07/01/2006
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Voici donc la suite, en somme, rédigée par Francis Moury, de la série intitulée Bellum civile (ou Civil War in France) à laquelle participèrent Serge Rivron, Raphaël Dargent, Moussa Diabira (qui en fait m'envoya sa propre réaction à l'ensemble du dossier) et enfin ce même Francis Moury.
Cet article de mon ami, je le dis d'entrée pour les prudents et les habituels imbéciles qui me traiteront de séide de l'extrême-droite ou, à tout le moins, d'apôtre de la Réaction, cet article écrivais-je est extrême si l'on veut, mais pas extrémiste, ce dernier camp s'étant à mes yeux presque toujours caractérisé par une absence notable de pensée argumentée ou alors exposant une pensée faussement, en apparence seulement vertébrée, en fait bâtie, comme celle qu'elle prétend combattre, sur de ridicules sophismes. C'est bien sûr, sous la plume de notre érudit, tout le contraire qui nous est exposé.
Une fois de plus, je suis prêt, avec grand plaisir je dois le dire, à publier sur le Stalker toute réponse ayant au moins les qualités rédactionnelle et argumentative témoignées par le texte de Francis, et ce qu'importe que la thèse exposée lui soit radicalement opposée. J'attends même, avec une immense convoitise, que l'on me mette sous le nez ce texte que j'espère maintenant depuis des semaines, voire des mois. J'imagine que les imbéciles auront alors quelque peine (encore que, la qualité de l'imbécile étant sa mauvaise foi à toute épreuve, je risque sans doute d'être déçu...) à bêler en tenant leur seule et monotone note, celle de l'indignation légitime propre aux moutons débonnaires, je veux dire de gauche, si j'autorise ainsi leur bêlement à amuser les bêtes sauvages qui hantent la Zone.
Nous verrons bien du reste mais je doute que la Zone devienne jamais la dernière réserve où les moutons, protégés et dûment tatoués, brouteront paisiblement leur mouchoir d'herbe.
Un dernier mot. J'ai posté ce message, en réaction (bien sûr) à l'infecte papier signé par le non moins dégoûtant Pierre Marcelle, dans sa rubrique Rebonds du 6 janvier (sur Libération bien évidemment) où, en quelques mots d'une absolue mauvaise foi, Marcelle met en doute la réalité de l'agression subie par plusieurs centaines de passagers.
Voici : «Décidément, vous êtes un personnage parfaitement immonde...
Plutôt que de raconter d'hallucinantes crétineries (l'hallucination est plutôt à chercher de ce côté-ci, celui de votre esprit larvesque...), venez donc lire un papier qui ouvrira grands vos petits yeux myopes (suit le lien vers le texte de F. Moury). Inutile de vous dire que, si j'ai quelque vœu à formuler pour 2006, je souhaite ardemment que vous viviez le genre d'expérience que vous moquez : Pierre Marcelle coincé par une dizaine de CPF (ou chances pour la France). Avertissez-nous je vous prie, la vidéo de la sévère mais juste correction à vous infligée vaudra sans doute son pesant d'euros sur l'avatar numérique que vous moquez également... Bien sûr alors, puisque vous êtes intégralement ignoble, il y a fort à penser que les gentils sauvageons ou le pudique jeunes éméchés de l'AFP se transformeront immédiatement, sous votre plume devenue tout à coup bizarrement droiturière, en sauvages, voire criminels en puissance.
Ne vous a-t-on jamais dit que vos textes étaient à vomir ?
Sans doute oui. Voilà qui est fait une nouvelle fois.»
«[…] Ah ! Ce que tu viens de dire, Socrate, est une parfaite image de la tactique. À la guerre en effet, il faut placer les meilleurs soldats en tête et en queue et les plus mauvais au milieu, afin qu’ils soient entraînés par les uns et poussés par les autres. – C’est bien, reprit Socrate, si on t’a montré à discerner les bons et les mauvais soldats; autrement, à quoi te servira ce que tu as appris ? […] Mais, reprit Socrate, s’est-il borné à la tactique ou t’a-t-il appris aussi où et comment il faut user de chaque formation ? – Pas du tout, répondit-il. – Il y a pourtant beaucoup de cas où il ne faut ni ranger ni conduire les troupes de la même manière. – Ces cas-là, par Zeus, il ne les a pas expliqués. – Eh bien, par Zeus, dit Socrate, retourne chez lui et interroge-le; car s’il les connaît et s’il n’est pas un impudent, il rougira d’avoir pris ton argent et de t’avoir renvoyé mal instruit.»
Xénophon, Les Mémorables, III, 2, 8-11, in Œuvres complètes, t. III, trad. française, notices et notes de Pierre Chambry (éd. Garnier-Flammarion, 1967), pp. 348-349.
«[…] Celui qui a le droit d’accéder à la communion du pouvoir de délibérer et de juger, celui-là, disons-nous, est citoyen de la cité considérée; et la cité est un ensemble de personnes de cette qualité, [en quantité] convenable afin de réaliser une autarcie vitale, pour tout dire en un mot. […] En vérité, tout est simple : si les intéressés participent à la constitution de la cité suivant la définition sus-énoncée, ils sont citoyens.»
Aristote, Politique, III, 1 (1275 b) & 2, trad. française de Jean Imbert d’après l’éd. H. Rackham in The Loeb Classical Library (Londres-Cambridge, 1950) in La Pensée politique des origines à nos jours, I, IV, 10 (éd. P.U.F., coll. Thémis – textes et documents, 1969), p. 41.
