AGORISME
Le chapitre précédent n’a que rapidement discuté d’un petit nombre de tactiques. Quelques-unes se sont montrées efficaces chez des libertariens radicaux et le MGL inclut l’infiltration des groupes moins radicaux et la scission par la présentation d’alternatives ; la confrontation de toute coercition ou déviation par la dénonciation et la protestation ; le démarchage quotidien auprès des amis ; la participation à des clubs sociaux libertariens pour échanger des informations, des biens et se soutenir à la manière d’un proto-agora ; et bien sûr la publication, la prise de parole, l’écriture de fiction agoriste [1], et les activités éducatives sous toutes formes: enseignant, consultant, amuseur, historien, économiste, etc…
On ne peut que découvrir, pratiquer et transmettre les tactiques qui marchent. Ceux qui retrouvent des conditions similaires en temps et en lieu à celles où une tactique donnée s’est montrée efficace, peuvent réutiliser cette tactique. Mais il y a toujours des risques ; c’est ainsi dans tout activisme, qui n’est qu’une forme d’entrepreneuriat, un jeu d’anticipation du marché et de subvenir à la demande. On peut devenir meilleur à ce jeu par la pratique ; c’est ce qui fait les bons entrepreneurs. Tout est indiqué dans l’Action Humaine de Ludwig von Mises.
Pour savoir ce qui a été utilisé et si ça a marché ou non, la communication est indispensable. Si vous avez téléchargé cette page et que vous êtes d’accord et que vous souhaitez aider la résistance, ou que vous avez un ardent désir de résister à la coercition, vous êtes prêt pour le MGL ou l’ANL (Chapitre 4). Libérez-vous. Agissez.
Dans quelle phase sommes-nous ? En Octobre 1980 (première édition) l’essentiel de la planète est en phase 0. Les îles brittaniques, l’Australie et le Canada sont en transition vers la phase 1 ; l’Amérique du Nord est en phase 1. On voit les premiers signes de la phase 2 parmi les concentrations les plus denses de libertariens, en Californie du Sud. En supposant que la situation ne soit pas inversée, les premières gouttes de rosée agoriste – anarcovillages – sont en train de se condenser en sous-sociétés viables.
Le MGL n’existe qu’en Californie avec quelques noyaux dispersés, des agents et des cellules, en Alliance. L’Alliance Néo-Libertarienne proclamée auparavant s’est révélée prématurée et l’ANL reste un embryon jusqu’à ce que les conditions objectives nécessaires à sa subsistance se manifestent.
Le MGL a sa voie toute tracée. De l’extérieur, l’effondrement mondial de la « Gauche » [2] a affaibli les freins imposés aux secteurs les plus compétitifs de l’Etat, qui se précipitent vers la guerre pour re-mystifier ses victimes épuisées avec du patriotisme. Les libertariens ont désormais une opportunité de s’emparer des mouvements anti-guerre, anti-impérialisme et anti-conscription avec une nouvelle et fraîche idéologie en soutien, pour devenir la nouvelle vraie Gauche. Le MGL doit se battre contre le partiarchisme et les éléments monocentristes pour prédominer. [3]
L’avidité de la ploutocratie américaine, oscillant entre inflation galopante et dépression économique, en balancements sans cesse plus prononcés, a fait paniquer un grand nombre de businessmen jusque là passifs et leur a fait douter des assurances des conservateurs de restaurer la stabilité, et fait considérer des alternatives radicales, voire révolutionnaires. Seule la Gauche Libertarienne peut convaincre ces entrepreneurs de gagner une position « idéologique » non-pragmatique. C’est là que se trouvent nos opportunités.
Le Parti « Libertarien » a connu une crise interne avec l’élection présidentielle de 1980. Le dévoilement prématuré de l’étatisme inhérent du partiarchisme par l’opportunisme évident de Crane et Clark a réussi à non seulement générer une opposition de la part de la Gauche, mais aussi de Centre et de la Droite. [4] Les défections quotidiennes se sont accumulées. [5]
L’échec de quelques éléments réformistes essayant d’évincer le Kochtopus lors de la Convention de Denver (Août 1981) et de ramener dans les rangs les moins radicaux a fait drastiquement régresser le P »L » des USA et entraîné la recrue de milliers de désabusés au MGL ainsi que la poursuite d’activités d’éducation anti-parti et de contre-économie.
Avec ce manifeste comme guide et source d’inspiration, les stratégistes et tacticiens Néo-Libertariens peuvent rechercher, développer, corriger et mettre en pratique la Stratégie Néo-Libertarienne et les tactiques appropriées aux conditions qu’ils rencontrent. Il reste encore beaucoup de travail à faire mais les projets ont des conséquences inatteignables autrement: la fin de la politique, des impôts, de la conscription, des catastrophes économiques, de la pauvreté involontaire et des massacres de masse millitaires dans une guerre finale – la société contre Notre Ennemi l’Etat.
