades, et on condamnera davantage encore des millions de gens qui n’ont pas eu accès au progrès scientifique à une mort certaine.
Derrière les grandes cérémonies des gourous de l’idéologie environnementaliste, il y a une face cachée, et celle-ci est un grand crime contre l’humanité en train de se commettre.
Que les Européens confrontés à l’hiver démographique et à la montée de l’islam radical choisissent la voie du suicide collectif est ridicule et pitoyable. Qu’un ancien vice-président du pays le plus riche et le plus innovant du monde veuille entraîner son pays sur la voie d’un suicide identique est absolument lamentable.
Qu’au nom de lubies suicidaires de gens riches, on condamne tant de pauvres au désespoir et au néant est scandaleux et répugnant. Ce dont les plus pauvres sur la planète ont besoin, c’est de développement économique, d’innovations technologiques, de sources d’énergie performantes, de réfrigération, d’eau potable, pas d’idéologues.
Milliere Guy - mardi 09 octobre 2007
Fin août, Jacques Garello a organisé, cette année encore, à Aix-en-Provence, l’Université d’été de la Nouvelle Économie. C’était la trentième fois que cet événement avait lieu. En trois décennies, la plupart des grands esprits de la fin du XXe siècle y ont débattu. Une profusion d’idées s’est trouvée énoncée, et des propositions ont été élaborées, des hommes et des femmes se sont ouverts à une connaissance qui, parce qu’elle était celle de la liberté, leur a donné accès à leur libre-arbitre. Jacques Garello, et tous ceux qui ont collaboré, peuvent être fiers de ce qu’ils ont accompli.
L’université d’été de cette année était consacrée à la mondialisation. Ce thème était approprié, d’abord parce que les amis de la liberté l’ont laissé trop souvent aux obscurantistes, aux totalitaires, aux dictateurs de « l’altermondialisme », ce qui n’a pas été sans conséquences sur la façon pervertie dont la population française voit l’économie globalisée. Il l’était aussi parce que la mondialisation ne cesse de s’accélérer, avec pour implication principale que les pays où on ne comprend pas les mutations en cours risquent fort de se trouver confrontés à des problèmes croissants, voire à un déclin brutal. Il l’était, surtout, parce que la France vit son ultime chance de redresser une situation déjà fort compromise.
Les travaux ayant été féconds, et l’heure étant grave, on ne peut que regretter qu’un seul membre du gouvernement se soit rendu à Aix. Les hommes politiques présents auraient pu se compter sur les doigts d’une seule main, les journalistes aussi. Ces regrets génèrent une inquiétude : si aussi peu de gouvernants, de ministres et de journalistes portent intérêt à des travaux féconds, cela n’aurait-il pas une signification ?
Il m’arrive de me demander si la France peut encore être sauvée ; de considérer que le malade « France » est dans un état désespéré ; de penser que l’absence d’intérêt de l’élite du pays pour le débat des idées (ou, pire encore, l’intérêt qu’ils s’obstinent à porter à des idées frelatées) fait que l’avenir est sombre.
Voici quelques mois, Jacques Garello se demandait si nous, libéraux, avions échoué. Je lui avais répondu que non : les idées énoncées à Aix sont également énoncées en mille points du monde et elles ont montré leur validité et leur poids d’espérance pour les opprimés et les miséreux.
Grâce à Jacques Garello, à son opiniâtreté, à d’autres penseurs et économistes tels que, Pascal Salin, Henri Lepage, Florin Aftalion, Jean-François Revel… la liberté n’est pas morte en France. Si la France devait continuer à s’éteindre, ce ne serait pas un échec de ceux qui ont fait vivre la liberté, mais, au contraire, l’échec de ceux qui n’auraient pas saisi les opportunités qui s’offraient. Comme Jacques, comme ceux qui ont travaillé à ses côtés, je vais continuer à œuvrer pour la liberté. L’avenir devrait dire si les blocages et les opacités omniprésents dans de ce pays ont une chance de se dissoudre.
Ultime chance, disais-je : les travaux et les exposés de l’université d’été n’ont pu que renforcer ce sentiment d’urgence. On peut être optimiste quant à ce que la mondialisation apportera à des millions d’êtres humains. Il sera difficile de ne pas être pessimiste pour la France. Mais cela n’empêche pas d’agir, ne serait-ce que pour se dire qu’on a fait son possible, et que, parfois, l’opiniâtreté paie.
Qui, voici trente ans, aurait imaginé que l’Europe centrale serait libérée du communisme, que les dictatures auraient reflué, ou que des inventeurs et entrepreneurs géniaux feraient advenir internet, la micro-informatique et l’ère des biotechnologies ?