1) - Du symbole esthétique au fait symbolique
Le génial, mais très mutilé à sa sortie, L’ultimo treno della notte [La Bête tue de sang-froid] (Italie, 1975) d’Aldo Lado, ancien collaborateur de Pasolini, racontait l’histoire de deux jeunes européennes violées et torturées par deux voyous «anarchistes» sous la maléfique influence d’une «grande bourgeoise» sadique fascinante et perverse mais aussi sous l’influence de l’alcool et de la drogue, dans un train de nuit entre l’Allemagne et l’Italie. Le film renvoyait dos à dos, à la manière de Deleuze par exemple, bourreaux et victimes, dans la mesure où le père médecin de l’une d’elles identifiait et tuait d’une manière atroce les deux assassins marginaux mais épargnait la «grande bourgeoise» en question. Le propos de ces années 1975 était «à bourreau, bourreau et demi». C’était un propos aussi philosophique qu’esthétique et moral dont le film se nourrissait. Le titre original italien, L’ultime train de la nuit, renvoyait insidieusement, volontairement par-delà le scénario, à d’autres trains de nuit, et l’éternité de la pulsion de mort était constatée et mise en forme.
Près d’une semaine après les faits, on peut dire que l’affaire du «train de la terreur Nice-Lyon» survenue à l’aube du Nouvel an 2006 est enfin «sortie» : on avait l’impression qu’elle avait d’abord été étouffée. Les divers forums réactifs d’Internet, la presse locale, et surtout la gravité des faits devaient tôt ou tard faire remonter cette affaire au plus haut niveau. Ce n’est pas rien qui s’est passé même si c’est aussi la répétition de centaines d’actes similaires à plus ou moins grande échelle – centaines, que dis-je ? milliers ! – commis dans notre pays.
Un train de 600 voyageurs a été attaqué et littéralement terrorisé durant 90 minutes par des dizaines de jeunes barbares ivres mais ayant organisé – prémédité ? – leur action avec assez d’efficacité. Qu’on en juge par ce qu’on sait déjà assurément : vols avec extrême violence ayant entraîné blessures graves, violences sexuelles collectives envers une jeune fille de 20 ans, menaces de mort aux témoins, destruction. 600 personnes laissées sans protection durant ces 90 minutes alors qu’elles avaient fêté toute la nuit le Nouvel an, donc alors qu’elles étaient fatiguées, peu en état de se défendre, et, de toute manière, incapables de se défendre. La signification hautement symbolique de cet acte de violence à grande échelle a eu raison de ce qui ressemblait initialement à une conspiration du silence. Désormais, oui, on commence à savoir ce qui s’est passé. Mais on ne saura pas tout, tout de suite. On devine plus qu’on ne sait la réalité abjecte de ce qui s’est passé. Seuls ceux qui l’ont vécu 90 minutes tout du long peuvent – pourront ? – en témoigner.
Gouvernement, région, police, gendarmerie, S.N.C.F. ont été, de facto, incapables d’assurer la sécurité de ce train pourtant «sous état d’urgence» comme le reste à cette date-là. Aucun policier ni aucun gendarme n’était là où il eût fallu qu’ils soient : au bon endroit et au bon moment. Les autorités de tutelle de toutes ces instances administratives se renvoient la balle les unes les autres et les ténors socialistes se jettent sur l’occasion. En vain : c’est sous l’ère Mitterrand que les trains, R.E.R. et métros ont réellement commencé à devenir dangereux dans ce pays. N’importe quel voyageur pratiquant les transports en commun depuis 30 ans peut en témoigner aisément : dans les années 1970, on pouvait monter dans un train de banlieue le samedi soir sans prendre un risque vital régulier. Ensuite ce fut de moins en moins le cas. Bref… leur opportunisme éclate au grand jour. Inutile de s’y appesantir car l’essentiel n’est pas là.
Sous état d’urgence, une femme (professeur d’art plastique) a été poignardée par un de ses élèves en pleine classe : elle a reçu trois coups de couteaux et failli mourir. Sous état d’urgence, des gangsters se rafalent au pistolet-mitrailleur du côté de Marseille au risque de tuer des passants. Sous état d’urgence, 600 personnes voient leur vie et leurs biens menacés dans un train Nice-Lyon. Sous état d’urgence, 450 ou 500 voitures brûlent la nuit du Nouvel an et 13 gendarmes sont blessés à Paris intra-muros. Sous état d’urgence, les jeunes barbares responsables à Marseille d’incendie de wagon sont relâchés par les juges alors que la police les avait arrêtés. Les mineurs sont jugés «séparément» alors qu’ils sont les plus dangereux de tous en cas de violence collective : les témoignages accumulés depuis des années le prouvent.
Tout cela n’est pas sérieux : la faillite de l’État concernant sa mission première (sécurité des biens et des personnes) est patente. La seconde mission de l’État, assurer la solidarité et le lien social, la fraternité sociale et économique, est non moins bafouée journellement : une allocation de 600 euros versés à des centaines de milliers de personnes adultes handicapées ne leur permettant pas de vivre décemment, des chômeurs stigmatisés comme fraudeurs potentiels, des pauvres mourant de froid dans nos rues, sur nos trottoirs. L’objet de cet article concerne la première mission et s’y restreint : il est moins facile de la penser que l’autre, même si les résultats des diverses pensées ont du mal à aboutir concernant la seconde.
2) - Matières rationnelles du symbole
Avant les remèdes préconisés, un mot annexe mais fondamental : les jeunes gens d’origine étrangère impliqués dans ces actes sont une permanente souillure pour leur communauté d’origine. Car les jeunes gens honnêtes d’origine étrangère sont en butte au racisme à cause de ceux-là, d’abord et avant tout. Il n’est pas normal qu’une jeune fille d’origine arabe qui est musulmane, honnête et possède ses diplômes ne trouvent pas de travail autre qu’hôtesse d’accueil alors que les autres jeunes filles de sa promotion en ont trouvé. Il n’est pas normal qu’un jeune homme honnête de peau noire ne trouve pas de logement alors qu’il a un travail et perçoit un salaire. Cette situation est d’abord imputable aux barbares dont les origines ethniques sont similaires aux leurs. Le problème du passage d’une justice archaïque à une justice rationnelle fut pour la première fois illustré dans notre culture occidentale en 458 av. J.C. par l’Orestie. Mais la justice collective archaïque persiste dans les mentalités collectives de nos sociétés modernes. C’est un fait dont le racisme est une traduction vérifiable chaque jour. Le juste au sens grec eschylien doit savoir séparer l’homme mauvais du reste de sa famille, de ses proches. Mais en Grèce archaïque et primitive, comme dans toutes les sociétés primitives étudiées par les sociologues du sacré, le criminel seul n’était pas condamné : ses proches l’étaient aussi car le crime était considéré comme une souillure passible de contagion, donc devant être circonscrite très largement. La société française ne réagit pas comme un individu rationnel français : c’est un phénomène naturel même si condamnable. De même que dans une foule, Gustave Le Bon a démontré depuis longtemps que c’est non pas le plus intelligent mais le plus bête qui a des chances de mener les autres. C’est ainsi. Il faut le savoir.