La contre-économie fournit une gratification immédiate pour tous ceux qui abandonnent les contraintes étatiques. Le Libertarianisme récompense ses pratiquants par plus de liberté et un accomplissement personnel qu’aucune autre alternative conçue jusqu’ici ne peut proposer. Mais seul le Néo-Libertarianisme offre la possibilité de réformer la société pour y créer un mode de vie moral, fonctionnel sans exiger un changement de la nature humaine. Les utopies peuvent être réfutées ; au moins nous avons une idée de comment remodeler la société pour l’adapter à l’Homme, plutôt qu’adapter l’Homme à la société. Quel autre défi pourrait-il être plus gratifiant de relever ?
Si vous avez maintenant choisi la voie Néo-Libertarienne, vous souhaiterez peut-être joindre votre voix aux nôtres pour prononcer le serment « Triple A », ou pousser un cri de guerre commun, ou autre chose, et y revenir régulièrement pour rafraîchir votre engagement:
« Nous témoignons de l’efficacité de la liberté et applaudissons la beauté complexe de l’échange volontaire. Nous exigeons le droit de chaque égo à maximiser sa valeur sans limite autre que celle d’un autre égo. Nous proclamons l’âge du Marché sans restrictions, des conditions naturelles et adaptées d’existence pour l’humanité, de la richesse en abondance, des objectifs avec ou sans limite, et du sens de la vie déterminé par chacun, pour tous: Agora.
« Nous défions ceux qui veulent nous enchaîner de dévoiler leurs raisons ; sans preuve d’agression de notre part nous brisons nos liens. Nous apportons la justice à tous ceux qui ont été agressés, en tout temps. Nous ramenons ceux qui ont souffert de l’oppression dans leur condition légitime. Et nous banissons pour toujours le Monstre des Ages, le monopole soit-disant légitime de la coercition, de nos esprits et de notre société, le protecteur des agresseurs et le destructeur de la justice. Nous détruisons l’Etat: Anarchie.
« Nous exerçons nos volontés jusqu’à nos limites personnelles, restreints uniquement par notre moralité. Nous combattons les anti-principes qui saperaient notre détermination et combattons tous ceux qui s’opposent physiquement à nous. Nous ne cesserons la lutte ni ne gâcherons nos ressources qu’une fois l’Etat détruit et qu’une fois que l’humanité aura trouvé sa demeure agoriste. Brûlant d’un désir inextinguible de Justice pour tout de suite et de Liberté pour toujours nous vainquons: Action !
Agora, Anarchie, Action !
Samuel Edward Konkin 3ème du nom
12 octobre 1980, anarcovillage de Long Beach
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Notes:
[1] Exemple: « Alongside Night » de J. Neil Schulman et ses possibles suites.
[2] La Gauche était à l’origine proto-libertarienne, tout comme les historiens sceptiques comme Léonard Liggio l’ont indiqué. A l’Assemblée Nationale française, les laissez-fairistes et défenseurs du marché libre comme Frédéric Bastiat siégeaient à côté de l’anarchiste Pierre-Joseph Proudhon. Même aujourd’hui les marxistes qualifient les anarchistes de « ultra-gauches ». Les libertariens et les marxistes étaient à peu près à égalité dans la première Internationale. Les marxistes et leurs imitateurs populistes ont connu une descente continue depuis les années 80, perdant leurs espoirs avec l’effondrement de la Nouvelle Gauche, l’invasion de la Tchécoslovaquie et de l’Afghanistan par l’URSS, et celle du Vietnam par la Chine – la guerre entre deux états marxistes étant supposée « impossible ».
[3] Actuellement, « L »P « R »C et SLS, respectivement.
[4] La « Droite » du Libertarianisme actuel est respectable idéologiquement mais beaucoup des principes qu’ils poursuivent sont en fait des anti-principes: gradualisme, conservatisme, réformisme et minarchie. Le magazine Reason et sa revue Frontlines sont ses principaux organes. Le « Centre » inclut Murray Rothbard et ses disciples, aujourd’hui organisés en Branche « Radicale » qui soutient Clark de manière « critique », c’est-à-dire de l’extérieur. Les Centristes de Rothbard ont viré à Gauche en abandonnant le monocentrisme.
[5] Murray Rothbard, comme mentionné ci-dessus ; le Directeur du Conseil du parti de Californie du Sud Dyanne Petersen, d’autres personnes qui ont informé l’auteur de leur défection imminente au cas où le clientélisme deviendrait encore plus prononcé (ce qui ne fait aucun doute).
- Note spéciale à la seconde édition: c’est ce qui s’est effectivement produit. Un flot ininterrompu de démissionaires ont rejoint les rangs du MGL chaque mois après cela. Au moins un groupe de Libertariens de Gauche, les Volontaristes, s’est levé pour faire concurrence aux ex-partiarches. Et Murray Rothbard organise, en ce moment, une dernière tentative d’arracher le contrôle du P »L » aux partisans du Kochtopus lors de la Convention de nomination présidentielle de Septembre 1983 à New York.
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