Milliere Guy - mercredi 05 septembre 2007
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Les analyses de la presse française sur la présidence Bush sont toujours aussi myopes. Elles s’accompagnent d’un discours asthénique sur les perspectives de l’élection présidentielle de 2008, et sur le statut de la guerre en Irak.
Commençons par Bush, qu’on présente comme « en échec » ou « en fin de parcours » : on oublie, en France, que, depuis longtemps, tous les présidents des États-Unis, au cours de leur second mandat, connaissent des difficultés diverses, liées le plus souvent au fait qu’ils ne peuvent se représenter, et que se prépare leur succession. Le parti d’opposition fait feu de tous bois parce qu’il espère provoquer une alternance. Les membres du parti au pouvoir se donnent les moyens de souligner leurs différences. Cela s’accompagne de manœuvres, de recours spécieux à la justice et de commentaires sans merci. Il en a été ainsi, par exemple, pour Reagan. Il en est ainsi pour Bush aujourd’hui.
Les démocrates étaient hostiles à Reagan à la fin des années 1980. Ils sont très hostiles à Bush vingt ans plus tard. C’est logique. Les républicains, à la même époque, cherchaient à se différencier de Reagan : ils cherchent aujourd’hui à se démarquer de Bush. C’est logique, encore. Des conseillers de Reagan se sont retrouvés devant la justice. Des gens de l’entourage de Bush se sont, eux aussi, retrouvés devant la justice. C’est logique, toujours, hélas. La presse américaine, penchant à gauche à l’époque, a été féroce avec Reagan et l’a traité d’idiot. Encore plus à gauche aujourd’hui, elle est odieuse avec Bush et le traite de crétin. C’est tristement « normal ». La fin des années Clinton correspond au même scénario : la différence tient seulement à ce que Clinton était de gauche, et avait donc les faveurs des journaux américains et français. Le temps de l’histoire pour les présidents américains, vient plus tard, après qu’ils aient quitté le pouvoir : seuls ceux qui savaient se détacher de l’immédiateté pouvaient discerner d’emblée au temps de Reagan que celui-ci était un grand homme. Seuls ceux qui savent aujourd’hui se détacher de l’immédiateté peuvent déchiffrer ce qui fera la marque véritable de la présidence Bush. Ceux qui sont dans l’immédiateté, et qui bêlent avec les moutons de Panurge, ne peuvent rien voir, bien sûr.
Ils ne voient pas grand-chose non plus concernant les perspectives de 2008. Après s’être entichés de Barack Obama (il est beau, il est noir, il parle comme un Européen mou) sans s’apercevoir qu’il était incompétent, mettent désormais tous leurs espoirs dans Hillary Clinton et ne discernent pas qu’elle est loin d’avoir partie gagnée : parce qu’elle n’est pas aimable, parce qu’elle et son parti sont trop à gauche pour la classe moyenne américaine. Ils ne discernent pas non plus qu’il existe, au sein du parti républicain, plusieurs candidats qui, avec des nuances qui leur sont propres, prolongent la stratégie de guerre contre l’islamo-terrorisme et le « conservatisme compassionnel » élaborés par Bush. Et ils semblent ne pas prêter attention au fait que le mieux placé de ces candidats, Rudy Giuliani, apparaît en mesure de battre Hillary Clinton.
Ceux qui sont dans l’immédiateté n’ont, cela va de soi, toujours rien compris à la guerre d’Irak : j’y reviendrai pour ceux qui ont l’esprit ouvert (les autres m’indiffèrent). Ce que j’en dirai ici est que
1. la libération du peuple irakien et le changement de régime en Irak ont été et restent de bonnes choses,
2. des erreurs ont été faites pendant la réorganisation du pays, et seuls les stratèges de bistro ne font pas d’erreurs,
3. Le terrorisme a eu des accalmies et des retours de flamme, mais il est un terrorisme, pas une « résistance », et il fait partie intégrante du terrorisme islamiste avec lequel nous sommes en guerre
3. la stratégie du général Petraeus mise en œuvre depuis janvier, porte ses fruits,
4. une guerre se juge quand elle est arrivée à son terme et quand, comme pour les présidences des États-Unis, vient le moment de l’histoire. La pacification de l’Irak nouveau n’est pas achevée. La guerre contre l’islamo-terrorisme non plus. Cela se trouve largement compris aux États-Unis, où même la gauche commence à percevoir que le défaitisme et le dénigrement sont suicidaires et ne paient pas électoralement. La France reste marquée par le défaitisme et le dénigrement, et on y compte nombre de stratèges de bistro.