L'intégralité de cet article ici, au format PDF.
17/11/2005
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Mon cher Juan,
il vous aura peut-être paru surprenant que je ne me manifeste pas depuis le début de ce qu'il est convenu d'appeler la révolte des banlieues (expression à la fois idéaliste et erronément généralisante, entachée de parti pris).
Mon silence jusqu'à ce jour tient, justement, à ce que j'essaie de m'écarter de toute réaction de parti pris pour tenter de comprendre et analyser, autant que faire se peut, ce qui se manifeste de tous côtés depuis le début du mois de novembre. Et il s'en manifeste, des choses, raisons, déraisons et péroraisons, par et autour de cette flambée de violence que, pour ma part, je n'arrive pas à prendre au sérieux – non pas au sens où je dénierais de quelque façon que ce soit la gravité des actes qui se commettent chaque nuit depuis 15 jours, ni que je n'en mesure l'effroyable potentiel et la désolante leçon; mais autant mon désarroi est immense face aux événements eux-mêmes, autant je ne parviens pas à adhérer d'aucune manière à aucun des discours (du fleuve des discours) que se sont senti en droit et en demeure de produire sur ces événements tous les tenants de parole, des plus piteux commentateurs habituels des médias aux philosophes et écrivains, en passant par les politiques et tous les diaristes et blogueurs internautes.
Pour paraphraser l'introduction au remarquable commentaire qu'Alain Finkielkraut a fait la semaine dernière sur une radio communautariste (c'est tout de même à noter), ces événements m'atterrent profondément, mais ne me surprennent pas. C'est pour cette raison, et même si le fil du discours que je tenais alors n'a que peu à revendiquer de ce qui se passe aujourd'hui, que j'ai tenu à refaire lire en les proposant sur quelques sites, deux articles que j'avais écrits en 90 et 91, et qui me paraissaient pouvoir éclairer un peu la réflexion. Vous avez choisi de ne pas les publier vous-même, et je le regrette, non pour ma vanité, mais parce qu'ils auraient peut-être forcé notre ami Moury, comme ceux qui chez Cormary ou ailleurs lui ont emboîté le pas, à un peu plus de circonspection. Ils m'y ont forcé moi-même en tout cas.
Car, si la condamnation des actes qui se sont commis et se commettent encore doit être totale, si en aucun cas la recherche des raisons de ce qui se produit ne doit aboutir sur cette indigne aporie qui fait que toute une gauchardise irresponsable en vient à accuser les victimes des exactions commises, il me semble qu'on ne peut pas s'exonérer (on, c'est à dire chacun de nous en tant qu'il participe d'un corps social en déliquescence) à si bon prix que certains, dont Moury et même Finkielkraut à certains moments, de notre responsabilité et de notre solidarité (même si ça nous étouffe) à l'égard de ceux que les médias ont appelé émeutiers jusqu'au moment récent où ils se sont rendu compte que voyous faisait mieux (depuis que Chirac a parlé, ils vont redevenir les fils et les filles de la République, ce qui, même si les filles sont totalement absentes de leurs rangs, est tout de même beaucoup plus compatissant...).
La violence des loubards de banlieue exaspère, révolte, indigne, scandalise autant qu'elle fait peur, oui. Mais ce n'est certes pas nouveau. Ni son éternel état rampant dans le corps social de tous les quotidiens de toutes les sociétés du monde, ni ses explosions grégaires périodiques. Si elle mobilise aujourd'hui tant d'encre et tant de salive en France comme à l'étranger, c'est bien évidemment que le 11 Septembre 2001 est passé par là. Mais quoi ? Les casseurs, beaucoup de commentaires réactionnaires le soulignent, sont aussi incultes que le premier hooligan venu, n'importe quel beauf teigneux qui, entre deux tirages du loto, brique sa caisse, vidange son huile au caniveau en se disant que tout le monde s'en fout ça changera pas le monde je paie mes impôts, moi, et retourne beugler sur les gosses des voisins. Les loubards ne paient pas d'impôts, en plus, et comme le dit justement Finkielkraut, leur essentielle motivation dans l'existence est de se faire de la thune, n'importe comment, parce que la thune c'est respect, zy-va. Croire que derrière ce degré zéro de la pensée politique peut se cacher un plan de conquête islamique est à peu près aussi idiot que rêver par lui l'avènement des phalanstères proudhoniens. On souhaiterait bien plutôt que la pensée religieuse, qu'elle fût islamique, chrétienne, juive ou bouddhiste, parvienne à ébranler un jour leur carapace de haineuses rancœurs.
On évoque aussi, à la jubilation des puissances étrangères, si ce n'est à l'instigation de certaines, que l'insolence française a toujours exaspérées et que sa position lors de la guerre d'Irak tout autant que son NON à la Constitution européenne ont confortées dans cette perception, la démonstration de l'échec du modèle social français, qu'on étend volontiers à une crise de la République. J'aurais pour cette lecture des événements une certaine convergence de vue, n'en déplaise à quelques émules de Jean-François Kahn qui y voient exactement l'inverse, dépassant de cent coudées d'imbécile mysticisme laïcard ceux qui parent le vandalisme actuel des couleurs de la sédition. Il n'est que trop criant que le modèle social dont nous abreuve depuis une bonne décennie le parler syndical et politique national est, sinon inexistant, au moins lamentable, construit de bric et de broc sur un amoncellement de micro-privilèges corporatistes, de dépenses collectives clientélistes, de répartition illusoire et de solidarités fumeuses, réunies dans la revendication incantatoire et inopérante de sa cohérence auto-proclamée. Quant à la République, il y a bien longtemps que son sens a déserté les vaisseaux qui irriguent la médiature (c'est-à-dire ceux que l'appétit et le sort a mis à la direction de notre société), comme en ont témoigné récemment l'indigne campagne référendaire pour le traité constitutif européen et l'absence totale de mise en œuvre de son résultat par ladite médiature, Président de la République en tête. Crise de la République il y a donc bien, mais depuis bien plus longtemps que n'en pourront jamais témoigner les beuglements délétères de quelques voyous, enfants de la guerre sans merci que les puissances de l'argent ont remporté sur le ventre mou d'une Chose Publique dévoyée par un siècle de vraies corruptions et de fausses dénonciations jetées en pâture à la vindicte poujadiste des masses.
Certes donc, le portrait de notre société, au moral qu’elle déconstruit sournoisement ou cyniquement depuis des lustres comme au physique qu’elle arbore dès qu’un infime de ses sous-produits (voyous, terroristes, dégâts d’ouragans même) le dévoile, n’est pas franchement gaillard, et l’on pourrait plutôt s’étonner de l’incroyable résistance à l’épreuve d’un système capable d’absorber sans presque broncher les dysfonctionnements qu’il produit et les menaces qu’il accumule à l’horizon toujours plus prochain de ce qui subsiste d’humanité en chacun de nous – un peu d’espérance, un soupçon de désir de sens, une once de tremblement face à notre responsabilité dans la poursuite collective de l’aventure humaine.
Nous sommes loin de notre sujet ? Hélas ! Notre sujet est noyé depuis quinze jours de tant de parasites – faut-il envoyer l’armée aux loubards ou bien les y enrôler de force ? Faut-il leur construire plus de stades ou bien couper les allocs à leurs parents ? Faut-il pendre Sarkozy ou l’élire ? Islamisme rampant ou vulgaire mafia ? Sauvageons injustement discriminés ou racailles perverses ?... – qu’on en arrivera à imaginer sans sourire ni vomir une issue au problème dans la candidature de Ségolène Royal à la Présidence de la République !
Car le débat qui s’est instauré autour de la révolte des banlieues est une enfilade de monologues de sourds dont encore ne sortiront vainqueurs, comme toujours, que la dérision des Guignols de l’info et autres Ardissonneries, le cynisme débilitant de l’infogielisme ambiant et de coûteuses mesures cache-misère. Moury et quelques autres ont au moins eu raison sur ce point : il faut appeler un chat un chat, et cesser de se cacher derrière son petit doigt. Cette révolte montre clairement une seule chose, c’est que notre société a généré un monstre qu’elle n’a ponctuellement aucune manière de canaliser hors la violence qu’il appelle et qui le régénère, et dont nous serons dans la durée incapables de nous débarrasser sans remettre profondément en question notre fonctionnement et nos valeurs collectives.
Pardonnez-moi, cher Juan, de m’en tenir là de mon propre monologue de sourd, et de ne tenir en aucun cas à avancer ma propre panoplie de solutions définitives.
Bien cordialement,
Serge Rivron.
11/11/2005
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Complétant et prolongeant à leur façon les deux textes remarquables (le premier et le second) de Francis Moury qui, je dois le dire, ont été lus, si j'en crois les nombreux blogs anglo-saxons qui les ont mentionnés, bien au-delà de la zone d'influence traditionnelle arpentée par le stalker, voici un texte (sous-titré : L'Avant-Guerre civile ethnique), pas moins polémique, de mon ami Raphaël Dargent, directeur du Cercle Jeune France et de la revue Libres. La Zone s'ouvre donc, une nouvelle fois, à toute personne désireuse d'y venir penser, et penser n'est-ce pas, cela signifie toujours remonter à la source et surtout ne point se laisser séduire par les sirènes défraîchies chantant le quotidien infra-verbal. Je puis dire aussi que ces deux textes de Francis m'ont valu un abondant courrier, toujours retransmis à mon ami. Je garde de l'un d'entre eux, signé par le patron de la Revue des deux Mondes, Michel Crépu, un souvenir amer : nous était demandé de prendre de la hauteur, les événements qui ensanglantaient nos banlieues méritant, selon Crépu, bien autre chose (mais quoi ? L'intéressé n'a jamais pris la peine de nous répondre...) que des échevelades bloyennes. N'allons pas plus loin, tout est dit : lorsque Michel Crépu désire exprimer le comble de sa colère, que dis-je, l'abomination de la désolation tranquillement assise dans le saint des saints de la pensée juste et humaniste, l'adjectif ordurier bloyen revient systématiquement sous sa plume sagement policée qui, n'en doutons point, écrira dans le prochain numéro de sa vénérable revue un papier sage, ironique, intelligent, content de son point de vue stratosphérique et bien incapable mon Dieu, à moins d'y déverser le combustible de mille enfers, de commencer à rougeoyer... Quant à la combustion n'y rêvez pas, autant demander à un placide catholique d'aller houspiller, son petit Du Bos en poche, contre la mort de plusieurs innocents tombés sous les coups des chi... pardon, des sauvageons.
Que l'on ne s'y méprenne pas, le Mal tel que l'analyse et le stigmatise Raphaël est exactement le même que celui qui a provoqué la belle colère de Francis, laquelle semble avoir dérangé bien des cervelles de moutons qui, s'appliquant à m'écrire en tirant la langue, m'ont jeté, comme s'il s'agissait de rayons laser, des mots terribles : royaliste, extrémiste, fasciste, amalgameur, dangereux excité, que sais-je encore, ah oui : bloyen. Seule l'arme et, bien sûr, l'angle d'attaque choisis par nos belluaires (les porchers se reconnaîtront) diffère, si je puis dire, qui tentent de percer le caparaçon épais recouvrant l'âne monté par la fameuse Putain, en parade criarde dans les ruelles crasseuses de la Babylone républicaine. De cette fourberie linguistique qui porte un nom, et un nom qui, comme toujours, trahit l'immonde réalité se parant d'oripeaux glorieux, je dirai, avec une ironie gourmande, qu'elle est d'abord un gauchissement.
Les banlieues brûleront sans doute toujours mais, dans ces feux de joie, comme les considèrent trop de commentateurs (appelons-les, pour plus de commodité, des crétins) de gauche, dans cette guerre civile larvée selon certains pusillanimes dirigeants de droite tout de même embabouinés par la langue de bois apprise de force dans les goulags du prêt-à-penser, et, enfin, dans cette véritable annonciation (mais encore infiniment atténuée, on s'en doute) des lendemains qui attendent la France laïcarde, comme une toute poignée d'intellectuels, Del Valle, Finkielkraut ou d'écrivains, comme Dantec qui n'ont jamais craint, tel l'Ézéchiel d'Abellio, de garder leurs yeux ouverts, osent l'affirmer, se cache... Quoi ? Une maladie du langage. Je ne dis pas : une maladie qu'accentue le langage lui-même cancérisé, j'écris bel et bien, dans l'urgence même de cet intolérable paradoxe (tous les paradoxes le sont...) : une maladie du langage, à côté de laquelle, comme Kraus le savait si bien, la guerre n'est rien. Une réalité fantasmée, travestie par des mots mensongers peut se parer de tous les prestiges, au sens que Wier, docteur pétri de science et de méthode expérimentale, traquant les délires démoniaques, donnait à ce très vieux mot chéri des démonologues. Une réalité qui porte son nom, et son nom véritable (meurtrier et non casseur en rupture de société, meurtre et non point haine des natures mortes, fussent-elles celles représentant des lampadaires, guerre civile larvée et non point échauffourées de jeunes qui rouillent au pied de leur barre, islamisme rampant et non point chants guerriers appris dans les jeux vidéo, etc.), n'est rien de plus qu'un fait, qu'une action politique certes courageuse n'aura alors aucun mal à contenir, endiguer, réprimer ou... rédimer. Il est cependant vrai, nous le savons tous, que l'action politique a depuis trop longtemps perdu (n'était-ce pas même un rêve fabuleux ?) sa majuscule qui le rapprochait d'une véritable mystique.
Il y a donc, derrière chaque main levée de voyou, dans chaque projectile (le terme est faible lorsqu'il s'agit de machines à laver !) jeté par un de ces irresponsables dans le but, évident, de blesser ou de tuer, dans chaque cri de haine hurlé à la France (qu'il s'agit toujours de baiser ou de crever) par ces chiens analphabètes sponsorisés par nos médias, un menteur, et un menteur officiel, plébiscité par une cohorte de bouffons placidement d'accord avec la horde, non pas celle des loups mais celle des moutons. Vous ne m'en voudrez pas je pense, dans le cas qui nous occupe, de jeter à la face de ces imbéciles consciencieux que le mensonge, immense, énorme comme un nuage chargé d'orage et en même temps de guère plus de consistance qu'un mauvais rêve, est de toute pièce exhalé par le marécage putride où croupissent nos belles âmes du peuple de gauche qui, à son tour, n'en finit pas de crever en s'empoisonnant de mots pervertis, portés en triomphe comme des étendards déchirés. Parfois, souvent même, je ne l'ai jamais nié, ces étendards ont été levés par des hommes (et je ne songe pas seulement à nos tant vantés résistants, presque toujours, allez donc savoir pourquoi, communistes...) qui ont payé ce geste de bravoure de leur vie. Aujourd'hui, regardez ce monument d'Iwo Jima de foire : des nains s'agitent en tous sens, qui ne sont pas dignes de lécher les excréments de leurs ancêtres, et se précipitent pour se bâfrer dans l'écuelle sordide des vertus républicaines qu'ils renversent comme des pourceaux.
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«Le plus dur semble aujourd’hui derrière nous». Voilà ce matin ce que se répètent, pour s’en convaincre, beaucoup des Français victimes des violences urbaines quand ils constatent que celles-ci vont peu à peu en diminuant. On aimerait que cela fût vrai, qu’en effet l’heure soit à l’apaisement, qu’en effet tout rentre dans l’ordre. Or, je ne le crois pas. Le plus gros de la tempête est malheureusement encore à venir. Pour dire vrai, il se pourrait bien que ces émeutes ne constituent en réalité qu’une sorte de répétition, même pas générale, de ce qui nous attend d’ici quelques années, cinq, dix, quinze ans au plus, à savoir une authentique guerre civile interethnique. Je sais bien ce que cette expression de «guerre civile» peut avoir de choquant pour les belles âmes. Peu importe. Après quatorze nuits de guérilla urbaine inouïe – mais non pas imprévisible car il fallait bien que cela survienne – il est temps de parler clair et de dire les choses telles qu’elles sont, d’appeler un chat un chat. Depuis une semaine, j’ai lu et entendu trop d’inepties sur le sujet.
I. Racailles et «collabos»
Racaille. Commençons par ce mot autour duquel la bien-pensance s’exclame et pousse ses cris d’orfraie. N’est-il pas surréaliste qu’une polémique soit née et ait enflé autour de ce mot prononcé par Nicolas Sarkozy ? Comment donc aurait dû parler le Ministre de l’Intérieur ? Eût-il fallu parler de «garnements», de «chenapans» ou encore comme l’angélique Chevènement de «sauvageons» ? Car enfin comment appeler, sans choquer personne, et surtout pas nos commissaires politiques de l’égalitarisme, nos gardes rouges du droit-de-l’hommisme, ces voyous qui brûlent tout sur leur passage, voitures, bus, centres commerciaux, entreprises, entrepôts, gymnases, écoles, ces délinquants qui caillassent les forces de l’ordre, les pompiers, les chauffeurs de bus, ces salopards qui vendent leur drogue à nos enfants et les rackettent, ces barbares qui battent à mort un homme innocent, ces monstres qui arrosent d’essence et mettent le feu à une femme handicapée ? Existe-t-il même un mot approprié pour dire à quel degré de folie, de haine, d’inhumanité sont parvenus ces individus ? Ce mot même de «racaille», bien faible en réalité pour dire ce qu’ils sont, ne choque que les idiots, ceux qui croient ou font semblant de croire que Sarkozy montrait du doigt TOUS les jeunes des banlieues – ce qu’il ne fit jamais ! – et les privilégiés, cette gauche idéologue qui habite loin de ces quartiers. Mme Michèle Stouvenot, éditorialiste au Journal du Dimanche, affirme que l’appellation est «désuète», «qu’on ne l’entend plus guère que dans les vieux et bons quartiers de Neuilly». «C’est dire, conclut-elle, si Nicolas Sarkozy ne parle pas comme les gens». Que Mme Stouvenot quitte donc les couloirs climatisés de son journal ! Elle verra que n’est pas décalé celui qu’elle croit. Ce terme de «racaille», ces barbares en herbe (l’expression prend ici tout son sens) l’ont adopté eux-mêmes depuis des années, revendiquant d’être, en verlan, la «caillera». A tel point, qu’en signe d’identification, de reconnaissance – réflexe proprement tribal, «communautaire» dirait-on aujourd’hui – le mot de «kaïra» s’affiche sur leurs sweet-shirt, sur fond de gueule de Pitt Bull.
Mais l’indignation est sans limite chez nos apôtres gauchistes; c’est même chez eux comme une seconde nature. Avant-hier, ils s’indignaient des mesures de couvre-feu qu’ils jugeaient attentatoires aux libertés fondamentales, aujourd’hui ils s’émeuvent de la volonté de Nicolas Sarkozy d’expulser les étrangers, quelles que soient leurs situations, qui ont participé à ces violences. N’est-ce pas justement parce que l’état d’urgence a été déclaré que l’étendue des violences s’est réduite depuis deux nuits ? Quant à l’expulsion des étrangers émeutiers, n’est-elle pas une simple mesure de bon sens ? Quel pays au monde peut-il accepter qu’on vienne de l’extérieur le mettre à feu et à sang ? Faut-il donc que ceux qui polémiquent ainsi soient inaptes à tout raisonnement autre qu’idéologique ? A vrai dire, on a beau être habitués depuis des années à de telles inepties, ces présentes réactions d’indignation sont proprement ahurissantes et dépassent l’entendement. Ce ne sont là que défis au sens commun. On n’ose imaginer quel camp choisiront demain ces gens quand le pays sera en plus grand péril encore. On ne devrait jamais oublier que c’est par pacifisme et par volonté d’apaisement déjà, que l’essentiel de la Gauche vota hier les pleins-pouvoirs au maréchal Pétain, condamnant la France à l’armistice, c’est-à-dire à l’abaissement, et ce en toute connaissance de cause.
Les polémiques proprement scandaleuses des Hollande, Mamère et autres Buffet ou Besancenot doivent les disqualifier définitivement aux yeux du pays profond. Pour notre part, nous savons désormais qu’il nous faudra tout faire pour que ces gens ne reviennent pas au pouvoir. Il fut un temps où certains patriotes parlaient d’Anti-France pour qualifier leurs adversaires. Il n’est pas interdit aujourd’hui de ressortir l’expression des placards où on l’avait remisée, croyait-on pour toujours. Mais c’est toute la Gauche qui révèle aujourd’hui son vrai visage, à l’exemple de cette gauche républicaine dont nous fûmes proches, eu égard à notre combat commun contre l’Europe supranationale (même si nous avons toujours su que son NON avait peu à voir avec le nôtre), qui s’égare et dérape complètement. C’est peut-être là le seul mérite des événements dramatiques que nous vivons : ils clarifient remarquablement les positions et nous désignent nos véritables amis. Les crises nationales sont toujours de formidables révélateurs.
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II. L’aveuglement idéologique de la Gauche
Oui, la Gauche s’égare et avec elle les commentateurs et une partie du pays, en considérant que ces événements expriment uniquement une grande colère sociale.
Qu’il y ait une désespérance sociale dans ces quartiers n’est pas contestable et nul ne le conteste en vérité. Mais le chômage n’est pas réservé aux seuls enfants de l’immigration, il existe partout et pas seulement dans ces banlieues; il touche aussi des quinquagénaires «blancs». Ces derniers ne mettent pas pour autant le feu à leur quartier. Et puis qu’on ne nous raconte pas d’histoires : ceux qui brûlent et saccagent ne sont pas tant les chômeurs en fin de droits que ceux qui au contraire vivent fort bien et prospèrent de leurs trafics illicites, gagnants pour certains d’entre eux en une seule journée ce qu’un enseignant ne gagne pas en un mois !
Qu’on cesse aussi de dire, contre toute vérité, que rien ne se fait pour aider les banlieues. Beaucoup s’est fait et beaucoup se fait encore. Depuis maintenant une quinzaine d’années, nombreux sont les centres socio-culturels, les équipements sportifs, les réhabilitations d’immeubles collectifs, les aménagements d’espaces verts qui ont été financés et malheureusement aussitôt dégradés, voire saccagés. Le préfet du Nord s’est, il me semble, ému de cette réalité.
Las, le gouvernement s’apprête – le Premier ministre s’y est engagé pour calmer la crise – à en remettre une couche, à distribuer à nouveau 100 millions d’euros pour ces quartiers.
Qui paiera les destructions ? Et qui financera ce plan exceptionnel ? La réponse est simple : le Français moyen, contribuable et assuré qui n’en peut plus et que la colère étouffe. Et pour quel résultat ?
La Gauche gémit sur la répression policière de Nicolas Sarkozy mais ne voit-elle pas que la Droite libérale lui donne finalement gain de cause ? Gain de cause quand elle dote à nouveau des associations de quartiers, dont certaines se servent de l’argent public pour développer l’enracinement communautaire; gain de cause quand elle avance sur le dossier du vote des étrangers aux élections locales ou promeut la discrimination positive, servant ainsi son projet de France multiculturelle et multiethnique; gain de cause enfin quand elle reprend à son compte la folle revendication de mixité sociale, mixité qui ne fera qu’étendre à l’ensemble du territoire un problème jusqu’alors cantonné à certains quartiers, de la même façon qu’au nom de l’égalité des chances la mise en place du collège unique provoqua hier l’effondrement généralisé du niveau scolaire moyen ? La Gauche n’en a décidément jamais assez; aveuglée par son obsession égalitariste et droit-de-l’hommiste, elle se moque que le pays soit menacé de banqueroute : elle est prête, coûte que coûte, à casser la tirelire, quitte pour se faire à menacer l’identité et à terme l’unité françaises.
III. De l’intégration à la désintégration : le danger communautariste
En réalité, il ne s’agit pas tant d’un problème social que d’autres choses.
Il s’agit d’abord de délinquance pure.
Comment ne pas parler de délinquance pure quand il s’agit en vérité de la volonté de certaines mafias organisées dans ces quartiers de faire «tomber» le Ministre de l’Intérieur qui leur a déclaré la guerre publiquement et dans les faits ? Si toute l’affaire autour des termes de «kärcher» et de «racaille» a ainsi été montée en épingle jusqu’à entraîner ces émeutes, c’est bien parce que certains trafiquants, certains receleurs, certains voleurs, avaient intérêt à créer une pression telle sur le gouvernement que Nicolas Sarkozy serait contraint de démissionner. Les politiques qui relayèrent cette revendication exprimée par les banlieues font figure d’étranges complices. On a parlé d’«organisation» pour expliquer l’importance du phénomène violent; c’est, je crois, à partir du moment où l’on prend en compte cette donnée mafieuse qu’en effet l’on peut évoquer une «organisation». Les dealers sont suffisamment nombreux partout en banlieues (et ailleurs) pour se sentir tous également menacés dans leur business comme ils disent par les propos – et les actes – du Ministre de l’Intérieur.
Il s’agit aussi d’un problème ethnique. Et là aussi, il faut désormais parler vrai.
Il n’est plus temps de se voiler la face : la France ne maîtrise plus son immigration. Il suffit pour s’en convaincre de prendre le métro parisien ou de parcourir certaines rues de Strasbourg, de Lille, de Marseille pour réaliser l’ampleur du phénomène. Corrélativement à cette vague migratoire, le communautarisme s’installe dans notre pays, les populations s’affilient par affinités culturelles et religieuses, par réflexe identitaire et ethnique.
Les belles âmes pourront dire ce qu’elles veulent : on ne peut ni assimiler ni «intégrer» indéfiniment des flots continus de populations éloignées de toutes nos traditions. Les seuils de tolérance, cela existe. De toute façon, jamais nous n’aurions dû abandonner la politique d’assimilation – qui a toujours été notre tradition nationale – au profit de celle d’intégration – conception anglo-saxonne. En réalité, la notion même d’intégration est fondamentalement une notion communautariste. Elle vise à river à leur origine première et à leur identité ethnique, les populations étrangères ainsi «intégrées». Cette politique était viciée dès le départ. Elle reconnaissait de fait que les étrangers, de traditions culturelles trop éloignées des nôtres, ne deviendraient jamais, ne souhaiteraient même jamais devenir, des Français à part entière. L’intégration supposée des populations étrangères menait tout droit à la désintégration de l’ensemble national. Nous y sommes presque.
D’ailleurs, n’était-il pas absurde de demander aux populations étrangères de «s’intégrer» à l’ensemble national alors qu’au même moment l’on n’avait de cesse de sommer la France de se repentir, ici de complaisances avec Vichy, là de la colonisation, là-bas de la torture en Algérie, alors qu’au même moment l’on expliquait aux Français que leur pays était désormais trop petit et trop faible et qu’il devait disparaître au profit d’un ensemble fédéral européen ?
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IV. Nul ne se renie impunément : l’identité de la France
Dans ces conditions, nul ne doit s’étonner de ces violences. Tout était malheureusement prévisible. De plus en plus de jeunes Français, issus de l’immigration certes mais nés en France, renient ce qui devrait être leur pays, ne le reconnaissent pas, et même maintenant le combattent. Comme dans ces chansons de rap qui insultent la France de «garce qu’il faut baiser à mort» et qui appellent justement à tout brûler.
Qui se souvient de ce stade de France – si mal nommé – qui siffla la Marseillaise lors d’un match opposant l’équipe nationale à celle d’Algérie, qui se souvient encore des drapeaux algériens qui flottaient le soir de la réélection de Jacques Chirac en 2002, à la grande stupéfaction du couple présidentiel, qui voit enfin ces jeunes Français portant fièrement leurs tee-shirts aux couleurs de la Turquie, du Maroc, de l’Algérie, prend conscience de la gravité de la situation.
Encore faut-il là-dessus rajouter l’incontestable montée en puissance de l’islam dans notre pays, et le drame est déjà joué. Un mot justement de la religion. Qu’il ait été nécessaire au XIXe siècle de lutter contre les congrégations qui s’immisçaient dans toutes les affaires privées et publiques, qu’il ait été nécessaire de séparer alors l’Église de l’État, n’est pas contestable, mais que nous en soyons encore là aujourd’hui, alors même que les églises sont vides, les curés de moins en moins nombreux et les valeurs chrétiennes partout bafouées, moquées, décriées est proprement inepte. La France n’est certes plus «la fille aînée de l’Église»; doit-elle pour autant renier ses propres racines, renoncer à son identité propre ? Car la religion, quoi qu’en disent les laïcards, fait partie de l’identité nationale. C’est là l’étrange incohérence des hérauts modernes de la laïcité : après avoir bouté le catholicisme hors de France, les voilà qui se battent pour que l’islam y ait sa place et prospère ! Aujourd’hui, le laïcisme – la laïcité pervertie en idéologie haineuse – est stupide et même criminel parce qu’il sape les derniers ressorts moraux du pays. C’est la France, rappelons-le, qui a souhaité que l’on gomme toute référence à l’héritage chrétien de l’Europe dans le Traité constitutionnel européen. C’est Chirac et Villepin qui souhaitent aujourd’hui que la Turquie rejoignent l’Union européenne. L’islam n’a donc pas fini de prospérer en France, contredisant non seulement notre héritage culturel et religieux mais aussi nos principes républicains. Charles Péguy écrivait il y a déjà un siècle que «Le mouvement de dérépublicanisation de la France est profondément le même mouvement que le mouvement de sa déchristianisation». Faut-il être naïfs pour ne pas voir dans les violences actuelles cette composante identitaire, ethnique et religieuse ? A force de se renier soi-même, nous serons balayés ? Faut-il être fous ou inconscients pour agir de la sorte ?
V. Vers la Grande Guerre civile interethnique ?
En tous les cas, il faudrait ne rien comprendre à la situation réelle de notre pays pour ne pas voir dans ces événements de guérilla urbaine l’annonce de possibles embrasements généralisés, peut-être d’une guerre civile entre communautés. La question de la Grande Guerre civile interethnique européenne a été posée par l’écrivain M. G. Dantec. Le propos a beau sembler apocalyptique, il apparaît de moins en moins farfelu.
Car la France n’est pas seule concernée par ces problèmes d’immigration et d’islamisation. Les Pays-Bas, eux aussi, prennent la mesure du problème. Avec le melting-pot que produit la centrifugeuse mondialiste, toute l’Europe et plus largement tout l’Occident sont désormais concernés. Ce désastre n’est pas le résultat d’une évolution sui generis, mais le fruit de politiques délibérées, politiques d’immigration que nos dirigeants veulent poursuivre tout en l’infléchissant quand ils appellent à tort, comme justement Nicolas Sarkozy, à une «immigration choisie», à des quotas d’immigration professionnelle. Cela fait maintenant deux décennies que l’on prépare nos esprits à ce multiculturalisme et à ce communautarisme. Or partout où il existe, il ne fonctionne pas et entraîne les plus graves tensions. C’est peut-être bien Dantec qui a raison : l’éclatement de l’ex-Yougoslavie n’a peut-être été que le signe avant-coureur de l’éclatement prochain de l’Europe. Au train où vont les choses, nous allons certainement en effet vers la guerre civile. Nul doute alors que la France, du fait de l’importance de ses communautés d’origines arabes et noires, sera en première ligne. Des penseurs comme Alain Finkielkraut ont le courage de dire ce qui menace. Voici déjà que des populations africaines s’organisent par quartiers, investissent des immeubles, occupent des églises, se posent en victimes, évoquent le passé colonial et au nom de ce passé revendiquent une radicalité politique. Sur fond d’antisémitisme, l’activisme du triste Dieudonné entre dans ce cadre, tout comme les propos haineux contre «la race blanche» de ses amis de la Tribu K.
Le politologue Alexandre Del Valle analysait clairement la situation en 1998 lorsqu’il écrivait : «Obligés d’accueillir dans leurs pays des millions d’immigrés musulmans globalement inintégrables, sans être jamais consultés démocratiquement sur ce point, les peuples européens sont les grands oubliés dans cette affaire. Nos dirigeants «politiquement corrects» les méprisent et les trahissent. Ils se permettent de traiter de «racistes» ceux qui manifestent leur refus de la submersion de l’Europe, oubliant au passage que leurs mandats leur ont été attribués avant tout pour garantir la pérennité et la sécurité de la nation.» (1)
VI. Pour le réarmement moral du pays
Dans l’immédiat ce qui est à souhaiter, c’est que «force reste à la loi» et que nul ne continue à donner gain de cause aux émeutiers en leur cherchant je ne sais quelles circonstances atténuantes. Ensuite, il est clair que le Ministère de l’Intérieur doit continuer son travail et en effet faire le ménage dans les banlieues, les vider de la «racaille» qui les peuple, dealers et trafiquants en tous genres. Et ce, quoiqu’en disent la Gauche aveugle et idéologique, prête à tous les renoncements. Sur ce plan, et sur ce plan seulement – celui de l’ordre public – il s’agit de soutenir Nicolas Sarkozy. Même si l’actuel Ministre de l’Intérieur n’est pas exempt de contradictions puisqu’il est aujourd’hui victime du communautarisme qu’il promeut et qu’il promet encore, jouant ainsi aux pompiers pyromanes.
Enfin, il faudra, et c’est là le plus difficile, que les Français retrouvent ce qu’ils sont, à savoir leurs valeurs, leurs racines, leur identité. Qu’ils cessent en tous les cas de se renier indéfiniment. C’est la condition sine qua non de la concorde civile et de l’unité nationale et, au-delà, de la pérennité du pays. Il s’agit désormais d’entendre l’avertissement et de travailler enfin au réarmement moral du pays.
Nous voici entrés dans le temps des kaïra, celui qu’il faut malheureusement appeler celui de l’Avant-Guerre civile. Est-il encore possible d’éviter le grand déchirement, l’embrasement généralisé, la guerre civile interethnique ? Cela n’est pas sûr.
(1) Alexandre Del Valle, Islamisme et États-Unis – Une alliance contre l’Europe (L’Age d’Homme, 1997). Il faudrait relire aussi l’analyse intelligente d’Éric Werner, in L’Avant-Guerre civile (L’Age d’Homme, 1998).